La date du 1er janvier 2001 pour l’ouverture de la boucle locale filaire de France Télécom sera tenue. Le gouvernement a publié, le 12 septembre dernier, le décret relatif au dégroupage tant attendu par les opérateurs alternatifs. Chez 9 Telecom, on se félicite que “ce décret confère une base juridique au dégroupage”. Il précise en effet son cadre juridique et son calendrier : France Télécom devra fournir aux opérateurs les informations techniques nécessaires à la mise en ?”uvre du dégroupage et traiter leurs demandes de colocalisation des équipements, dès le 1er octobre 2000. Ces éléments concrets satisfont l’Aost (Association des opérateurs de services de télécommunications), et notamment son responsable des questions réglementaires, François Vivier : “L’arsenal est complet. Le décret impose des échéances précises et complètes. Si, au 1er octobre, nous n’avons pas reçu les informations nécessaires, nous pouvons attaquer France Télécom pour manquement à ses obligations.”
Il faut encore fixer le prix d’une ligne dégroupée
Le décret prévoit deux types de dégroupage : total ou partagé. Dans le premier cas, France Télécom met à la disposition de ses concurrents des paires de cuivre complètes pour délivrer à la fois des services de téléphonie locale et d’accès à Internet à haut débit (ADSL). Dans le second cas, tout en continuant à offrir le service téléphonique, France Télécom alloue à l’opérateur alternatif la partie de la paire de cuivre non exploitée pour ses offres Internet.
Cette solution, immédiatement exploitable, ne contraint pas les opérateurs à offrir un service de téléphonie locale jugé peu rentable – excepté pour France Télécom, qui peut réaliser des économies d’échelle grâce à la masse de ses clients. Mais elle n’est pas du goût de l’opérateur historique qui souligne que “le mode de partage de la ligne téléphonique retenu dans le décret pourrait être source de difficultés dans la relation entre le client et les opérateurs “. France Télécom était, en effet, partisan du ” tout ou rien “, qui laisse le client face à un seul fournisseur, pour éviter de multiplier les contentieux. Il rappelle, à ce propos, l’échec du plan Câble, lié à la présence de deux opérateurs – l’un technique et l’autre commercial -, dont les intérêts n’étaient pas forcément communs. Au contraire, ses concurrents se réjouissent. Ils pourront enfin maîtriser la qualité de leur service Internet. Auparavant, ils étaient réduits à revendre l’offre ADSL Netissimo de France Télécom.
Cependant, le décret ne précise pas encore le loyer que devront verser les opérateurs à France Télécom pour l’usage de ses lignes. Il est prévu que l’opérateur fasse une proposition tarifaire au 1er décembre, sous le contrôle du régulateur, et selon une méthode de calcul que ce dernier aura définie, qui devra refléter les coûts du réseau. Les opérateurs, pour leur part, estiment encore excessive la moyenne européenne de ces prix : environ 13 à 15 par mois pour une ligne dégroupée. Certains réclament moins de 8 ? mensuels, dans le cadre d’un partage de ligne. Pour Denis Planat, directeur général d’Easynet France, ce tarif n’a de sens qu’en comparaison avec le coût final facturé à l’utilisateur. “Les technologies XDSL doivent offrir une réduction d’environ 20 % par rapport à des liaisons louées. Dans ces conditions, nous espérons faire migrer entre 30 et 40 % de notre parc de clients entreprises en deux ans “, précise-t-il. La réussite du dégroupage reposera aussi sur les conditions liées à la colocalisation des équipements. Les opérateurs savent en partie à quoi s’attendre : “L’accès à ces sites d’interconnexion est réservé aux seuls agents de France Télécom, lequel impose des délais de six à neuf mois pour une prestation de colocalisation “, indique Emmanuel Tricaud, directeur du développement chez Colt France.
La colocalisation sera source de nombreux problèmes
Les interrogations des opérateurs sont nombreuses : où sont localisés les répartiteurs ? Quels seront les délais de livraison : trois, six, ou neuf mois ? Quels sont les horaires d’accessibilité des locaux ? Quels seront les équipements secourus les premiers en cas de panne électrique ? “En Allemagne, c’est un combat de tous les jours avec l’opérateur historique “, précise Emmanuel Tricaud, fort de son expérience avec sa filiale d’outre-Rhin, qui expérimente le dégroupage avec Deutsche Telekom.
“Nous comptons couvrir rapidement 20 % des répartiteurs de France Télécom. Ce qui correspond à environ 50 % du marché. Nous commencerons par les grandes agglomérations, Paris, Lyon, Marseille, etc. , et les villes situées sur le parcours de notre réseau “, ajoute Emmanuel Tricaud. Au niveau européen, Colt devrait investir entre 4 et 5 milliards de francs dans les technologies XDSL. Aujourd’hui, 25 opérateurs sont engagés dans les expérimentations XDSL de France Télécom. De quoi prédire de belles bousculades aux portes de ses répartiteurs !Ce décret met une touche finale à trois ans de processus de dérégulation, processus conflictuel s’il en est, entre France Télécom et les nouveaux entrants. Après avoir soutenu France Télécom, le gouvernement joue son rôle de médiateur avec pondération. Une volonté sans doute infléchie et contrainte par l’explosion des télécommunications, dopées par les accès à Internet et les enjeux économiques qui en découlent.
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