À quelques jours de la fin de l’année 2021, que retenir de l’année tech ? D’abord que la pandémie, qui a bouleversé 2020, a eu un impact encore très important cette année. La pénurie est loin d’être terminée, la production de certains composants reste problématique, ce qui retarde toute une industrie qui aime avancer vite.
Malgré tout, 2021 aura été une année assez folle, marquée par de grands lancements (Windows 11), de grandes batailles (Apple contre Epic), de grands changements (Facebook et son metaverse), de grandes désillusions aussi (la comète ClubHouse). Retour sur ces événements majeurs qui ont marqué ces douze derniers mois.
Une pénurie de composants qui sclérose la tech
L’effet domino. La crise du coronavirus a été le premier grain de sable dans une machine qui fonctionnait en flux tendu. Les usines chinoises ont pris du retard. En parallèle, les matières premières se sont faites rares, les demandes en puces et composants ont explosé, que ce soit à cause de l’arrivée de nouveaux produits ou technologies (Consoles de dernière génération, 5G, Wi-Fi 6, nouveaux SoC de smartphones, etc.) ou d’une augmentation tendancielle du nombre de semi-conducteurs utilisés. Les voitures sont ainsi des ordinateurs sur roue, nos vélos à assistance électrique embarquent des contrôleurs et la somme d’objets intelligents dont nous nous entourons sollicitent les chaînes de production. À tel point que les géants du domaine, Intel et TSMC notamment, annoncent des plans d’investissements de plus dizaines de milliards de dollars dans les prochaines années pour satisfaire les demandes présentes et à venir.
Au fil de l’année 2021, les industriels ont réussi à éviter le pire et ont poursuivi à peu près normalement la fabrication des composants de pointe. Mais il n’en est pas forcément de même pour des pièces moins complexes, ce qui perturbe la production de nombreux produits, des PlayStation 5 aux iPhone 13. Oui, même Apple, roi de l’optimisation des chaînes de production, a été touché. Les choses devraient s’améliorer pour partie l’année prochaine, nous promettent certains dirigeants de géants, comme Lisa Su, d’AMD, tandis que certains analystes, comme Deloitte, prévoit une année 2022 encore compliquée.
Facebook devient Meta et veut changer d’image
C’était une keynote pas tout à fait comme les autres que celle livrée par Mark Zuckerberg au mois d’octobre, à l’occasion de sa conférence Connect, dédiée à ses technologies d’informatique immersive. Dans un déluge d’effets spéciaux et d’annonces un peu foldingues, Zuck a en effet donné un nouveau point de départ et un nouvel objectif à l’entreprise qu’il a fondée en 2004. Et pas des moindres, puisqu’il s’agit tout simplement d’imaginer l’internet du futur, qui s’appuiera sur la réalité augmentée et virtuelle. « La prochaine plate-forme sera bien plus immersive, un internet incarné ou vous ne vous contenterez plus de regarder l’expérience : vous en ferez partie. Nous appelons cela le metaverse, et il inspirera tous les produits que nous allons concevoir » écrit-il. Pour marquer ce virage, Zuckerberg est allé jusqu’à changer le nom de son entreprise. Fini Facebook inc., place à Meta.
Ces bouleversements n’arrivent évidemment pas par hasard. En se projetant dans le futur et en rebaptisant son entreprise, Zuckerberg cherche surtout à s’extirper des innombrables polémiques qui ont frappé Facebook depuis des années. 2021 a d’ailleurs été paroxysmique de ce point de vue, avec les révélations en série de la lanceuse d’alerte Frances Haugen, qui a livré à la presse une somme considérable de documents internes… peu reluisants pour l’entreprise.
Pegasus, le plus grand scandale d’espionnage de ces dernières années
Une petite bombe en plein coeur de l’été. Fin juillet, Amnesty International et une coalition de 17 médias (dont Le Monde, en France) révèlent l’un des plus gros scandales de surveillance depuis l’affaire Snowden. On apprend que l’entreprise israélienne NSO a commercialisé son puissant logiciel espion pour smartphone Pegasus à des dizaines de gouvernements, pour certains très peu recommandables, afin d’espionner avocats, journalistes, activistes, politiques… Rien qu’en France, de nombreuses personnalités ont été ciblées, d’Edwy Plenel à Emmanuel Macron. Le scandale a eu d’importantes répercussions, notamment pour NSO Group, qui se targuait de ne commercialiser Pegasus qu’à des fins de lutte contre le terrorisme.
À la suite de ces révélations, les États-Unis ont mis la firme sur la liste noire des entreprises qui menacent la sécurité nationale. Apple a enfoncé le clou en attaquant NSO Group en justice.
Windows 11, le coup de peinture de Microsoft
C’était une vraie surprise : fin juin, Microsoft annonçait Windows 11, une mise à jour majeure pour son système d’exploitation, clairement inspirée de Windows 10 X, un système mort-né qui avait été pensé pour contrecarrer Chrome OS.
Windows 11 sera finalement lancé quelques mois plus tard, début octobre. Menu Démarrer recentré, icônes et menus plus modernes… cette nouvelle mouture apporte avant tout une interface revue et corrigée. Mais aussi quelques nouveautés fonctionnelles, comme le support des applications Android et un kiosque applicatif mieux fichu, enfin compatible avec l’ensemble des applications.
Mais un lancement de Windows sans bug, ça n’existe pas ! Il y a d’abord eu cette polémique, toujours vivace, autour des spécifications minimales du nouvel OS, qui écartent de nombreux PC pourtant toujours vaillants, à cause d’un processeur un peu trop ancien. Et puis il y a eu certaines déconvenues, à l’usage, comme cette simplification à outrance de la barre de tâches… Ou le nouveau comportement d’Edge, qui fait tout son possible pour limiter le changement aisé de navigateur.
Apple vs Epic, sideloading… Le début de la guerre des Store
En août 2020, Epic Games, le père de Fortnite, attaquait Apple en justice, jugeant que sa commission de 30% sur les achats dans l’App Store était le fruit d’un monopole. Après un procès très riche en informations sur les coulisses des App Store en mai dernier, la juge Yvonne Gonzalez Rogers a rendu son verdict en septembre. Bien que largement favorable à Apple (9 points sur 10), il n’a satisfait aucun des deux acteurs : Epic comme Apple ont finalement fait appel de la décision. Ce qui pourrait repousser la fin de cette procédure d’au moins cinq ans.
Néanmoins, Apple est dans l’obligation d’ouvrir un peu son écosystème et de permettre aux développeurs de donner un accès direct à leurs utilisateurs, en intégrant des liens vers leurs sites Web dans leurs applications. Une décision que le géant de Cupertino essaie de repousser pour préserver le pré carré qu’est son App Store.
Un modèle par ailleurs menacé par de nombreuses décisions à travers le monde, que ce soit par les autorités japonaises et coréennes, ou encore celles de Russie.
Mais une autre menace pèse sur l’App Store. Le Digital Markets Act, une législation européenne en cours d’étude, pourrait forcer Apple à autoriser la présence d’autres kiosques de téléchargement sur son système d’exploitation mobile. Ces derniers mois, Apple s’est lancé dans une campagne de communication pour tenter de démontrer qu’iOS est plus sûr qu’Android… parce que l’App Store est la seule porte d’entrée pour installer des applications. Craig Federighi, le patron du logiciel chez Apple, a même déclaré que le sideloading est le meilleur ami des cybercriminels. 2021 sera peut-être la dernière année d’un App Store unique dans l’univers d’iOS.
Clubhouse, l’étoile filante copiée par tous
Alors que les confinements et menaces de reconfinements s’enchaînaient une application a littéralement explosé : Clubhouse. Un principe simple, permettre à plusieurs personnes de disserter dans un salon virtuel librement, avec un auditoire composé d’invités venus ici par hasard ou attirés par le sujet.
Comme aux grandes heures des premiers services de Google, la jeune société derrière Clubhouse a joué la carte de l’accès sur invitation seulement, donnant un côté club privé séduisant à ses salons audios. Disponible uniquement sur iOS pendant longtemps, l’application est ensuite arrivée sur Android, mais peut-être un peu tard, car l’engouement s’essoufflait, soit que les utilisateurs potentiels en aient eu assez d’attendre, soit que les contenus n’aient pas été si fulgurants.
Clubhouse a assez vite perdu de son éclat et connu les habituels déboires liés à un respect un peu trop élastique de la vie privée – même les salons privés étaient enregistrés, par exemple, les géants de la tech ont craint de se voir privés d’un nouveau marché naissant, et se sont engagés en force dans la conférence audio. Facebook a ainsi lancé Live Audio Rooms, suivi par LinkedIn, même Reddit y est allé de son clone. Le succès rencontré par ces copies plus ou moins conformes est variable. Néanmoins, Twitter et ses Spaces semblent connaître un certain succès, alors que Clubhouse continue son chemin, à l’ombre des géants qui l’ont copié.
NFT, la tornade venue des cryptomonnaies
C’était le 11 mars : Beeple, artiste numérique célèbre pour ses images déjantées, bousculait le monde de l’art. Son œuvre Everydays : the first 5000 days, un JPEG de 21069 x 21069 pixels, a été vendue aux enchères pour un peu plus de 69 millions de dollars. Une somme incroyable, d’autant que l’acheteur n’a obtenu en échange qu’une collection d’images librement accessible sur le Web et… un jeton cryptographique comme certificat de propriété.
Ces jetons, baptisés NFT (pour non-fungible token ou jeton non fongible), sont brutalement devenus ultra tendance cette année, bien qu’ils existent de façon confidentielle depuis longtemps déjà. Popularisés par les fans de cryptomonnaie, ils sont stockés sur une blockchain, donc uniques et infalsifiables.
Les artistes numériques y ont rapidement vu un moyen de commercialiser leurs œuvres, comme en témoigne l’explosion de plates-formes comme OpenSea. Mais les NFT suscitent aussi désormais l’intérêt d’acteurs du cinéma, de la musique ou du jeu vidéo, qui y voient tous de juteuses opportunités d’avenir. Notamment si le rêve de metaverse (voir plus haut) prend forme, cet univers virtuel qui nous verrait posséder des biens tout aussi virtuels un jour. Mais est-ce vraiment souhaitable ?
M1, M1 Pro, M1 Max : Apple accélère sa transition vers ARM
Apple s’est donné deux ans pour basculer tous ses Mac des processeurs Intel (x86) à ses propres puces Apple Silicon. Nous sommes donc au mitan de cette grande transition. Après l’incroyable M1, décliné aussi bien sur les portables que sur les stations de travail grand public et même dans les iPad Pro, le géant de Cupertino a musclé son discours en cette fin d’année avec les M1 Pro et M1 Max. Des SoC, qui recourent toujours au même concept, où processeur et partie graphique sont réunies et partage la même mémoire vive.
Néanmoins, pour ce second tiers du voyage, Apple a dû muscler son approche : revoir l’architecture des cœurs, leur disposition, ainsi que le nombre de transistors impliqués. Si la fondation du M1 est toujours présente, les deux nouvelles puces sont bien plus performantes.
Mais, en attendant de voir les remplaçants Apple Silicon des Xeon dans les Mac Pro, notamment, il est intéressant de voir qu’Apple valide ici une tendance qui semblait l’attendre, celle des processeurs ARM dans les PC. Il met ainsi au cœur du paysage un double paradigme, celui de l’alternative aux processeurs x86 (Intel et AMD) et celui du triomphe de la performance par Watt, assurant une puissance importante pour une consommation très maîtrisée. De même qu’Apple a initié la révolution smartphone, il pourrait fixer la barre de ce que devront être les ordinateurs de demain. Puissants, discrets et autonomes.
Orange et Stéphane Richard : la fin d’une décennie d’apaisement
Plus de dix ans à la tête d’Orange. Alors que Stéphane Richard envisageait une reconduction de son mandat sous la forme d’une sortie par le haut, en devenant président de la structure, il a finalement été contraint de démissionner après avoir été condamné dans l’affaire de l’arbitrage du Crédit Lyonnais en faveur de Bernard Tapie.
Rattrapé par son passé, il a néanmoins été salué par de nombreux salariés et par la plupart des syndicats du géant des télécoms comme le patron de la reconstruction du dialogue social et de l’apaisement. Il a également accompagné le développement de la fibre, lancé avant son arrivée et commencé à préparer le démantèlement du réseau en cuivre.
Mais certaines voix en interne, notamment certains syndicalistes, pensent qu’il était temps que Stéphane Richard quitte ses fonctions et laisse la place à une politique de reconquête, à une stratégie de développement à l’international plus volontaire. Si Orange s’est développé en Afrique pendant la décennie passée, la valorisation du groupe n’a pas cru tant que cela, limitant ses positions d’investissement. Après l’apaisement nécessaire, Orange a donc besoin de repartir de l’avant, avec peut-être une nouvelle patronne à sa tête. À l’heure où les rumeurs de fusion entre les quatre acteurs de la téléphonie et de l’accès à Internet français reviennent à la surface, le numéro 1 français des télécoms a encore du travail devant lui.
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