Livreurs Deliveroo, chauffeurs Uber… Ces métiers sont devenus une réalité quotidienne mais ils restent invisibles dans le droit du travail. Le gouvernement vient d’annoncer, mercredi 15 janvier, la mise en place « d’une mission afin de définir les différents scénarios envisageables pour construire un cadre permettant la représentation des travailleurs des plates-formes numériques ».
À la tête de ce service inédit : Jean-Yves Frouin, ancien président de la chambre sociale de la Cour de cassation.
Un cadre législatif en ébullition
L’objectif de cette mission sera d’appréhender les nouvelles formes de travail en « procédant à une large consultation des différents acteurs et partenaires sociaux ». Pour mener à bien ce travail, Jean-Yves Frouin « sera appuyé par un groupe d’experts », mais aussi par le ministère du Travail.
Un rapport est prévu pour fin décembre. Si une meilleure représentation reste le premier pas, la définition de l’arsenal juridique est également primordiale.
Dans le cadre de la loi Mobilités (LOM) votée récemment, Matignon semble vouloir multiplier les efforts pour créer un dialogue social, notamment sur les relations entre les indépendants et leurs plates-formes.
Il faut « aller plus loin, […] travailler à des règles inter-plates-formes ou réfléchir à la façon dont les travailleurs peuvent être associés à la définition des chartes », avait affirmé Élisabeth Borne, ministre des Transports, lors de l’ouverture des discussions sur la LOM devant le Parlement.
Le Sénat défend une loi protectrice
La démarche du gouvernement s’accompagne également de diverses actions et réflexions menées autour de ces nouvelles formes de travail, encore trop souvent marginalisées.
Loin de son image poussiéreuse habituelle, le Sénat semble en pointe des propositions sur les transformations contemporaines liées au numérique. Estimant que « les plates-formes […] imposent […] des algorithmes favorisant l’effacement des avancées sociales du siècle dernier et instaurent un salariat déguisé », les sénateurs socialistes Monique Lubin, Olivier Jacquin et plusieurs de leurs collègues ont déposé, fin 2019, une proposition de loi en faveur des droits sociaux de ces e-travailleurs.
🗣️Suivez en direct les débats sur la proposition de loi sur les droits sociaux des travailleurs des plateformes que je porte avec Monique Lubin, @Nadine_Grelet et les @senateursPS #Ubérisation
➡️https://t.co/SXMgHzWmK8 pic.twitter.com/fYWPCXGs91— Olivier Jacquin (@Jacquin_Olivier) January 15, 2020
Redorer le blason de la coopérative
La proposition tend à obliger les indépendants recourant pour l’exercice de leur activité professionnelle à une ou plusieurs plates-formes de mise en relation par voie électronique sans en être salariés à se salarier ou s’associer à une Coopérative d’activité et d’emploi (CAE).
Loin de son image désuète, la coopérative assure un certain nombre de garanties notamment économiques et sociales. C’est le lien fondé sur la coopération qui change la relation employé-employeur.
À Paris comme à Bordeaux, plusieurs ex-livreurs Delivroo remerciés après leur vive mobilisation contre la plate-forme se sont effectivement constitués en coopérative : Collectif des livreurs autonomes de Paris (Clap75) ou les Coursiers bordelais.
Reste un frein important : la méconnaissance de ce statut. Jérôme Giusti, co-directeur de l’Observatoire de la justice, et Thomas Thévenoud, ancien ministre, ont publié un rapport sur les travailleurs du numérique intitulé « Pour travailler à l’âge du numérique, défendons la coopérative ! ».
Ils préconisent, eux aussi, un retour à la coopérative, mais ils montrent aussi que le statut d’Entrepreneur salarié associé (ESA) est largement ignoré par les plates-formes numériques.
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