“Nous devons être réalistes. ” Olivier Huart, directeur général de la branche fixe de Cegetel ne décolère pas. Trois ans après avoir revendiqué le titre de premier opérateur alternatif global face à France Telecom, Cegetel revoit à la baisse ses ambitions sur l’un des secteurs les plus prometteurs : l’accès internet à haut débit.Il n’est plus question d’attaquer le marché grand public, mais plutôt de se replier sur les entreprises. Premier responsable de ce virage stratégique, France Telecom, qui négocie les conditions d’accès à son réseau local (dégroupage). Mais aussi l’Autorité de régulation des télécommunications (ART), qui n’irait pas assez loin dans ses décisions en faveur d’une ouverture rapide de l’accès à la boucle locale, l’accès direct aux abonnés.La France n’échappe pas au débat qui agite les autres pays européens soumis à la déréglementation totale des télécommunications, depuis le 1er janvier 1998. Pour le gouvernement comme pour la Commission européenne, cette dérégulation constitue un enjeu politique et économique majeur.En permettant aux opérateurs de télécoms d’accéder au réseau local, le gouvernement souhaite développer et démocratiser l’usage d’internet. Quant à l’Europe, elle invite les États membres ” à ?”uvrer en vue d’introduire une concurrence accrue au niveau du réseau d’accès local avant la fin de l’an 2000 et de dégrouper les boucles locales pour permettre une réduction substantielle des coûts de l’utilisation d’internet “.Mercredi 4 avril, Erkki Liikanen, commissaire européen en charge des nouvelles technologies, devait livrer un état des lieux du dégroupage en marge du conseil des ministres des télécommunications, au Luxembourg.
L’ART a du mal à arbitrer
En France, les opérateurs alternatifs ont pris à partie l’ART. Réunies le jeudi 26 mars dernier, l’AFOPT (Bouygues Telecom, SFR, 9 Telecom, LD Com, UPC, etc.) et l’AOST (Cegetel, Easynet, Firstmark, Siris, etc.), les deux principales associations professionnelles pour la téléphonie fixe et mobile, ont demandé au régulateur de saisir le Conseil de la concurrence à l’encontre de France Telecom pour ” abus de position dominante “.Avertie 24 heures avant l’action menée par les deux associations, l’ART a fait savoir qu’elle comprenait leur démarche, mais qu’elle ne souhaitait avantager ” ni les uns ni les autres “. La procédure, si elle était lancée, ne devrait pas aboutir avant début juin…La question des coûts est au c?”ur des débats, et les points dénoncés par les opérateurs vont de l’anecdotique au plus crucial. L’anecdotique, avec la nécessité d’acheter des badges pour pénétrer dans les locaux de France Telecom, opération nécessaire pour installer les lignes dégroupées. Ces badges sont vendus 7,6 euros (50 francs) l’unité et uniquement par paquets de 50.Le crucial, ensuite. Alors que France Telecom commercialise son abonnement un peu plus de 10 euros hors taxes, Olivier Huart estime qu’il ne pourra pas pratiquer des tarifs dégroupés inférieurs à 19 euros hors taxes, à cause du niveau de prix des prestations que lui propose France Telecom. Il en déduit qu'” il est impossible de rentrer sur le marché dans ces conditions “.Enfin, les opérateurs alternatifs rappellent que l’ART est ” dotée de tous les pouvoirs de régulation ” depuis le 1er janvier. Aujourd’hui, le dégroupage ne fait pas recette. Sept opérateurs seulement, sur plus de 140 titulaires de licences, ont déposé une demande de dossier auprès de France Telecom. Pour développer leurs services d’accès à internet, les opérateurs alternatifs sont contraints de revendre sous leur marque les offres de France Telecom.
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