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Le web britannique, royaume des bookmakers

En Grande-Bretagne, pays de joueurs, parier en ligne est légal et le gouvernement va défiscaliser les gains. Autant dire que les amateurs se connectent de loin.

Vendredi, 17 h 30, au café internet Easy Everything sur High Street Kensington, au centre de Lon-dres, Martha s’installe devant son écran, “ Je viens ici à la sortie du boulot pour parier sur les événements sportifs du week-end, surtout le tennis, j’adore ça “, lance cette femme, la quarantaine, employée de banque et imbattable en résultats sportifs. Pourquoi un café internet ? Et pourquoi ne pas jouer dans la boutique Ladbrokes, à quelques mètres de là ? “ Ici, c’est anonyme. Là-bas, il y a toute une foule de vieux parieurs qui me mettent mal à l’aise“, avoue-t-elle. Bingo.

Sport national

Des centaines de bookmakers ont investi le net en Grande-Bretagne, visant de nouvelles catégories sociales, un public plus jeune et souvent féminin, le profil craché de Martha. Dans un pays où parier est un sport national, l’arrivée du net a représenté un pactole pour les plus malins. Les paris en ligne pèsent près d’1 milliard de livres (1,5 milliard d’euros environ) de l’autre côté de la Manche et leur expansion va continuer, à en croire les prévisions de la banque Merrill Lynch. Selon elle, le secteur pourrait peser, au niveau mondial, près de 198 milliards d’euros dans les 15 prochaines années. Selon Ladbrokes, l’industrie du pari au Royaume-Uni gère aujourd’hui quelque 12 milliards d’euros, dont plus de 600 millions reviennent pour le moment au jeu en ligne. En attendant plus…” Internet a permis d’attirer une nouvelle clientèle qui ne pariait pas forcément auparavant “, souligne Rebeca Ulph, du groupe d’études Forrester Research.

Privilégié

La Grande-Bretagne est le pays privilégié d’Europe avec une des législations les plus flexibles. Ici, les paris sont autorisés sur le net, ce qui n’est pas le cas aux États-Unis“, rappelle-t-elle. Au 10 Downing Street, la résidence officielle des Premiers ministres, on a d’ailleurs très bien perçu l’importance de cette industrie. Gordon Brown, le ministre de l’Économie et des Finances, a annoncé lors de son dernier budget, en mars, la suppression de la taxe sur les parieurs, vieille de 33 ans. Une révolution : à partir du 6 octobre prochain, tous les paris réalisés au Royaume-Uni seront défiscalisés pour les joueurs. Un tel geste devrait encore dynamiser l’industrie du jeu, selon les experts.”Cette taxe avait poussé l’industrie du pari à installer ses sites web et ses centres d’appels loin du gazon d’Ascot ou de Wimbledon, dans les paradis fiscaux de Gibraltar, Malte ou Antigua“, souligne un analyste de LB Panmure. Sa suppression devrait inciter les sociétés à rapatrier leurs activités en Grande-Bretagne, mais elles ne fermeront pas pour autant leur site internet. Seule différence, “ la compétition sera plus rude, et les bookmakers devront rivaliser d’ingéniosité pour attirer le chaland en dopant leur politique marketing“, ajoute l’analyste.

850 sites de jeux d’argent

Pour l’heure, on compte plus de 850 sites de jeu, de casino et de paris sur internet. Easy Bets, UK betting, Sporting Odds, Sporting Bet, Flutter, ou Easy Odds pour les plus petits, Ladbrokes (groupe Hilton), William Hill (Nomura) et Coral (Deutsche Bank) pour les plus gros. Sportingbet.com par exemple a P P été le premier site à offrir des paris détaxés sur internet et à proposer aux joueurs d’ouvrir des comptes en ligne. Aujourd’hui, le site, introduit début 2001 au Second Marché à Londres, revendique 59 000 clients dans plus de 104 pays et traite plus de 24 devises différentes.

L’âge de la reine mère

Sur quoi parient les surfeurs du net ? À peu près n’importe quoi. En Grande-Bretagne, il est possible de jouer sur quasiment tout ce qui vous passe par la tête. Le gros des jeux est lié aux sports, notamment aux courses hippiques et au football. Mais les Britanniques sont prêts à prendre des paris sur tout, de l’âge auquel la reine mère s’éteindra au nom du prochain leader du parti conservateur, en passant par le vainqueur de la nouvelle série télé, Big Brother. Le site Flutter.com s’est ainsi spécialisé dans les paris individuels, et l’on peut jouer avec un ami, un conjoint ou ses parents sur des affaires de famille. Anecdote : l’épidémie de fièvre aphteuse cet hiver a obligé le gouvernement à annuler la plupart des grandes courses hippiques dans le pays. Une véritable catastrophe quand on sait que les courses de chevaux représentent 80 % des paris placés en Grande-Bretagne. Loin de céder à la panique, William Hill, un des leaders du secteur, proposait comme alternative de miser sur des courses de… poissons rouges, tandis que le bookmaker Blue Square ouvrait des paris sur des courses d’escargots et de hamsters ! “Cela n’a pas dû rapporter beaucoup, mais c’était un joli coup marketing “, estime Rebeca Ulph.

Parier sur la survie du bookmaker

Reste un problème : jouer sur internet n’est pas toujours très sûr. “ Les bookmakers en ligne peuvent être installés n’importe où dans le monde et disparaître du jour au lendemain avec la caisse“, prévient un responsable d’un des principaux acteurs du marché. À terme, les joueurs se reporteront sur les marques les plus connues, affirme-t-il, suivant un réflexe classique dans le commerce en ligne. Les joueurs qui ouvrent des comptes en ligne prennent le risque d’une faillite du site, comme celle de Betachance.com, il y a un an. Les abonnés de Firstake.com, eux, ont été plus chanceux : avec une ardoise de plus de 300 000 euros sur ses 5 000 abonnés, la société a été rachetée de justesse par Sportingbet.com.

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