Le tour de table est impressionnant. De Thierry Breton, encore président de Thomson Multimédia, à Jean-Martin Folz de PSA Peugeot-Citroën, en passant par Jean Peyrelevade du Crédit lyonnais, tout le gratin patronal français s’est retrouvé dans le groupe de travail présidé par Daniel Bouton, le dirigeant de la Société générale. Après la tornade Enron, et la découverte des errements du cabinet d’audit Arthur Andersen, le patronat français ?” soit le Medef associé à l’Afep, le lobby qui rassemble les principaux dirigeants d’entreprises de l’Hexagone ?” se devait de réagir. Et, dans la lignée des rapports déjà rédigés en 1995, puis 1999 par le banquier Marc Viénot, de plancher sur de nouvelles règles de corporate governance.
Un code pour état-majors
Les treize membres de ce groupe de travail ont ainsi accouché la semaine dernière d’un document de vingt-huit pages, intitulé en toute modestie Pour un meilleur gouvernement des entreprises cotées
(1). Reste à savoir comment ces propositions pourront être un jour traduites dans les faits. Les rapporteurs affirment par exemple qu’un conseil d’administration doit être “un savant dosage de compétence, d’expérience et d’indépendance au service de l’intérêt de la société et de ses actionnaires.” Bien malin qui pourrait dénicher quelqu’un opposé à cette définition. Toutefois, il n’est pas sûr que ces seules motivations guident les pensées desdits membres de ce groupe de travail quand ils sont amenés à rechercher des candidats pour leur propre conseil d’administration.La sélection reste largement fondée sur la consanguinité. Même si de tels dysfonctionnements restent surtout l’apanage des grands groupes. À l’instar des autres maux soulignés par le rapport, les solutions suggérées concernent, pour la plupart, les entités de taille importante : comités d’audit, comités de rémunération, nominations d’administrateurs indépendants… Comme s’il s’agissait de corriger des pratiques inavouables, plus que d’offrir à l’entrepreneur en herbe un cadre juridique performant. De la même façon, les mesures suggérées visent avant tout l’état-major de l’entreprise, sans aborder la situation des cadres. “On peut regretter le manque d’ambition du rapport Bouton en matière de stock-options, souligne Christian Nouel, avocat au sein du cabinet Latham & Watkins. Alors qu’elles attirent et fidélisent les meilleurs salariés.”Et les auteurs de rester timides quand il s’agit de préciser les modalités d’établissement du prix d’exercice des options, bien qu’à ce sujet le rapport recommande la suppression de toute décote lors de l’attribution des titres. Une suggestion qui correspond parfaitement à la logique économique des stock-options : il doit y avoir un risque et le gain ne peut être présenté comme certain. “Il faudrait que le prix corresponde à la moyenne du cours de Bourse sur une période très longue, prévient Christian Poyau, président de l’Association Croissance Plus, qui réunit des entreprises qui militent notamment pour une plus large répartition des stock-options parmi le personnel. Comme par exemple six mois avant l’attribution des options et six mois après l’octroi de celles-ci.” Afin que la valeur ainsi retenue ne soit pas “polluée” par des incidents de parcours que pourrait connaître le cours de l’action.Après avoir été critiqué, débattu et commenté, quel avenir pour ce rapport Bouton : loi ou pas loi ? S’il n’est pas question de bâtir une seconde cathédrale juridique du type de la loi sur les Nouvelles régulations économiques (NRE) ?” un de ces monstres législatifs qui peinent à voir le jour et qui sont presque caducs une fois qu’ils doivent être appliqués ?”, se pose pour le ministre de lÉconomie, Francis Mer, la question de la transposition dans le droit des conclusions du rapport. Il y a fort à parier que le projet de la loi sur la sécurité financière, annoncé pour la fin de cet automne, reprendra largement ses idées.(*) Dont le texte intégral est téléchargeable en format PDF sur le site www.medef.fr.
🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.