Rares sont les réseaux sociaux francophones. Surtout ceux qui arrivent à devenir tendance auprès des jeunes aussi bien en Europe qu’aux États-Unis. Dans ce créneau, BeReal est même unique. Née en 2020 et lancée de l’autre côté de l’Atlantique en 2022, l’application a plu par ses contenus spontanés, authentiques, et loin du modèle d’Instagram, TikTok et Facebook, à retenir l’attention des utilisateurs pendant de nombreuses heures.
En 2024, alors qu’elle s’ouvrait finalement aux comptes de créateurs et aux entreprises, la plateforme BeReal s’est vendue pour 500 millions d’euros à une autre entreprise tricolore : Voodoo. L’éditeur de jeu vidéo qui déboursait déjà 200 millions d’euros l’année dernière pour s’offrir son concurrent Beach Rum vient de fait l’acquisition du réseau social fondé par Alexis Barreyat et Kévin Perreau.
Que vaut vraiment BeReal ?
Alors valorisé 600 millions d’euros lors de sa dernière opération de financement, BeReal se vend aujourd’hui pour 100 millions d’euros de moins. Mais ce montant de 500 millions d’euros est flou, car il comprend des conditions négociées par Voodoo auprès de BeReal. Les modalités de l’opération révèlent en effet que Voodoo a seulement versé un tiers du montant en cash et en échange de titres (soit 166 millions d’euros), le reste étant conditionné par des objectifs.
Les conditions assumées publiquement par Voodoo et BeReal concernent le nombre d’utilisateurs. L’objectif est d’atteindre 100 millions de comptes sur le réseau social qui en compterait actuellement 40 millions. En janvier dernier, les chiffres étaient bien plus bas alors que la startup avançait le nombre de 23 millions à nos confrères de Tech Crunch. Disponible aux États-Unis et au Japon, BeReal a connu deux grosses étapes dans son déploiement, mais souffrait récemment d’une période de calme qui laissait douter de la croissance de son nombre d’utilisateurs.
En parallèle à la croissance de la taille de BeReal, il faudra aussi rentabiliser les investissements. Car BeReal ne gagne toujours pas d’argent. Son existence était donc conditionnée au pouvoir de financement de ses actionnaires. En quatre ans, le réseau social n’a jamais diffusé d’annonces publicitaires. Il y a eu l’arrivée de marques et de comptes de personnalités publiques, mais ces ajouts de comptes « ne sont pas de la publicité », indiquait son COO Romain Salzman dans un communiqué en janvier.
I’m thrilled to announce that @BeReal_App is now part of @VoodooPlatform.@BeReal_App is the most successful social app launched in nearly a decade.
They have created a unique behavior: sharing authentic content with true friends, and a visionary app, where every user is an… pic.twitter.com/I2KkM4NWPN— Alexandre Yazdi (@YazdiAlexandre) June 11, 2024
Le pari de Voodoo
Étrangement, la valorisation de BeReal à 500 millions d’euros n’a pas été mentionnée par Alexandre Yazdi, le cofondateur et CEO de Voodoo, dans un post d’annonce publié sur X. En revanche, auprès des Echos, le patron s’amusait de ce montant en le comparant à l’ancien rachat d’Instagram par Facebook en 2012, alors valorisé un milliard de dollars pour 30 millions d’utilisateurs.
En tant que développeur de jeu vidéo, Voodoo (valorisé 1,7 milliard d’euros en 2021) fait fructifier son portefolio de programmes grâce à ses outils d’analyse de données, ses annonceurs, et sa communauté de près de 150 millions de joueurs. Mais avec BeReal, c’est aussi un défi que la startup se lance, tant son activité dans l’univers du jeu « ultracasual » a vu ses revenus publicitaires dévisser de 400 à 150 millions d’euros de 2021 à 2023. Si bien que la startup avait du passer par une étape de licenciement, abandonner son virage dans la Blockchain et le Web3, et chercher un nouveau moyen pour retrouver l’équilibre économique.
C’est sous cet angle que BeReal arrive. Voodoo indique qu’il compte maintenant s’appuyer « sur des marques fortes » plutôt que sur la multiplication de ses programmes. Le réseau social en sera-t-elle une ? Pour la faire grossir, il faudra « s’appuyer sur des partenaires », indiquait Alexandre Yazdi. Dix années d’expérience dans les jeux vidéo et un modèle « anti-Instagram » seront-ils suffisants ?
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Source : Les Echos