Permettre aux inventeurs de disposer, à l’aide d’un document unique, d’une même protection juridique sur l’ensemble du territoire des quinze États membres est l’objectif du brevet communautaire. Ce n’est pas le cas du brevet dit européen, né en 1973 à Munich. Il nécessite des traductions par pays et reconnaît à chacune des juridictions nationales une compétence pour juger les contentieux survenant à son sujet sur leur territoire.Mais la structure de 1973 avait été mise en place pour quelque deux mille demandes annuelles de brevets au sein de huit États. Or, en 2000, on recensait plus de 140 000 demandes à l’échelle communautaire, avec une vingtaine de pays adhérents à cette organisation.“L’un des premiers défauts du brevet européen est son instabilité, insiste Pierre Lubet, avocat associé du cabinet Rambaud Martel. En effet, il est contestable individuellement par pays. Ce qui signifie qu’il peut être valide en Allemagne mais annulé en France. Sa protection ne couvre pas systématiquement les quinze États “. Sans parler des distorsions nées des différences d’interprétation par chacun des juges nationaux. D’où l’idée de doter ce nouveau brevet communautaire d’un système juridictionnel centralisé.Ainsi, la Cour européenne de justice traiterait sous une seule autorité les contentieux relatifs à la validité ou à une mauvaise utilisation de ces titres. Autre innovation proposée à Stockholm : ne rédiger les brevets qu’en anglais, français et allemand. Et de réserver les traductions supplémentaires aux seuls litiges qui pourraient survenir dans les autres pays, afin d’alléger le coût plutôt élevé du dépôt d’un brevet en Europe.
Une harmonisation européenne difficile à mettre en place
“Avec l’explosion des nouvelles technologies, le dépôt de brevet n’est plus l’apanage des grands groupes, constate Maître Françoise Monod, associée du cabinet SDMC. Et nombre de start-up commencent par protéger juridiquement leurs innovations. Surtout si elles sont amenées à développer des partenariats stratégiques avec des multinationales “.Et, là encore, l’Union européenne est l’échelle naturelle. Ce qui explique que les entreprises attendent avec impatience cette procédure simplifiée… et, espère-t-on, forcément moins chère. Parmi les freins identifiés à cette uniformisation : les instituts nationaux en charge de la propriété industrielle, qui craignent de voir leur mission rognée au profit d’une entité européenne.Et certains pays comme l’Espagne, l’Italie ou la Grèce ne digèrent toujours pas que leurs langues soient mises de côté. Une attitude contestée par Frits Bolkestein, le commissaire européen en charge du marché intérieur, qui rappelle à qui veut l’entendre que, d’ores et déjà, 87 % des brevets sont déposés en langue anglaise.Et de rappeler qu’à l’Institut français de la propriété industrielle (INPI), les traductions ne sont consultées que dans 2 % des cas. Ultime enjeu de ce débat sur la propriété intellectuelle : l’opposition entre les États-Unis et l’Europe sur les matières pouvant faire l’objet d’un brevet. “Les Américains sont favorables à l’option d’un brevet du vivant, rappelle ainsi Corinne Lepage, du cabinet Huglo Lepage. Ce qui n’est pas le cas des Européens et des pays du Sud “.
Une question qu’il faudra rapidement trancher avec la forte progression de l’industrie des biotechnologies.
Des coûts de dépôt variables selon les pays | ||||||
Frais administratifs pour déposer un brevet, en euros | 8 États européens(1) | États-Unis | Japon | |||
Frais de recherche et d’examen | 2773 | 690 | 1310 | |||
Frais de délivrance | 715 | 1210 | 850 | |||
Taxe de renouvellement | 16790 | 2730 | 5840 | |||
Coût de traduction | 12600 | N A(2) | N A | |||
Rémunération de l’agent-ingénieur | 17000 | 5700 | 8450 | |||
Total | 49900 | 10330 | 16450 | |||
(2) Non applicable.
Les sommes à débourser pour déposer un brevet varient presque de un à cinq entre les États-Unis et lEurope. Outre-Atlantique, les taxes sont moins importantes et les coûts de traduction nuls.
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