La mode est à la gestion des connaissances. Les discours d’éditeurs de tous horizons convergent vers cette discipline. Porte-drapeaux de longue date du travail de groupe, Lotus et Microsoft ont rejoint les spécialistes des portails, de la gestion documentaire, du décisionnel, etc.Pourtant, ni Discovery System, d’un côté, ni Sharepoint Portal Server, de l’autre, ne constituent à eux seuls une solution globale de gestion des connaissances.D’abord, parce qu’ils ne répondent qu’à une partie des besoins en la matière, même si le premier produit – celui de Lotus – est plus riche fonctionnellement. Ensuite et de toute façon, parce qu’il n’existe pas de solution technologique globale prête-à-l’emploi sur ce domaine.Et pour cause : la gestion des connaissances ne se résume pas à une problématique technologique. Cette discipline complexe, située au c?”ur de la stratégie d’une entreprise, consiste à sauvegarder et à faire vivre le capital de connaissances et de savoirs de l’entreprise.Elle engage de fortes doses d’organisation et de communication. Même si, bien évidemment, elle s’appuie, au final, sur le système d’information.
La cartographie des savoirs, un préalable essentiel
La plupart des experts du domaine s’accordent sur les grandes étapes à suivre pour réaliser de tels projets.Au Club Gestion des connaissances, qui regroupe en France des utilisateurs et des fournisseurs concernés par le sujet, on distingue ainsi trois étapes essentielles. La première consiste à établir la cartographie des connaissances critiques qui servent à atteindre les objectifs de l’entreprise.Si cette phase s’apparente essentiellement à un audit, il existe néanmoins des logiciels spécialisés pour la mener à bien, tel Umap, de Trivium. La deuxième marche à gravir nécessite de mettre en place une gestion de ce patrimoine. Cette étape se subdivise elle-même en deux parties. Il s’agit d’abord de capitaliser et de partager les connaissances après les avoir extraites.C’est ici que les environnements de travail de groupe, de forums de discussion, de messagerie, ou encore les outils de Lotus et de Microsoft trouveront naturellement leur place. Il faut ensuite, et cela se révèle nettement plus ardue, favoriser l’appropriation de toutes les connaissances mises à disposition – par exemple, s’assurer qu’un document mis en ligne sera lu.
Assurer la mise à jour des connaissances
Enfin, troisième phase, le patrimoine intellectuel doit vivre et évoluer. Il le fera soit par le biais d’une veille vers l’extérieur, soit par la voie de processus d’innovation et de création.Invention Machine s’est risqué dans cette dernière direction avec son logiciel Techoptimizer. A partir de contraintes techniques pour créer un nouveau produit, par exemple, il effectue de la résolution de problèmes, identifie les brevets associés, etc.S’il n’y a pas de solution miracle, il existe donc bel et bien des briques logicielles pour soutenir la gestion des connaissances. Mais elles doivent obéir à des exigences bien précises. La première devrait être satisfaite avec le temps. Intrinsèquement, ces solutions s’appuient sur un puzzle logiciel, qui doit s’intégrer à l’existant.C’est clairement le parti pris par Microsoft, dont la vocation n’est pas de fournir un outil complet, mais extensible. “Les outils de gestion des connaissances doivent s’appuyer sur des architectures ouvertes – Microsoft ou J2EE – et éviter le syndrome Broadvision”, analyse Jean-Louis Bénard, directeur général de la société de services FRA.Pour ses propres besoins, la SSII a opté pour le produit de Microsoft, auquel elle a ajouté le moteur sémantique de Sinequa. Cette nécessaire ouverture des logiciels est partagée par les grands comptes. “Il existe un besoin de mieux interfacer les moteurs de recherche avec les bases de données et les outils de gestion de contenu de l’intranet”, confirme Renaud Phélizon, chargé de mission au Cigref (Club informatique des grandes entreprises françaises).Aujourd’hui, l’intégration est vue comme le maillon faible, ainsi que l’illustrent les propos du DSI d’une grande entreprise française :“L’environnement de Lotus ne s’intègre pas totalement à un environnement Microsoft. Pour nous qui sommes entièrement Microsoft, Discovery Server n’est pas utilisable.”Mais ces produits, encore jeunes, vont surtout devoir évoluer techniquement. Ainsi, la plupart s’intéressent à une connaissance explicite. C’est-à-dire des documents ou des messages existants. Il existe peu de logiciels d’extraction, de capitalisation ou d’exploitation de la connaissance tacite, celle qui n’est pas formalisée dans des documents et qui englobe le savoir-faire et les bonnes pratiques de l’entreprise, pourtant essentielles à sa compétitivité (lire l’encadré
Point de vue).On se résout, en général, à identifier les experts. Par exemple, en leur demandant de déposer leur CV sur un site, ou – méthode plus sujette à caution – en analysant leurs échanges par messagerie. “Pour l’ingénierie de connaissance tacite, explique Jean-Louis Ermine, président du Club Gestion des connaissances, il faut des outils – de publication de la connaissance, par exemple -, avec des interfaces de plus en plus cognitives. Pour l’instant, on est davantage dans la PAO. Imaginons également des outils de recherche sémantiques, mais aussi cognitifs, qui suivraient les schémas mentaux des gens. C’est-à-dire avec lesquels on trouverait tout de suite et précisément ce que l’on cherche.”
De l’identification des experts aux bases clients
Sans aller jusque-là, la solution de Lotus s’appuie sur des techniques de filtrage collaboratif pour enrichir le profil des utilisateurs et, ainsi, affiner la gestion des compétences. Mais le principe d’une solution de gestion des connaissances en boîte peine à convaincre les entreprises : elles jugent osée la démarche, et l’immaturité du produit les effraie encore.Les fonctions plus complexes d’un outil de gestion des connaissances ne doivent en aucun cas compliquer son utilisation. “Il est indispensable de s’adapter à la façon dont les gens travaillent plutôt que de former les gens à travailler avec l’outil”, insiste Danièle Chauvel, responsable du centre de recherche ECKM au sein du groupe ESC Marseille.Chez Cisco, la gestion de la connaissance a ainsi commencé avec le support clients, puis elle s’est répandue dans toute l’entreprise – “Parce qu’elle s’appuie sur des principes récurrents, comme la charte graphique, la navigation de base, etc. , précise Jean-Pascal Goninet, responsable des opérations commerciales grands comptes du constructeur en France. Il faut éviter que les outils soient différents de ceux qu’on a l’habitude d’utiliser.”Voilà pourquoi, souvent, des éléments simples et courants du système d’information servent de colonne vertébrale. “Pour commencer, nous avons utilisé l’e-mail, raconte Franck Halmaert, Corporate Knowledge Manager de la SSII Valtech. Puis, en complément, nous avons créé un intranet, inauguré le 1er juillet 1999. Aujourd’hui, tout passe par ce dernier.”
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