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Le plan américain de subventions de semi-conducteurs est déjà un pari gagnant

Le plan massif de subventions de Joe Biden sur les semi-conducteurs a entraîné un boom des investissements privés sur le territoire américain. Et même si toutes les usines promises ne seront pas construites ou rentables, Washington estime que sa loi a déjà un effet inespéré : rendre l’industrie américaine et le pays plus résilients face aux futurs chocs géopolitiques.

Alors qu’en Europe, Emmanuel Macron appelait cette semaine à un grand choc d’investissements européens dans son discours de la Sorbonne, aux États-Unis, le choc a déjà eu lieu, et on en est déjà au bilan d’étape du « Chips and Science Act » ( Chips pour « Creating Helpful Incentives to Produce Semiconductors », soit littéralement la création d’incitations utiles à la production de semi-conducteurs). Après la pénurie de puces électroniques qui a ralenti, voire arrêté, des usines pendant plusieurs mois aux États-Unis et partout dans le monde, Washington lançait en 2022 son grand plan de subventions de l’industrie des puces électroniques.

À la clé était prévu un budget colossal de 52,7 milliards de dollars, dont 39 milliards directement réservés aux sites de production. L’objectif était alors d’inciter les fabricants de puces du monde entier à ouvrir des usines sur le sol américain. En arrière-plan, Washington cherchait coûte que coûte à réduire la dépendance des industriels américains à l’Asie du Sud-Est, une partie du globe où se concentre la majorité des fabricants de semi-conducteurs. Aujourd’hui, presque tous les processeurs de pointe sont fabriqués en Corée du Sud et surtout à Taïwan, un État revendiqué par la Chine et dont une éventuelle attaque perturberait considérablement l’économie américaine (et mondiale).

Loin de l’autosuffisance, mais…

Et si, en avril 2024, près de la moitié des 39 milliards auraient déjà été alloués, le bilan s’avérerait plus que positif, explique le Financial Times. En deux ans, les États-Unis n’ont évidemment pas atteint le stade de l’autosuffisance en matière de semi-conducteurs, ces indispensables composants de nos smartphones, de nos voitures, et de l’IA – toute idée d’autosuffisance est d’ailleurs difficilement atteignable, tant la chaîne de fabrication des semi-conducteurs est longue et morcelée entre différentes sociétés et parties du globe. Le pays atteindrait péniblement les 10 % de la production grâce à ses champions nationaux comme Intel et Nvidia, rappelle la Maison-Blanche dans un communiqué

Mais le « Chips Act » et ces milliards d’investissements publics auraient entraîné un boom des investissements privés, allant bien au-delà des espérances de Washington. Selon les calculs de l’Association de l’industrie des semi-conducteurs, cités par nos confrères du Financial Times, les entreprises de puces et les fabricants de composants de la chaîne de fabrication des semi-conducteurs auraient investi – ou se seraient engagés à investir – une somme qui ferait rêver le Vieux Continent :  327 milliards de dollars sur les dix prochaines années. La construction d’usines d’appareils informatiques et électroniques aurait été multipliée par quinze sur le sol américain, selon ces statistiques.

20 % de la production mondiale des puces sur le sol américain… en 2030, selon Gina Raimondo

Comprenez : les principaux fabricants de semi-conducteurs ont tous des projets en cours d’usines sur le sol américain. Le champion américain Intel construit un site d’où sortiront les puces les plus avancées dans le pays. TSMC, le géant taïwanais, prévoit de produire des puces en grande quantité dans sa première usine en Arizona dès l’année prochaine. L’entreprise compte aussi y produire des semi-conducteurs de dernière génération de 2 nanomètres, deux ans après l’avoir fait à Taïwan. La société sud-coréenne Samsung prévoit d’agrandir un site existant et de construire deux nouveaux sites au Texas. Micron Technology, le plus grand fabricant de puces mémoire des États-Unis, est le dernier à avoir reçu jusqu’à 6,1 milliards de dollars de subventions du gouvernement américain, a annoncé jeudi 25 avril la Maison-Blanche. L’entreprise compte construire des usines de semi-conducteurs à New York et dans l’Idaho.

Selon la secrétaire américaine au Commerce Gina Raimondo, les États-Unis produiront probablement environ 20 % des puces les plus avancées du monde en 2030 – contre zéro aujourd’hui. De quoi permettre à l’industrie américaine, qui consomme plus de 25 % des puces fabriquées dans le monde, de répondre aux demandes des infrastructures critiques, en cas de nouvelle crise, écrivent nos confrères.

Toutes ces usines promises ou en cours seront-elles construites ou iront-elles au bout de leur construction ?  Seront-elles rentables ou n’entraîneront-elles pas une surproduction américaine, s’interroge le Financial Times. Jusqu’à présent, la crainte de la surproduction américaine est loin d’être réelle. C’est même tout l’inverse : les patrons de l’intelligence artificielle, comme Sam Altman, le PDG d’OpenAI, sont plus préoccupés par les pénuries de puces d’intelligence artificielle, que l’inverse.

Pour les politiques, le retour sur investissement est déjà là : certes, les États-Unis sont très loin de l’autosuffisance. Certes, il y a parfois des blocages administratifs et l’argent promis du Chips Act n’arrive parfois pas assez vite, rapportait CNBC. Mais les résultats sont là. Les usines se sont multipliées, et le pays aura plus de marge de manœuvre pour encaisser les futurs chocs géopolitiques, qu’il n’en avait à la sortie du Covid. Et ça, ça n’a pas de prix.

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Source : Financial Times


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