“L ‘Europe est-elle prête ? “, se demande Jacques Régniez, dans L’Europe face aux défis de la nouvelle économie. Derrière cette question, il y a l’idée que chaque innovation majeure hiérarchise les régions mondiales. Certains pays en tirent un surcroît de croissance, d’autres passent à côté. De même que la révolution industrielle ne fut pas générale, la révolution numérique ne se fera pas partout. Pour y accéder, il faudra remplir certaines conditions.
La faiblesse du livre, c’est de considérer que l’inégalité face à la nouvelle économie est une fatalité, voire une nécessité. Sa force, c’est une analyse pertinente de l’évolution économique de l’Europe depuis 50 ans, qui en montre les atouts à l’heure d’internet. Le principal de ces atouts est le fruit du hasard politique. Pour des raisons historiques, la construction européenne ne s’est pas faite par l’émergence d’un État et d’une bureaucratie nombreuse, mais par la monnaie et la défense de la concurrence.
Contraints à l’entente par la guerre froide, mais incapables de s’entendre du fait des guerres chaudes antérieures, les Européens ont mutualisé des éléments, qu’ils jugeaient non essentiels, de l’action publique : furent mis en commun l’agriculture davantage que la défense et la monnaie plus que le budget. Résultat, l’Europe a créé un moyen reconnu d’échange ?” l’euro ?” sans mettre en place un État budgétivore. Or, la nouvelle économie suppose décentralisation, liberté d’entreprendre, circulation rapide de l’information. La fiscalité peut l’étouffer, quand une devise solide peut l’étoffer. L’Europe a la chance de ne pas être un État. Qu’elle la garde . Et le handicap de subir les États nationaux keynésiens, qu’elle le réduise.
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