XML, HTML… Les principales technologies du web sont passées dans les mains des groupes de travail du W3C. Reste que, sur les quelque cinq cents membres de l’organisation, seule une dizaine d’entreprises participe activement à la définition des spécifications des standards de l’infrastructure du web. “S’inscrire au W3C n’a d’intérêt que si l’on contribue activement”, avertit Laurent Kott, délégué général au transfert technologique à l’Inria (Institut national de recherche en informatique et en automatique). Ce dernier étant, avec le MIT (Massachusetts Institute of Technology) et l’université de Keio au Japon, l’un des piliers du consortium créé en 1994. Et d’ajouter : “Les entreprises doivent comprendre que leurs besoins spécifiques seront davantage pris en compte si elles font partie du consortium. Cela doit être un intérêt stratégique.”En France, cela est loin d’être le cas. Ainsi le Cigref estime que la participation aux travaux de normalisation du W3C n’est pas une de ses priorités. Le club regroupant les grandes entreprises françaises semble avoir du mal à relier les activités techniques du W3C avec les préoccupationn des entreprises qu’il représente. Quelques sociétés hexagonales ont pourtant réussi. France Télécom, à l’exemple d’autres grands opérateurs, a bien compris l’intérêt qu’il pouvait avoir à participer à des groupes de normalisation – que ce soit pour internet ou pour l’UMTS -, ou encore à la définition du protocole WAP. Même EDF ne s’est pas privé de rejoindre le consortium. Le fournisseur d’énergie a, par exemple, soumis au W3C, en septembre 1997, une proposition de spécification concernant la migration de documents de HTML 3. 2 à HTML 4. 0 + CSS (feuilles de style en cascade). Mais il est vrai que le droit d’entrée – entre 5 000 et 50 000 dollars par an – ne facilite pas l’arrivée en masse des utilisateurs ou des associations. “Faire payer l’adhésion permet de nous donner une plus grande cohésion et d’inciter les entreprises membres à s’engager dans le processus. Cela permet, en outre, de payer le travail de notre soixantaine de permanents”, justifie Vincent Quint, directeur adjoint du W3C. Pour les non-membres, il existe des moyens de suivre et d’influencer les spécifications tout au long de leur élaboration. Certes, le lancement d’une nouvelle ” activité ” dépend exclusivement de l’impulsion de ses membres ou de ses permanents. Mais, une fois celle-ci démarrée, l’avancement du travail sera publié tous les trois mois sur le site du consortium. Que ce soit pour les ” brouillons de travail “, les ” derniers appels à remarque ” ou les ” recommandations proposées “, le public est appelé à réagir. Mais la prise en compte de ses remarques dépendra, bien évidemment, du bon vouloir des chercheurs participant au groupe de travail. Il existe quand même un lieu ouvert à tous au sein du W3C. Mais il est très spécifique. La WAI (Web Accessibility Initiative) a été conçue pour “revoir les technologies développées au W3C, afin qu’elles permettent de produire du contenu accessible aux handicapés : accès sans clavier, sans souris, sans écran”, détaille Daniel Dardailler, membre de l’Inria et directeur adjoint du W3C pour l’Europe.Il est également possible de s’engager dans l’un des autres organismes de normalisation. Ces derniers – l’OMG (Object Management Group), l’IETF (Internet Engineering Task Force) ou l’Oasis (Organization for the Advancement of Structured Information Standards), par exemple – n’ont pas vraiment les mêmes objectifs que le consortium. “Notre travail complète celui des autres organismes de normalisation, déclare Laura Walker, directrice exécutive de l’Oasis. Le W3C s’occupe de l’architecture du web, l’OMG se focalise en premier lieu sur les middlewares et les échanges entre entreprises, et l’Oasis facilite le développement de spécifications aux standards de l’industrie pour l’interopérabilité – en général, au sein d’une communauté.” Pour éviter tout problème, les différentes associations nouent des contacts solides. Ainsi, l’Oasis est membre du W3C. “Nous sommes en relation avec l’ISO (International Organization for Standardization), assure Vincent Quint. Cet organisme a développé une version de HTML, ISO HTML, qui a été définie en collaboration avec le W3C. En sus, les technologies XML dérivent des travaux de l’ISO sur le SGML.” Pourtant, au fil du temps, leurs travaux ont tendance à se recouper de plus en plus. Ainsi, si le W3C est à l’origine de XML, l’Oasis tente d’entrer sur ce terrain en décidant d’inclure dans son agenda technique le développement de standards XML pour les élections, la sécurité et les transactions électroniques. Peine perdue. Le W3C reste au centre de toutes les attentions. “Être présent dans des instances comme l’ISO, c’est très intéressant. Mais le W3C est l’endroit où tout se passe”, confirme Claude Chiaramonti, éditeur de la lettre mensuelle gratuite VendrEDI et également membre du comité d’orientation stratégique sur les nouvelles technologies au sein de l’ISO.Sans contrôle des utilisateurs, les organismes de normalisation non gouvernementaux se sont organisés pour ne pas dépendre des spécifications d’un seul éditeur. En effet, si une société propose une activité, le W3C fera appel à tous les membres pour constituer le groupe de travail, et ce sans faire de sélection, ce qui peut allonger le processus de décision. “Certains groupes prennent plus de temps que prévu parce qu’ils doivent atteindre un consensus. Or, quand vous avez Sun, Microsoft et IBM dans le même groupe, celui-ci n’est pas immédiat”, résume Vincent Quint. Pour faire pression sur les directions technologiques prises par le W3C, les fournisseurs ont plus d’un tour dans leur sac. “Dans la guerre des navigateurs, les éditeurs anticipaient les travaux du groupe de travail dans le but d’influencer le cours des travaux. Mais cela ne se voit plus”, affirme le directeur adjoint du consortium. De toutes ces discussions ressortent des recommandations consensuelles, parfois contestées. On peut ainsi lire, sur le site XMLhack, que James Clark, qui a mené les spécifications XML 1. 0 à terme, aurait déclaré que le résultat du travail sur XML Schema était presque un désastre. Avec l’importance croissante prise par le W3C, ces recommandations gagnent du poids. “Nous ne sommes pas un organisme de normalisation au sens strict du terme”, se défend Vincent Quint. Avant d’ajouter : “Mais il est vrai que ce que nous produisons ressemble à des standards. Et comme ils reçoivent l’assentiment de toute une industrie, ils sont en général mis en ?”uvre.” D’autant que le W3C fait tout ce qu’il faut pour être reconnu. “Le groupe de travail sur la WAI sert aussi à promouvoir les directives émises, à l’aide de brochures. Nous intervenons également auprès de la Commission européenne, des gouvernements américain et canadien”, atteste Daniel Dardailler.
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