La guerre entre partisans et adversaires de la fusion HP-Compaq aura eu au moins une vertu. Moins d’une semaine après l’annonce officielle de la fusion, le 3 mai, HP a pu communiquer, dans le détail, sa nouvelle organisation, sa stratégie et le calendrier de sortie de toutes ses gammes de produits pour les trois années à venir. “Après huit mois et des millions d’heures à planifier cette fusion, nous sommes enfin prêts aujourd’hui à faire des affaires sous la bannière du nouvel HP”, s’est félicitée la présidente, Carly Fiorina. Sur le papier, la physionomie du nouveau géant était connue de longue date. Avec un chiffre d’affaires dépassant 80 milliards de dollars en 2001 et plus de 100 000 employés dans 160 pays, HP talonne son unique véritable concurrent, IBM. Mais face à ce dernier qui peaufine depuis plusieurs années son image de cham-pion des services, HP veut s’imposer comme le premier fournisseur de technologies. Une ambition légitime étant donné sa position dominante sur le marché de la micro, des serveurs et de l’imagerie numérique. Face à l’approche verticale d’IBM consistant à intégrer ses propres processeurs (Power- PC) et logiciels (DB2, WebSphere, Lotus, Tivoli), HP veut se différencier aussi en se présentant comme l’allié et non le concurrent des éditeurs et des SSII. Aux critiques sur la non-complémentarité de HP et de Compaq, HP oppose son analyse de l’évolution du marché informatique. “Notre industrie atteint un seuil de maturité et d’inflexion. L’époque des croissances à 30 ou 40 % est révolue”, note Patrick Starck, le patron de Compaq France, promu président de la nouvelle filiale. Outre les restrictions d’échelle qui doivent permettre d’économiser 2,5 milliards de dollars en deux ans, HP prévoit d’abandonner progressivement ses technologies propriétaires au profit des standards, sésame ouvrant la porte aux marchés de masse.
Recentrage sur HP-UX et Itanium
Cette volonté de rationalisation est la clé de voûte de l’ensemble des calendriers de sortie du catalogue produits. Tout d’abord, HP entérine la suprématie de Compaq sur le marché de la micro en conservant sa marque pour les PC et les portables professionnels. La gamme de serveurs Intel HP NetServer, dont la part de marché est trois fois inférieure à celle des ProLiant de Compaq, est logiquement abandonnée, tout comme les assistants personnels Jornada. Ceux-ci cèdent leur place à l’iPAQ, qui domine le marché des PDA avec Windows CE. Ces gammes disparaîtront des catalogues au troisième trimestre. Toutefois, la garantie et l’assistance assurées pour trois ans laissent la possibilité aux entreprises d’une ultime mise à jour de leur parc. C’est sur le marché des serveurs d’entreprise que la consolidation des gammes sera la plus drastique. HP-UX est confirmé comme l’Unix stratégique et sera porté en priorité sur Itanium. Ses futures versions bénéficieront de technologies tirées de Tru64 jusqu’à sa disparition en 2004, HP ayant finalement choisi de ne pas le porter sur Itanium. Quant aux quatre plates-formes existantes (PA-Risc, Alpha, Mips et Itanium), elle convergeront vers une seule, Itanium, utilisée par tous les serveurs Unix à l’horizon 2005. Seuls rescapés de ce grand toilettage, les serveurs à haute disponibilité Himalaya et le système OpenVMS implantés sur des marchés de niche critiques (finances, santé, administration…) sont pérennisés. OpenVMS sera même porté sur Itanium en 2006. Enfin, si rien ne change pour les imprimantes, chasse gardée de HP, l’immense catalogue de solutions de stockage sera, à terme, refondu en une gamme unique.Du côté des logiciels, la plate-forme d’administration OpenView, forte d’une base installée de 135 000 clients, va s’enrichir de fonctions de TeMIP, la plate-forme de Compaq héritée de Digital. Quant à Netaction, la stratégie middleware de HP initialement axée sur J2EE, elle devrait être rééquilibrée au profit de .NET en raison des relations privilégiées de Compaq avec Microsoft, estime Massimp Pezzini, un analyste du Gartner Group.Pris au dépourvu lors de l’annonce de la fusion, les clients de HP et de Compaq semblent désormais confiants dans les chances de réussite de la nouvelle entité. “La fusion a été un moment difficile pendant lequel il n’était pas facile d’avoir un interlocuteur au bout du fil. Maintenant que c’est entériné, on a l’impression que les choses vont aller très vite et c’est le soulagement qui prédomine”, constate Bertrand de Boissieu, président du club des utilisateurs de HP France (Utigroup). “Les calendriers de sortie publiés il y a six mois par Compaq ont été validés par HP. C’est très rassurant”, ajoute, pour sa part, Daniel Clar, président de l’association des utilisateurs Compaq France (Decus). Les deux hommes attendent maintenant de juger sur pièce.
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