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Le retour des ” ex ” passe par la toile

Aux États-Unis, cabinets de conseil et sociétés high-tech prennent soin des sites d’anciens salariés. Histoire de faciliter un éventuel retour ou choyer de potentiels apporteurs d’affaires.

Passé les plans de licenciements d’entreprises comme Enron, Netscape ou Procter & Gamble, très vite, des anciens ont eu l’idée de créer leur site web, histoire de maintenir le contact, d’échanger des tuyaux sur d’éventuelles embauches et, pourquoi pas, des potins sur la société qu’ils venaient de quitter. Mais ces derniers temps, le cercle des “ex” s’est élargi bien au-delà des seuls licenciés. Les directions des entreprises elles-mêmes financent les sites de leurs anciens salariés, persuadées qu’elles ont beaucoup à y gagner.

Opération réembauche

Select Minds, une jeune pousse new-yorkaise, fondée en 1999 par des consultants, est au c?”ur de cette nouvelle vague. L’entreprise, qui se charge de créer et d’assurer l’entretien des sites d’anciens, revendique aujourd’hui 18 entreprises clientes, soit un peu plus de la moitié de l’ensemble des sites américains dédiés au maintien du contact avec les “ex”. “Au début, nous pensions faire de ces sites un outil de recrutement”, explique Cem Sertoglu, le PDG de Select Minds. Car lorsque l’on reprend un habitué de la maison, pas besoin d’avoir recours aux coûteux services d’un cabinet de recrutement, et les frais d’adaptation à la culture d’entreprise se réduisent à la portion congrue.

On ne part qu’une fois

Selon la Society for Human Resource Management, la réembauche coûte moitié moins cher que le recrutement initial. Et le revenant se révèle plus fidèle que le nouveau salarié : en moyenne, il reste deux fois plus longtemps. De quoi attirer dans le giron des sites d’“ex” de nombreux cabinets de consultants (Tels Ernst & Young, Deloitte Consulting, Bain, Oliver Wyman, etc.), des entreprises technologiques (Sapient, Agilent, etc.) ou bien encore des cabinets juridiques, dont les besoins humains sont devenus très complexes. Ainsi, explique Claudia Freeman, la directrice marketing de Cad-Walader Wickersham and Taft, “nous passons des années à former nos associés. Si les bons éléments veulent revenir ou nous signaler d’éventuelles recrues, c’est tout à fait appréciable”. Pour ce faire, le cabinet d’avocats a plusieurs fois tenté d’actualiser son annuaire des anciens… en vain. Avant que la maison ne s’adresse, en septembre dernier, à Select Minds. Une relance par lettre a été envoyée à tous les “ex” du cabinet. 20 % des intéressés ont répondu présent. “Nous avons dorénavant une banque de données à jour”, se félicite Claudia Freeman. Et les avocats entretiennent la liaison virtuelle en proposant aux amis de la maison une newsletter et des offres d’emploi. Dans le courant de l’année, ils recevront même une invitation pour se retrouver à un cocktail organisé par Cad-Walader Wickersham and Taft. Chez Ernst & Young, on a d’ores et déjà pu mesurer l’efficacité de l’outil. L’an dernier, le cabinet de conseil a embauché 566 personnes, parmi lesquelles 144 anciens. L’entretien d’un site internet ?” facturé 75 000 à 500 000 dollars (environ 85 000 à 568 000 euros) par an, par Select Minds ?” peut donc se révéler utile.Mais le recrutement n’est pas le seul objectif recherché. “Nous voulons créer une communauté de vieux amis, en liaison avec une petite centaine d’anciens, ajoute Matthew Cunningham, directeur de la société d’expertise en services financiers Oliver, Wyman and Company. Les partants s’en vont le plus souvent travailler dans les banques ou les compagnies d’assurance. Ils nous connaissent, peuvent parler de nous, devenir nos avocats et générer des affaires pour notre société.”

Permis de conseiller

Le patron de Select Minds assure qu’un tiers des anciens collaborateurs de cabinets de consultants occupent des positions clés. Des postes qui leur permettent souvent d’influencer la conclusion d’un contrat avec leur précédent employeur. Mieux vaut donc caresser ces “vieux amis” dans le sens du poil.À l’avenir, Matthew Cunningham voudrait même transformer son réseau d’“ex” en “conseil de sages”. “Ces anciens sont de haut calibre, nous respectons leur opinion. Nous voudrions tester auprès d’eux nos idées nouvelles pour voir ce qu’ils en pensent”, explique-t-il. Seuls exclus du cercle des amis : les traîtres passés à la concurrence directe.* à New York

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Caroline Talbot*