« Contrôler sans entraver le développement des enchères sur Internet ». C’est la déclaration d’intention des sénateurs UMP Philippe Marini et Yann Gaillard, auteurs d’une proposition de loi sur les ventes aux enchères, examinée aujourd’hui mercredi 28 octobre au Sénat.
Le texte est en fait l’adaptation d’une directive européenne et n’est pas exclusivement dédié à Internet. Mais l’article 5 aborde explicitement le sujet. Du propre aveu des deux sénateurs, dans l’exposé des motifs disponible sur le site du Sénat, cette initiative répond à une préoccupation du Conseil des ventes volontaires, l’autorité de régulation du secteur en France, inquiet des « dangers de ces enchères sauvages depuis un certain nombre d’années ».
Résultat : la loi compte soumettre les sites Internet qui se revendiquent explicitement comme « sites d’enchères » aux mêmes obligations que les enchères réelles et au contrôle du Conseil des ventes. L’enjeu est surtout de mieux encadrer la vente aux enchères d’œuvres d’art sur Internet, source de polémique depuis des années. Et quand on dit « sur Internet », comprenez surtout « sur eBay ».
Des œuvres d’art sur les sites de courtage
Sur ce genre de plate-forme, la loi demande plus de transparence et plus d’informations à destination de l’acheteur, dans la mesure où le site, lui, n’est pas détenteur du bien vendu, ne peut rien en dire et n’est même pas capable d’en proposer une estimation.
Le vendeur, « s’il n’est pas professionnel, […] doit établir sous sa responsabilité une description du bien mis en vente publique de manière précise et loyale, en évitant toute formulation de nature à causer une méprise dans l’esprit du public en ce qui concerne la consistance ou l’origine du bien, et, en outre, s’il est professionnel, de manière à refléter les connaissances disponibles sur l’objet au moment de la vente ».
« Quand on regarde le texte, on a l’impression que cela ne change pas grand-chose, à part une obligation d’information à destination des clients d’eBay, explique Cédric Manara, professeur de droit à l’Edhec Business School. Sauf que, quand même, le texte modifie la description du business model des plates-formes d’enchères ».
Changement de communication pour eBay ?
Car la loi dit que pour éviter d’être considéré comme un site d’enchères et d’être soumis au contrôle du Conseil des ventes, un site Internet ne doit pas procéder à l’adjudication de la vente, ne doit pas intervenir dans le processus ni dans la description du bien. Or, note Cédric Manara « le CVV prétend depuis quelques années qu’eBay fait de l’adjudication dans les faits. eBay suggérant des descriptions de biens [en fournissant mots-clefs et catégories de biens, NDLR], il devrait peut-être renoncer à le faire, sauf à tomber plus facilement sous le coup de la loi ».
Pour Benoît Tabaka, responsable des affaires juridiques chez PriceMinister, le texte risque surtout de poser des problèmes en termes de communication à l’intention des internautes. « La loi peut créer une difficulté pour eBay qui devrait casser son image de site d’enchères ou de vente aux enchères dans l’esprit du grand public. Surtout si c’est pour remplacer cela par un concept flou, celui de courtier ».
En revanche, il devient possible sans ambiguïté de vendre sur eBay, ou d’autres sites de courtage, des biens culturels et des œuvres d’art. Jusque-là, qu’il s’agisse de sites d’enchères ou de site de courtage, ce type de produit nécessitait un contrôle du Conseil des ventes.
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