L’opération ‘ un SMS pour l’Asie ‘, qui a vu Bouygues Telecom, Orange et SFR s’entendre pour créer un numéro de téléphone unique pour chaque organisation humanitaire (la Croix-rouge, le Secours populaire, le
Secours catholique), a généré 3,05 millions de messages. Soit, à 1 euro et le prix d’envoi par SMS, 3,5 millions d’euros collectés.Seul problème : le don par SMS surtaxé est interdit en France ! En effet, une recommandation de février 2004 du Conseil supérieur de la télématique portant sur la déontologie des contenus précise que
‘ les services télématiques utilisés dans le but de faire appel à la générosité du public ne doivent en aucun cas user de la fonction kiosque comme moyen intrinsèque de paiement des dons. ‘Ce texte n’a pas valeur de loi, mais les opérateurs peuvent se plaindre au CST suite à une infraction à certains de ses articles. C’est ce qui se passe en matière de pornographie, la recommandation interdisant aux éditeurs de contenus
de ‘ mettre à la disposition du public des messages à caractère violent ou pornographique ‘. ‘ Régulièrement, explique Etienne Wery, avocat aux barreaux de Paris et
Bruxelles et auteur d’un
article récent sur le don par SMS, des plaintes sont déposées par les opérateurs qui décâblent des dizaines de numéros. Ce sont des choses qui arrivent
plusieurs fois par mois. La pratique est entérinée par le CST à chaque fois. Ce n’est pas une loi, mais une norme. ‘Dans le cas des dons par SMS, les opérateurs se sont associés à l’opération. S’il y a bien entorse à la recommandation, ‘ difficile de les imaginer porter plainte contre eux-mêmes ‘. Et,
d’un point de vue moral, difficile aussi d’imaginer quelqu’un contester l’initiative.
Des numéros réservés aux associations caritatives
Mais pour Etienne Wery, cela montre bien qu’en matière d’application du texte, il y a deux poids deux mesures. Et donc, un besoin de clarifier les pratiques. D’autant que ‘ l’Assemblée nationale ne s’est pas
prononcée sur le sujet de la collecte de fonds ‘.L’avocat pointe d’autres failles dans la pratique du SMS humanitaire. Les trois opérateurs français ont renoncé à toucher leur marge dans le cas des trois numéros uniques. Mais les choses ne sont pas aussi claires pour d’autres
initiatives : ‘ Si les gens font des dons par SMS à de petites organisations ou via des sociétés privées qui ont décidé d’affecter pour cela une ligne momentanément, il est moins certain que les
opérateurs acceptent de réduire leur marge. ‘ Car, sans accord explicite, rien n’indique que cette ligne sert un but humanitaire.Dernière ambiguïté : la TVA sur les SMS surtaxés (entre 19 et 21 % selon les pays). En France, le ministre de l’Economie, Hervé Gaymard, a annoncé que l’Etat renoncerait à la percevoir dans le cadre de l’opération
‘ un SMS pour l’Asie ‘. ‘ Ce qui veut aussi dire que l’Etat est juge de l’opportunité de l’exonération de TVA ‘, note Etienne Wery.Un genre d’arbitraire qu’il va falloir atténuer si la pratique du SMS humanitaire devient monnaie courante. ‘ On a été un peu dépassé par le phénomène, reconnaît l’avocat, mais il faut
préparer un cadre juridique pour l’avenir. ‘ En créant, par exemple, une famille de numéros surtaxés qui serait réservée aux dons. Ils seraient attribués à des organisations ayant dûment fait à la préfecture leur déclaration
préalable à une collecte de fonds ‘ dans le cadre d’une campagne menée à l’échelon national soit sur la voie publique, soit par lutilisation de moyens de communication ‘, comme le prévoit la loi du
7 août 1991.
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