C’est a priori la fin d’un feuilleton qui dure depuis des années. Après l’avoir acceptée sur le principe en 2005, puis refusée en 2006 et en 2007, l’Icann, le gestionnaire des noms de domaine, vient finalement de donner son accord pour la création d’un nom de domaine en .xxx, dédié aux contenus pour adultes, et placé au même niveau TLD (top-level domain) que les .com et autres .fr.
Le comité de direction de l’Icann en a fait l’annonce à l’occasion de son congrès à San Francisco. C’est une grande victoire pour ICM Registry, qui est à l’origine de ce projet et sera en charge de commercialiser le .xxx. La société aurait déjà dépensé des millions de dollars en promotion du nouveau nom de domaine selon le site The Register. La somme atteindrait 12 millions de dollars, selon la Free Speech Coalition (FSC), qui représente l’industrie des contenus pour adultes aux Etats-Unis.
Le .xxx vise, selon son promoteur, à donner une identité claire aux sites à contenus pornographiques (ce qui les rend plus faciles à détecter pour les outils de contrôle parental) respectant certaines règles (« best business practices »).
Pour obtenir un nom de domaine en .xxx., il leur faudra respecter un ensemble de règles édictées par l’International Foundation for Online Responsibility (Iffor), un organisme indépendant d’ICM : ne pas viser le public jeune, refuser le spam et les logiciels malveillants, respecter la propriété intellectuelle, proscrire la pédopornographie, assurer la protection des données personnelles et proposer un mode de paiement sécurisé… Sur son site, ICM Registry indique avoir déjà enregistré près de 300 000 réservations. On ne sait pas exactement quand le .xxx commencera sa carrière.
« Une connerie »
Ce nom de domaine a connu une naissance difficile en raison de l’opposition de certains groupes de pression, religieux notamment, qui voyaient en lui une véritable boîte de Pandore faisant proliférer les contenus pornographiques sur la Toile. Le GAC (Government Advisory Commitee), comité consultatif de l’Icann où siègent les représentants des gouvernements, était opposé à la création du .xxx. Mais le comité de direction a décidé de passer outre, une première…
Une première qui n’a guère plu à la FSC, très opposée elle aussi à cette extension. L’organisation a fustigé ce projet, qualifié de « bullshit » (une « connerie »), dans plusieurs billets, estimant que ce nom de domaine représentait une « ghettoïsation » et une menace pour le secteur du X en encourageant la censure et le blocage. La FSC critique aussi la pseudo-indépendance de l’Iffor, les mensonges d’ICM (qui prétend avoir le soutien des professionnels) ou son appât du gain. L’organisme avait invité à manifester lors du congrès de l’Icann et appelait au boycott du nom de domaine.
« ICM a besoin du secteur pour adultes, qui [fera l’acquisition de noms de domaine en] .xxx. La société a sans cesse répété que son modèle économique reposait sur 300 à 500 000 noms enregistrés. Après cinq années de marketing actif au niveau des préréservations, ICM n’en compte que 200 000 [autour de 300 000, selon ICM], et, rappelons-le, elles comprennent les enregistrements des registries qui espèrent en revendre aux professionnels. Quand il s’agira de payer, ce nombre va baisser. Combiné au boycott, le .xxx pourrait chuter avant la fin de sa première année », écrivait Diane Fuke, une des responsables de la FSC, avant le congrès de l’Icann.
La FSC envisage désormais « toutes les options » pour mettre à mal le .xxx. Elle dit vouloir donner davantage de précisions dans les jours à venir. Sur son site, elle expliquait récemment vouloir déposer une réclamation auprès de l’Icann, voire déposer une plainte en justice. Le feuilleton du .xxx n’est donc peut-être pas complètement terminé…
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