Environ 700 élèves ingénieurs de l’ESIEA (Ecole supérieure d’informatique électronique automatique) et d’une petite vingtaine d’autres écoles parisiennes d’ingénieurs étaient rassemblés hier après-midi sur les banquettes de velours rouge du Lido, cabaret des Champs Elysées. Ils répondaient à l’invitation de la BSA (Business Software Alliance), une association d’éditeurs informatiques, désirant les convaincre des conséquences désastreuses du piratage informatique.Selon une enquête réalisée par des étudiants de l’ESIEA pour le compte de la BSA, 79,4 % des élèves d’écoles d’ingénieurs parisiennes se déclarent pirates informatiques, 65,7 % d’entre eux avouant même recopier une dizaine de logiciels par an sur leur ordinateur personnel, en toute illégalité.Plus inquiétant, selon la BSA et les formateurs des écoles d’ingénieurs, la majorité des élèves (35,6 %) estime le piratage nécessaire, voire légitime (22,4 %). Et, même parmi ceux qui trouvent cette pratique juridiquement dangereuse (32,7 %), ils sont encore un bon tiers (31,6 %) à pirater au moins dix logiciels par an.Pendant un peu plus de deux heures, des représentants de la BSA ?” épaulés par un avocat et un lieutenant-colonel de gendarmerie ?” se sont évertués à convaincre un auditoire a priori peu réceptif aux bienfaits des logiciels payants…
35 000 emplois perdus à cause du piratage informatique
Ainsi, Eric Beaurepaire, directeur marketing de Symantec et porte-parole de la BSA, a expliqué aux élèves qu’environ “35 000 emplois n’étaient pas créés chaque année par les éditeurs informatiques à cause des pertes de recettes dues au piratage informatique”.Sur le plan juridique, un avocat a détaillé les sanctions pénales auxquelles s’exposaient les pirates informatiques : une peine maximale de deux ans de prison et environ 152 000 euros d’amende, selon le droit pénal. Sans parler des éventuels dommages et intérêts à verser à l’éditeur victime, dans le cadre de poursuites de droit civil.Enfin, le lieutenant-colonel Patrice Bayard, chef de l’animation judiciaire à la Direction générale de la gendarmerie, a estimé que la contrefaçon logicielle, pratiquée de façon industrielle, avait des racines mafieuses, servant au blanchiment d’argent. Mais ses services poursuivent aussi les contrefacteurs qui proposent plusieurs centaines de logiciels en téléchargement sur Internet.Sensibles aux arguments des intervenants, les élèves ingénieurs n’ont pas semblé pour autant prêts à renoncer au piratage logiciel. Selon l’enquête réalisée par l’ESIEA, plus de 54 % des élèves ingénieurs font des copies illicites de logiciels, du fait des prix trop élevés pratiqués par les éditeurs.
Première motivation des pirates : le prix élevé des logiciels
” Chaque élève a besoin d’au moins huit logiciels différents sur son PC pour se former, estime Nadine, étudiante à l’INT (Institut national des télécommunications). ” Vu le prix d’achat des machines, nous n’avons pas assez d’argent pour pouvoir les payer “, ajoute-t-elle, chaudement applaudie par l’assemblée. Une vision d’ailleurs partagée par le directeur adjoint de l’INT, appelant les éditeurs à ” prendre en compte les budgets restreints des jeunes étudiants dans leurs politiques de prix “.L’argument a cependant été réfuté par deux représentants des éditeurs Adobe et Microsoft : “Les PC achetés par les étudiants coûtent en moyenne 15 000 francs. Le prix des logiciels ne représente qu’environ 10 % de cette somme. Il est tout à fait possible d’acheter un PC un peu moins cher et d’en payer les logiciels”, a remarqué Bertrand Salord, responsable antipiratage chez Adobe. Et d’ajouter : “Des versions de nos produits sont spécialement conçues pour les étudiants, avec des rabais de prix atteignant les 70 %.”“ Plus les logiciels sont piratés, plus ils sont chers “, a renchéri Laurent Signoret, responsable marketing du département Education et recherche, de Microsoft. Les logiciels américains sont 30 % moins chers qu’en France parce que les ventes en volume outre-Atlantique sont plus importantes, mais aussi parce que le piratage y est moins répandu “, a-t-il conclu.Entre deux verres de Coca-cola et de jus dorange, élèves ingénieurs et éditeurs auront pu mesurer le fossé culturel qui les sépare.
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