Après la frénésie autour des start-up, voici venue la période des ‘ Slim Fast companies “. La course aux acquisitions et à la croissance externe serait-elle en train de passer de mode, au profit des stratégies de scission ?
Les derniers événements survenus dans l’univers des réseaux montrent qu’il vaut mieux aujourd’hui se recentrer sur des métiers identifiés et immédiatement rentables qu’entretenir des groupes protéiformes où l’entreprise finit par perdre son âme. Le cours de la Bourse en dépend.
Tour à tour, Cabletron, Lucent Technologies et Nortel Networks se sont ainsi en partie, ou complètement, réorganisés.
3Com vient aussi d’entrer dans la danse.
3Com se recentre sur l’accès rapide à Internet Après avoir introduit en Bourse 5 % de sa filiale Palm, 3Com abandonne plusieurs activités majeures du groupe, pour se concentrer là où il n’est pas encore dominé par le géant Cisco Systems : accès rapides à Internet par le câble et les technologies xDSL ; équipements d’accès à Internet pour les ISP ; matériels réseaux destinés au secteur résidentiel ; téléphonie LAN ; voix et fax sur IP ; messagerie unifiée (via le rachat de Call Technologies) ; ainsi que le sans-fil LAN et WAN. 3Com va s’organiser autour de trois canaux de vente : le grand public, les PME et les ISP. Cet éclatement est une forme de réponse aux analystes, qui lui reprochaient son éparpillement et son positionnement sur des secteurs à faible marge et à taux de progression bridé, malgré un résultat net positif. L’activité modems (dont l’avenir passe par le câble et les technologies xDSL), récupérée lors du rachat d’US Robotics en 1997 pour 7 milliards de dollars et déficitaire depuis le début, est vendue à une nouvelle société formée par le taïwanais Accton Technology et le singapourien NatSteel Electronics. Les commutateurs haut de gamme pour réseau local, de la série CoreBuilder, seront repris par Extreme Networks, qui fera migrer les clients vers ses matériels Summit et BlackDiamond. La fabrication des équipements de commutation pour le réseau étendu – les séries PathBuilder et NetBuilder – sera arrêtée le 30 juin 2000. Tout ce qui concerne ce c?”ur de métier sera repris par Motorola. Avec sa restructuration sans surprise – hormis son abandon des secteurs LAN et WAN -, 3Com fait donc désormais partie des leaders historiques des réseaux qui ont jeté l’éponge face à Cisco Systems, Lucent Technologies et Nortel Networks, au moins dans le segment du haut de gamme.
Lucent regroupe ses activités réseaux
Chez Nortel Networks, l’activité des télétravailleurs et des PME se révélant moins stratégique, la firme vient de donner, comme prévu, son indépendance à sa filiale NetGear. Issue du rachat de Bay Networks, cette société, spécialisée dans les petits équipements réseaux, devrait être bientôt introduite en Bourse. Lucent Technologies, pour sa part, a annoncé qu’il se séparerait d’ici à quelques mois de l’ensemble de ses activités communication d’entreprise, qui devraient être cotées indépendamment. Cette décision a pris de court les observateurs mais pourrait se révéler plus structurante qu’il n’y paraît. Au-delà de l’impact sur la cotation en Bourse de Lucent – l’activité communication d’entreprise est rarement florissante chez les équipementiers -, la tendance est aussi au recentrage sur les réseaux d’opérateurs. C’est même devenu le credo de Lucent pour cette nouvelle décennie.
Concrètement, la nouvelle entité dédiée aux réseaux d’entreprise (qui représente 8 milliards de dollars de chiffre d’affaires) regroupera les anciennes activités de Lucent dans les PABX (Definity), les centres d’appels, la messagerie vocale (ex-Octel), les réseaux locaux (Cajun, ex-Prominet), la visioconférence et les systèmes de câblage (Systimax). Cette structure consacrée aux entreprises sera importante aux Etats-Unis, où Lucent et Nortel détiennent chacun 20 % à 25 % du marché. Dans l’Hexagone, la présence de Lucent (avec 700 millions de francs de chiffre d’affaires, dont 200 millions dans les systèmes de câblage) reste modeste sur ce créneau, par comparaison avec Alcatel ou Matra Nortel Communications. Après avoir racheté Barphone, spécialiste des PABX de petite capacité, en 1993, Lucent s’est fait connaître en France dans le domaine des centres d’appels, où il est devenu le numéro un.
Le repli de Lucent, à l’heure où Matra Nortel Communications se retire du marché des terminaux grand public et professionnels, où Ericsson externalise leur fabrication, et où Alcatel rapproche ses activités dans la téléphonie grand public de celles de Thomson Multimedia, préfigure-t-il un mouvement plus vaste ?
La fin des synergies entre réseaux publics et commutation privée
‘ Même si l’objectif est de créer de la valeur, ces deux activités – opérateur et communication d’entreprise – fonctionnaient déjà de manière autonome ‘, commente Michel Rouilleault, vice-président de Lucent France. Laurent Balcon, consultant à l’Idate, partage cette analyse : ‘ Les synergies entre réseaux publics et ventes aux entreprises sont de moins en moins évidentes. ‘ De fait, les marges sur ce créneau sont faibles, la plupart de la valeur ajoutée étant captée par les distributeurs et intégrateurs. On comprend ainsi la décision de Lucent.
Du côté d’Alcatel, on récuse cette approche et on souligne que ‘ la communication d’entreprise et les PABX font partie des cinq grands métiers du groupe dans les télécommunications ‘. On ne saurait être plus clair à l’heure où Alcatel s’attaque au marché américain des centres d’appels, grâce au rachat de Genesys, et aux réseaux IP d’entreprise via l’Omni PCX, de Xylan. Le discours est assez similaire chez Matra Nortel Communications. La firme parie, en effet, sur ‘ la convergence des réseaux d’entreprise et des réseaux d’opérateurs à travers Internet ‘. La seule opinion divergente provient d’un haut responsable de… Lucent, qui assure, non sans malice, que « Cisco utilise le tremplin des entreprises pour conquérir les opérateurs, et que Lucent tourne le dos à ces mêmes entreprises ‘. Cependant, la tendance est à une externalisation de plus en plus poussée en ce qui concerne les terminaux. L’initiative la plus spectaculaire est à mettre au crédit de 3Com. On pense aussi au rapprochement d’Alcatel et de Thomson Multimedia dans les terminaux grand public, avec la création d’une filiale commune, Atlinks.
Avec un chiffre d’affaires de 900 millions de dollars, Atlinks commercialise le Web Touch One, (70 000 exemplaires déjà vendus) et les modems ADSL, d’Alcatel. Enfin, bien que sa démarche soit plus modeste, notons que Matra Nortel Communications vient d’abandonner son activité terminaux téléphoniques au profit de Doro, qui a créé Doro Matra Telecom, dont Matra Nortel Communications détient 19,9 %.
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