C’est un peu la querelle des Anciens et des Modernes, revisitée à la sauce internet. Dans son ouvrage Géopolitique d’internet, la journaliste Solveig Godeluck raconte de manière très rigoureuse la façon dont la toile a vu s’affronter les deux clans rivaux qui la composent : les marchands et les colons. Ces derniers, qui figurent parmi les acteurs historiques du réseau, sont pour l’essentiel des universitaires désintéressés ou des informaticiens utopistes. Tandis que l’autre camp est fréquenté par les grands groupes industriels et commerciaux, qui ont peu à peu envahi la planète internet. Entre les deux, un troisième personnage tente de trouver sa place : le régulateur. Un rôle joué par les États ou les organisations internationales qui souhaiteraient retrouver sur le web l’autorité dont ils disposent dans le monde réel.L’auteur raconte avec brio comment ces trois populations restent dépendantes du savoir des techniciens. Car, à l’échelle internet, une frontière physique n’a que peu de sens, et le savoir-faire acquis dans les écoles de guerre n’est rien sans la maîtrise de technologies. Un état de fait qui renforce considérablement la position des colons, qui peuvent peser face à des multinationales, voire des gouvernements. En donnant notamment l’occasion de s’exprimer à des courants minoritaires. Même si à ce jour les échanges électroniques prennent souvent le même chemin que les échanges physiques. Ainsi, les transactions internet États-Unis/Europe pèsent 50 milliards de bits par seconde, le courant États-Unis/Asie 20 milliards contre 300 millions pour chacun des axes États-Unis/Afrique et Europe/Asie. Et Solveig Godeluck de démontrer comment les États peinent à s’adapter au réseau. À l’instar du Parlement français qui aura attendu l’année 2001 pour amender la loi Le Chapelier de juin 1791 et faciliter l’investissement public en matière d’infrastructures technologiques.
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