Annoncé officiellement dans la nuit du 29 au 30 mai, le rachat de Beats par Apple a généré beaucoup d’incompréhension dans l’univers high-tech. Pourquoi Apple rachèterait pour trois milliards de dollars un fournisseur d’accessoires de musique et d’un service de streaming, alors que la firme dispose – à priori – de toutes les compétences en interne pour réussir sur ces deux terrains de jeu ? C’est avant tout une question d’opportunité.
Rattraper le retard sur Spotify et consorts
Depuis quelques années, Apple n’a cessé de voir le téléchargement payant de musique se tasser au profit du streaming musical payant, modèle défendu par Spotify, Deezer, Pandora et consorts. Face à ce changement dans les habitudes de consommation, la firme californienne n’avait, jusqu’à présent, aucune offre à proposer. En septembre 2013, elle avait certes lancé le service iTunes Radio, mais celui-ci ne proposait pas un accès illimité à un catalogue, mais seulement à des playlists, avec ou sans publicité selon que l’on est un abonné du service prédictif iTunes Match. Un entre-deux qui, pour certains, n’est pas vraiment convaincant.
MacWorld – qui a testé ce service pas encore disponible en France – a estimé que le nombre et la qualité des playlists n’étaient pas à la hauteur des attentes et que l’intégration avec iTunes Match était plutôt bancale. En mettant la main sur le Beats Music, Apple rattrape pleinement son retard sur ce marché et peut de nouveau montrer à ses investisseurs des graphiques avec des courbes en pleine croissance tout en leur disant que l’avenir était assuré.
Certes, comparé aux 40 millions d’utilisateurs actifs de Spotify (dont 10 millions d’abonnés payants), les 250.000 abonnés de Beats Music sont une goutte d’eau dans l’océan, mais il faut voir que le service n’a été lancé par le rappeur Dr. Dre et le producteur Jimmy Iovine qu’il y a trois mois. Il y a donc du potentiel qu’Apple compte bien exploiter.
Une offre de streaming innovante
Avec le rachat de Beats, Apple estime non seulement avoir rattrapé son retard dans le marché du streaming, mais aussi avoir pris une avance au niveau de l’innovation. Interrogé par le site Re/Code, Tim Cook estime que Beats Music « est le premier service d’abonnement [musical] qui fonctionne vraiment », car il marie technologie numérique avec curation professionnelle. C’est en effet l’argument commercial que met en avant ce service sur son site web.
Ainsi, Beats Music dispose d’une équipe éditoriale qui totalise « plus de 300 années d’expérience » en écoute musical. Son rôle est de créer des playlists et de proposer des recommandations en fonction des goûts de chacun. L’un des slogans de Beats Music est d’ailleurs : « Music for humans, by humans » (« La musique pour les humains, par les humains »). C’est une approche intéressante dans la mesure où la musique est, par définition, une histoire de goût et d’émotion, difficile à cataloguer dans des cases créées par des algorithmes.
Comment cette découverte et cette personnalisation est-elle présentée concrètement ? Chez Beats Music, on peut suivre les conseils d’un curateur, comme on suivrait ceux d’un éditorialiste de magazine. Le service propose également des morceaux par genre et par artistes, ce qui est classique, mais aussi par activités : conduite en voiture, dîner, apéro, rêvasser… Enfin, il propose également des playlists en fonction d’une situation : le lieu où l’on se trouve, l’humeur qu’on ressent, les personnes avec qui on est, le genre que l’on a envie d’écouter. Reste à savoir si, dans la pratique, on tombe réellement sur la bonne chanson au bon moment. Pour l’instant, le service n’est disponible qu’aux Etats-Unis.
Des casques d’écoute très rentables
Apple met également la main sur les écouteurs très design de Beats Electronics. A long terme, cette activité est certainement moins intéressante que Beats Music, mais en attendant elle a un gros avantage : c’est une vraie cash-machine. Selon TechCrunch, les ventes annuelles d’écouteurs ont dépassé les 500 millions de dollars, avec un faible budget marketing : les fondateurs ont avant tout misé sur le placement de produits, en s’appuyant sur des stars et des célébrités. Simple mais efficace.
Au sein de la galaxie Apple, les écouteurs peuvent cracher encore plus. L’activité de Beats Electronics restera autonome, mais pourra profiter des nombreux contacts d’Apple en Chine pour optimiser l’approvisionnement et l’assemblage de ces accessoires. Le design, jusqu’alors réalisé par la société Ammunition, sera par ailleurs repris en main par Apple directement. Ce qui représente, là encore, un gain en productivité. Et à priori sans perte de qualité, étant donné les compétences des équipes de design d’Apple.
A lire aussi :
– Apple rachète Beats pour 3 milliards de dollars
Sources :
MacWorld, TechCrunch, Note de blog d’Ammunition,
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