Les éditeurs de logiciels ont une vie boursière relativement douce. Les titres emblématiques du secteur ont, sauf cas particuliers, assez confortablement vécu la crise financière de ces derniers mois. Certes, la résistance, au fil du krach, s’est amenuisée, et les attentats du 11 septembre ont eu, là aussi, leurs effets.Mais l’érosion des Oracle, Dassault Systèmes et autres Veritas a été moins sévère que celle qui a dévasté les télécoms ou les valeurs internet. De deux à trois fois moindre, en moyenne.Certaines valeurs phares, telles SAP, Siebel, Adobe, figurent parmi les rares TMT à avoir dégagé une plus-value boursière en 2001, tout comme le numéro 1 du secteur, Microsoft, dont le titre a progressé de 50 % en 2001. Pourquoi cette qualité défensive dans un métier à forte connotation technologique et situé au c?”ur de la dépression économique dans les échanges B to B ?
Une bonne année 2002
D’abord, le domaine du soft a été jusqu’ici plutôt épargné par les désinvestissements des entreprises. Les logiciels, après les taux de croissance de 25 à 30 % des années fastes, ont réussi à maintenir un taux positif l’année dernière. Et 2002, malgré une visibilité moindre, ne devrait pas être mauvaise.Selon l’étude publiée début février par Goldman Sachs, le software figure en bonne place dans les prévisions de dépenses des directeurs informatiques des grands comptes aux États-Unis. Ensuite, le caractère récurrent des revenus des éditeurs, soutenu par la traditionnelle mise à jour des logiciels, lui confère un apect anticrise.Cette qualité reste toutefois variable : de moins de 10 % chez Business Objects en passant par 49 % chez Dassault Systèmes, la part récurrente du chiffre d’affaires est majoritaire chez Linedata (65 %) et surtout chez GL Trade (80 %), selon Aurel Leven, qui vient de dresser un état des lieux complet du secteur.Enfin, le cours des valeurs du software a tout simplement été porté par les bons résultats de ses représentants. Bons résultats assortis d’une communication judicieuse, axée sur les points forts de ses acteurs.L’américain Siebel, dont le chiffre d’affaires a chuté de 17 % au dernier trimestre, est parvenu à fixer le regard des opérateurs sur son profit net ?” coquet il est vrai ?” à plus de 282 millions d’euros (1,8 milliard de francs). SAP a mis l’accent sur son dynamisme commercial, annihilant les craintes malgré la petite déception objective (CA en hausse de 17 %, contre 20 % prévus en début d’exercice).Les deux grands Français du secteur, Business Objects et Dassault Systèmes, ont aussi la faveur des gérants. Le leader de la business intelligence a produit des résultats records. La filiale du groupe Dassault, leader mondial de la CFAO (conception et fabrication assistées par ordinateur) vient de publier des résultats flatteurs au quatrième trimestre, prouvant “une activité soutenue malgré le marasme économique, confirmant ainsi la qualité de ses fondamentaux”, explique Cyril Tézenas du Montcel, analyste du secteur chez Global Equities.SAP, Dassault, Siebel, Business Objects… toujours les mêmes bons élèves ? À l’instar du reste de la cote, le redressement opéré chez les valeurs logicielles depuis les plus bas de septembre s’est révélé sélectif. “Le marché veut privilégier les gros éditeurs internationaux, leaders sur leurs marchés qui, quelle que soit la durée de la crise, en sortiront renforcés”, résume Guillaume Anselin, spécialiste du secteur chez Aurel Leven, signataire de l’étude citée plus haut. Focalisés sur ces rares titres, les investisseurs ont par ailleurs délaissé le tout-venant des éditeurs.
Les privilégiés de la cote
La convergence des achats sur une poignée de valeurs finit surtout par réattribuer à ces titres une cherté qui détonne dans le contexte boursier du moment. Les valorisations du software restent élevées, si on les compare à celles d’autres métiers de l’univers technologique.En mettant de côté Microsoft avec son PER (Price Earning Ratio, rapport cours de l’action sur bénéfices) de 55, valeur qui n’est pas considérée comme un “comparable”, Global Equities situe le PER 2002 moyen du secteur à 48, de 32 pour Oracle à 58 pour Siebel. Les calculs d’Aurel Leven attribuent un PER de 40 à Dassault Systèmes, 53 à Business Objects. Des hauteurs d’autant plus préoccupantes que le durcissement de la compétition devrait entraîner une contraction des marges cette année.Si le rebond de la conjoncture se fait attendre, le software pourrait connaître des séances plus heurtées. Sauf si un autre facteur de soutien prend le relais : la restructuration d’un marché encore émietté.“La concentration du secteur va s’accélérer en 2002”, parie-t-on chez Aurel Leven. Parmi les prédateurs, sans surprise, Oracle, Business Objects et SAP. Le groupe allemand aurait, dit-on, une cagnotte d’1,1 milliard d’euros à disposition en 2002.
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