Le Forum des droits sur l’internet a publié il y a quelques jours ses conclusions relatives à l’utilisation d’internet au travail. Cinq mois après les recommandations de la Commission nationale informatique et libertés (Cnil), l’association, qui compte aujourd’hui une cinquantaine de membres, s’attaque à son tour à ce sujet sensible. “Notre champ est plus large, puisque nous avons étudié également des questions, comme le dialogue social, laissées de coté par la Cnil. L’esprit est également différent : nous ne dégageons pas de nouvelles problématiques, mais nous apportons des outils pratiques à tous les acteurs de l’entreprise”, observe Isabelle Falque-Pierrotin, présidente.Dix fiches très concrètes sont depuis peu disponibles sur le site www.foruminternet.org. À partir de questions ?” par exemple “Peut-on licencier un salarié par e-mail ?”?” elles donnent l’état de la législation et quelques conseils de bon sens. Résultat de six mois de concertation entre les meilleurs spécialistes du droit, mais aussi les représentants du patronat et des syndicats, ces fiches sont destinées aux DRH des grands groupes comme aux directeurs du personnel des PME, aux syndicats ou aux simples salariés. Le Forum, qui répond de surcroît aux questions laissées sur son site, devrait également publier un guide complet sur les technologies de l’information dans l’espace professionnel.
Une base pour la concertation
Mais l’objectif de cette discrète association ne se limite pas à ce jeu de fiches. Un rapport, plus dense du point de vue juridique et politique, est mis en ligne sur son site. Il va servir de base à la concertation entre les partenaires sociaux, que compte lancer très prochainement la direction des relations du travail du ministère des Affaires sociales. “Les technologies se diffusent aujourd’hui largement dans les entreprises et cela va changer fortement la manière dont elles fonctionnent. Il n’est pas possible d’écarter les salariés de telles évolutions”, souligne Marie-Françoise Letallec, co-auteur du rapport. “Il y a là une opportunité de moderniser le dialogue social sur des bases renouvelées”, renchérit Isabelle Falque-Pierrotin.Car, le Forum en est persuadé, pas besoin d’une nouvelle loi pour utiliser internet dans l’entreprise. “Tout juste faut-il repeigner le code du travail pour aboutir à une neutralité technologique”, estime Marie-Françoise Letallec. En clair, pour considérer qu’internet est identique… à un mur, par exemple, lorsqu’il s’agit d’accrocher un panneau d’affichage syndical. Autre sujet sensible d’un point de vue réglementaire : la responsabilité de l’administrateur réseau. Le rapport recommande pour cette catégorie de poste la mise en place d’un nouveau statut légal incluant la notion de secret professionnel. “Il faut protéger la confidentialité de toute information de nature personnelle qu’un administrateur réseau pourrait connaître dans le cadre de ses fonctions”, explique Marie-Françoise Letallec.
Protéger la vie privée des salariés
Le Forum emboîte d’ailleurs le pas à la Cour de cassation sur la nécessité de préserver la vie privée du salarié. Il estime ainsi que le salarié dispose d’un véritable “droit à la déconnexion”, même si celui-ci est relatif au temps de repos effectif légal. Il rappelle qu’un employeur ne peut s’immiscer dans le disque dur de l’ordinateur d’un salarié sans que celui-ci en soit informé. De la même manière, un dirigeant ne devrait pas être en mesure de lire un e-mail identifié comme “personnel”. Avec beaucoup de prudence, le Forum préconise d’ailleurs la reconnaissance d’un véritable “usage personnel” d’internet par le salarié. Un terrain miné.Car même si le rapport du Forum semble faire l’objet d’un consensus parmi les membres du groupe de travail, où syndicats et patrons étaient tous représentés, le ministère des Affaires sociales risque d’avoir du mal à mettre tout le monde d’accord. “Chacun est très désireux de parvenir à un pacte social sur l’utilisation des NTIC. À une réserve près : les employeurs sont très désireux que chacun reconnaisse qu’internet est d’abord un outil de l’entreprise”, constate Isabelle Falque-Pierrotin. Une réserve de taille qui ressemble à sy méprendre à un éventuel point de blocage.
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