Même si le texte n’a pas encore été adopté, avec un rejet surprise lors d’un premier vote de l’Assemblée nationale le 9 avril due à une fronde socialiste, l’issue du vote final ne fait plus de doute.Et, à moins que le Conseil Constitutionnel démonte le texte, on connaît la teneur de cette nouvelle loi. Elle institue le principe de la réponse graduée : les échanges sur les réseaux peer to peer seront surveillés, à l’instigation des ayants droit des œuvres. Les adresses IP des internautes, qui téléchargent des contenus illégaux, seront collectées. Une nouvelle autorité administrative, la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet, fera recouper ces adresses avec les données nominatives des fournisseurs d’accès à Internet, afin d’identifier les contrevenants. S’ensuivra une procédure automatisée d’envois d’un premier courrier électronique d’avertissement, d’un deuxième courrier, voire d’une lettre recommandée, en cas de récidive, pour aboutir ensuite à la coupure de l’accès à Internet d’un abonné pouvant aller jusqu’à un an. Bien que sa connexion soit inutilisable, l’abonné devra continuer à payer son abonnement à son fournisseur d’accès. Le tout se fera de façon automatisée, sans passage devant une juridiction, et sans possibilité de se défendre avant l’application de la sanction.
Sécuriser son accès à Internet
Pour lutter contre le piratage et aider le développement des offres légales de façon “ pédagogique ”, le législateur a donc introduit un nouveau type de sanction. L’un des problèmes de la loi Création et Internet, c’est qu’il crée une nouvelle obligation pour les titulaires d’un abonnement à Internet : celle de sécuriser leur connexion. En clair, il est impératif pour l’abonné de mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour empêcher l’utilisation frauduleuse de sa box par un piratage du Wi-Fi, par exemple. Si un acte frauduleux a été commis à partir de la connexion d’un abonnement, c’est donc que celle-ci n’était pas sécurisée. D’où application de la nouvelle peine de coupure de l’abonnement. CQFD. Pour justifier que la ligne était bien sécurisée, il faudra donc montrer patte blanche en installant un logiciel de sécurité agréé. Ce qui ressemble fort… à un mouchard.
Triple peine vite appliquée
De plus, la loi Création et Internet inaugure la triple peine : l’abonnement peut être coupé et pourtant payé, mais cela n’empêchera pas les ayants droit, s’ils le souhaitent, d’engager des actions civiles en parallèle ! Reste que, même si le Gouvernement a déjà annoncé son intention de mettre la loi en application le plus vite possible, il faudra tout de même que soient pris quelques décrets d’application, que l’Hadopi soit nommée, que les solutions techniques de repérage des infractions et d’envois des courriers à grande échelle soient validées, etc., ce qui prendra au moins quelques mois.
L’avis de l’expert
La loi Création et Internet change très nettement les choses en termes de risques pris par les internautes en téléchargeant des contenus. Cette loi vise à éliminer tout ce qui est téléchargement illégal en ligne en remettant en cause ce type de pratiques. Ce qu’elle organise, c’est la sanction de toute reproduction, représentation, mise à disposition et communication d’œuvres via le réseau Internet sans autorisation de leur auteur. Aujourd’hui, on voit bien que le déclenchement de poursuites pénales, avec la saisine d’un juge d’instruction, pour aller voir ce qui s’est fait sur Internet, constater s’il y a contrefaçon ou non, et rechercher l’auteur des faits, notamment en demandant aux opérateurs de fournir les données de connexion, est une procédure très lourde. Très peu d’internautes sont appréhendés à ce stade. Avec le mécanisme qui sera mis en œuvre par l’Hadopi, les opérateurs ont vocation à devenir le bras armé de la justice, ce qui devrait conduire à une augmentation du nombre de personnes sanctionnées.
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