Protestations, plaintes déposées, intervention d’un organisme des Nations Unies, saisine du Conseil d’Etat… La polémique que suscite auprès des enseignants et des parents d’élèves le fichier informatique Base élèves 1er degré ne dégonfle pas. Et ce n’est pas la décision du Conseil d’Etat, datée du 19 juillet, qui va calmer le jeu. La plus haute juridiction administrative publie sur son site une décision selon laquelle ce fichier, mis en place en 2004 pour recenser les élèves du primaire, n’est pas conforme à la loi Informatique et libertés sous plusieurs aspects.
« Le Conseil d’État relève tout d’abord que, s’il a bien fait l’objet d’une déclaration à la fin de l’année 2004 auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), ce fichier a commencé à être utilisé sans attendre la délivrance du récépissé de la déclaration, intervenue seulement le 1er mars 2006 », explique l’institution. Conclusion : entre la fin de 2004 et début mars 2006, la mise en oeuvre de Base élèves était illégale.
Autre problème : ce fichier collecte beaucoup d’informations sur les élèves, dans le but de les suivre tout au long de leur scolarité. Parmi ces informations, des données sur l’affectation en classes d’insertion scolaire (Clis), destinées à des enfants touchés par un handicap. Or, ces données sont, selon le Conseil, trop précises. Elles permettent de connaître le handicap dont l’élève est atteint. Dans ce cas, Base élèves revient ni plus ni moins à collecter des données sur la santé, ce qui nécessite une autorisation particulière de la Cnil.
Nuance toutefois : cette critique vaut pour la première version de Base élèves. Contesté par les enseignants et les parents d’élèves sur ce point des données de santé, le fichier avait été modifié par arrêté du gouvernement à l’automne 2008. Depuis cette date, il n’inclut plus ce type de données.
Plus de 2 000 plaintes rejetées
En revanche, la deuxième version du fichier, actuellement en vigueur, compte une nouvelle irrégularité pointée par le Conseil. Elle refuse le droit d’opposition aux personnes fichées. Ce qui est contraire à la loi Informatique et libertés de 1978, qui dit que toute personne dont on collecte des données doit pouvoir consulter le fichier, demander des rectifications s’il y a matière, voire s’opposer à ce que des données y figurent.
Deux critiques souvent émises contre Base élèves sont en revanche évacuées par le Conseil. Cette base de données n’a pas pour but d’être interconnectée avec d’autres et la durée de conservation des données choisie, 15 ans « n’est pas excessive ». Même si, le Conseil le reconnaît, il est possible de « [procéder] à des rapprochements avec des données provenant d’autres fichiers dont les objets sont voisins du sien. A ce titre, le Conseil d’État sanctionne l’omission, dans la déclaration faite à la Cnil, de la mention de ces rapprochements ».
La mise en œuvre de Base élèves est donc loin d’avoir été exemplaire. Et ce jugement du Conseil d’Etat tombe quelques jours après que le procureur de Paris a rejeté plus de 2 000 plaintes de parents d’élèves contre ce même fichier. Les plaignants dénonçaient notamment le non-respect de certaines dispositions de la loi Informatique et libertés. De quoi alimenter encore la polémique.
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