Une “start-up administrative “. C’est ainsi que le Forum des droits sur l’internet a été évoqué lors de son lancement en mai 2001, quelques semaines à peine après l’éclatement de la bulle financière.Cette association loi 1901 (www.foruminternet.org) devait allier la légitimité de l’autorité de l’État ?” grâce à ses financements publics et à l’onction du Premier ministre ?” à la réactivité d’une structure privée.Sa mission ? “Être un lieu permanent de dialogue et de réflexion visant au développement harmonieux des règles et usages sur le réseau.” Perspective qui, a priori, ne devait pas susciter d’opposition. Qui pourrait refuser de participer à la “construction de la civilité de l’internet” ?
Un carrefour oublié
Présidé par Isabelle Falque-Pierrotin (un conseiller d’État qui a écrit, en 1998, un des premiers rapports officiels sur les NTIC, Internet et les réseaux numériques) et animé par une demi-douzaine de personnes, le Forum a aussi vocation à compiler des informations juridiques relatives au net.L’idée est d’amener les acteurs de la toile à passer par son site : les élus, pour tester de possibles textes de loi relatifs aux technologies; des webmestres, soucieux de trouver des réponses juridiques sur les règles à respecter pour exploiter un site ; sans oublier les internautes de passage, curieux de connaître leurs droits. Le principe est donc simple : outre les données juridiques, des thèmes de discussion sont mis en ligne pour lesquels chacun peut formuler ses commentaires.Parmi les sujets en cours de débat, on trouve internet et les relations du travail, le traitement des données personnelles dans l’administration électronique ou encore un échange sur la définition à apporter aux liens hypertextes. Mais aucun de ces sujets ne déplace les foules.En effet, les contributions se limitent en général à quelques dizaines de messages pour chacune de ces thématiques. Une représentativité vraiment faible au regard de l’audience d’internet. Surtout si on la rapporte à la dotation publique du Forum : près de 1,15 million d’euros par an pendant trois ans.À titre de comparaison, la Commission nationale informatique et libertés (Cnil) et ses soixante collaborateurs disposent d’un budget seulement trois fois supérieur. Et 11 000 euros avaient suffi à la première version de son site en 1998.Certains spécialistes du net relèvent d’ailleurs que la Cnil avait déjà abordé plusieurs des sujets évoqués plus récemment par le Forum, comme par exemple internet et les mineurs, ou la cybersurveillance des salariés.
Connu des lobbies
Autre sujet de critique : le dosage public-privé du Forum. Aujourd’hui, plus d’une quarantaine d’entreprises (dont Wanadoo, Microsoft ou Vivendi Universal) et d’associations professionnelles font partie de ses adhérents.” Nous contestons la mise sur le même plan de lobbyistes d’entreprises et de représentants de l’État “, insiste Meryem Marzouki, déléguée de l’Iris (Imaginons un réseau internet solidaire), une association militante très active sur la toile. D’ailleurs, les représentants de groupes de pression ne cachent pas vraiment leur volonté d’influencer le débat politique via le Forum.Le problème est qu’après un an d’existence, les internautes ne semblent pas avoir retenu le site du Forum comme lieu d’expression. “Le projet de loi sur la société de l’information n’ayant pas été discuté au Parlement, on ne peut pas savoir si le Forum est écouté véritablement par les pouvoirs publics”, reconnaît Jean-Christophe Le Tocquin, délégué général de l’Association des fournisseurs d’accès (AFA).Reste à savoir si le prochain gouvernement donnera l’occasion de lancer un véritable débat sur les questions technologiques. Et, au Forum, celle d’augmenter enfin le nombre de ses contributeurs internautes.
La semaine prochaine, Le Nouvel Hebdo publiera un entretien exclusif avec Isabelle Falque-Pierrotin.
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