Un usage incontournable, mais où les zones grises restent nombreuses, tel est, en substance, le bilan d’une étude commanditée par la CNIL et réalisée par TNS Sofres (*) à propos du partage de photos sur Internet. Preuve qu’il s’agit d’une véritable lame de fond, 58 % des français publient des photos sur Internet pour les partager avec d’autres, et 50 % ont déjà été identifiés sur une photo par un tag.
Sans surprise, cet usage est le plus intense chez les jeunes de 18 à 24 ans : 86 % d’entre eux publient des photos sur la Toile et 89 % ont déjà été « tagués ». Cette appétence pour l’image décroît avec l’âge et concerne moins d’un tiers chez les plus de 50 ans. « Les photos sont devenus un élément déterminant de la vie numérique et de la constitution de l’identité numérique. Elles sont un vecteur du marketing de soi sur Internet », souligne Isabelle Falque-Pierrotin.
Des règles de savoir-vivre qui font défaut
Le problème, c’est que cet usage est parfois ambivalent, voire mal compris ou mal maîtrisé. Ainsi, ce n’est pas du tout un tabou de publier des photos de quelqu’un ou de le taguer sans avoir demandé son avis. Seule une minorité de personnes disent le faire de manière systématique. Pour expliquer son geste, on se réfère souvent à un accord tacite ou supposé (« Je sais que cela ne dérangera pas »).
Toutefois, l’étude montre qu’il y un décalage entre ce que l’on dit, ce que l’on fait et ce qui est ressentie au final. Ainsi, 88 % pensent que toutes les photos ne peuvent pas être publiées, mais 25 % avouent avoir déjà publié une photo pour se moquer « gentiment » d’une personne. Et 43 % disent avoir déjà été gênés par une photo d’eux-mêmes publiée sur Internet. Il y a donc là des règles de savoir-vivre qui ne sont pas encore comprises ou assimilés, voire ignorés.
Des outils de paramétrages peu pratiques
Le flou règne également du côté des outils d’administration. Seul un tiers des personnes qui partagent des photos déclarent bien connaître leurs paramètres de visibilité. Et parmi elles, 39 % seulement les adaptent systématiquement. Les freins sont multiples : oubli, complexité, manque d’envie, doute sur l’efficacité des paramètres de sécurité, etc. Fait marquant : ce sont les plus jeunes (13-17 ans) qui, apparemment, maîtrisent le mieux cet aspect technique : ils sont 48 % à savoir exactement qui a accès à leurs photos.
Globalement, une grande majorité des personnes interrogées (75 %) éprouvent le besoin de mieux protéger leurs photos. Ils réclament des outils de paramétrage plus faciles à utiliser et plus d’informations sur les risques encourus et les moyens de protection. De son côté la CNIL a émis une série de recommandations d’usage. « En particulier, la synchronisation automatique des photos entre différentes plateformes est à éviter, car la suppression de toutes ces photos se révèle très difficile », souligne Olivier Desbiey, chargé d’études prospectives à la CNIL.
(*) Les interviews ont été effectuées par Internet auprès de 1554 individus âgés de 13 ans et plus, entre le 13 et le 20 novembre 2012. Représentativité assurée par la méthode des quotas.
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