l’Oi+SVM : Android a été créé en 2003 par une société indépendante, Android Inc. Quelle était sa philosophie à l’époque ? A-t-elle changé depuis son rachat par Google en 2005 ?Dave Burke : La raison d’être d’Android n’a pas changé depuis sa création. À l’époque, Android Inc. voulait s’assurer que les opérateurs, les fabricants de terminaux et les développeurs disposent d’une plate-forme ouverte, afin qu’aucun acteur de l’industrie ne puisse freiner ou contrôler la capacité d’innovation de ses concurrents. La solution choisie à l’époque était celle de l’ouverture et donc de l’open source. La seule qui permette à cet écosystème, selon nous, de concrétiser leurs idées et leur stratégie. L’ouverture de la plate-forme Android a été la clé de son innovation et de son adoption par les utilisateurs. Le système est accessible à tous et gratuitement, ce qui constitue un moteur économique majeur pour les fabricants de matériel et les développeurs. Les fabricants peuvent utiliser Android pour proposer un système d’exploitation innovant sur tous types d’appareils qui peuvent prendre toutes les formes imaginables. Du coup, les utilisateurs peuvent trouver facilement le terminal qui correspond à leurs besoins. De leur côté, les développeurs peuvent créer des applications innovantes et les rendre facilement accessibles via l’Android Market.l’Oi+SVM : Vu la réussite d’Android, ses créateurs regrettent-ils leur rachat par Google ? En restant indépendants, auraient-ils rencontré le même succès ?DB : Je pense qu’une partie du succès d’Android vient du fait que Google y a consacré beaucoup de ressources, et le système a bénéficié du talent de nos meilleurs ingénieurs. Ce qui explique pourquoi le système évolue et s’améliore à une vitesse incroyable. En tout cas plus vite que si ses fondateurs avaient continué sans le soutien de Google.l’Oi+SVM : Pour le lancement d’Android, Google nous avait promis que le système ferait baisser le prix des terminaux, dans la mesure où il est fourni gratuitement. Or celle-ci n’est pas flagrante. N’avez-vous pas échoué ?DB : Le marché des smartphones a connu une progression sans précédent ces dernières années. À ce jour, les 35 fabricants partenaires ont mis sur le marché plus de 100 millions d’appareils sous Android. En ce sens, Android a largement participé à rendre les smartphones accessibles au plus grand nombre.l’Oi+SVM : Les appareils sous Android aujourd’hui en circulation ne bénéficient pas tous de la même version du système (1.5, 1.6, 2.0, etc.). Notamment parce que les fabricants tardent à mettre à jour les smartphones de leurs clients. Cette fragmentation ne va-t-elle pas finir par devenir problématique?DB : Nous ne sommes pas d’accord pour dire qu’Android fragmente le marché. Plus de 94 % des utilisateurs sont sous Android 2.1 ou supérieur, soit les versions les plus récentes. On ne peut donc pas parler de fragmentation, mais d’une conséquence logique du rythme d’innovation effréné d’Android. Android étant open source, nous invitons tous les fabricants de matériels à fournir à leurs clients la version de l’OS la plus récente. Ils sont d’ailleurs libres de modifier le système pour personnaliser un certain nombre de fonctions, afin de concevoir des produits uniques qui se différencient des autres. Si quelqu’un souhaite lancer sur le marché un appareil “ Android-compatible ” ou y inclure des applications Google, nous exigeons uniquement qu’il soit conforme à certaines caractéristiques de base. Nous nous assurons ainsi que les applications Android fonctionnent avec tous les terminaux sur lesquels est installé notre système. Pour revenir à la question, nous avons lancé un programme antifragmentation depuis Android 1.0, et celui-ci fait encore partie de nos priorités. Il est essentiel pour nous de délivrer aux consommateurs une excellente expérience utilisateur. Et aux développeurs, un écosystème cohérent.l’Oi+SVM : Comment encourager les fabricants à offrir plus fréquemment les mises à jour d’Android à leurs clients?DB : En fait, dès son lancement en 2007, les membres de l’Open Handset Alliance* ont convenu de ne pas fragmenter le marché des smartphones sous Android. De plus, nous avons travaillé avec certains fabricants, tous membres de l’OHA, sur l’adoption d’une charte qui prévoit la fréquence et le nombre de mises à jour délivrées après chaque nouvelle version d’Android. Pour commencer, nous avons récemment annoncé que les nouveaux smartphones devront obligatoirement bénéficier des dernières mises à jour du système pendant au moins 18 mois, si leurs caractéristiques le permettent.l’Oi+SVM : Les applications constituent un enjeu majeur pour les systèmes d’exploitation mobiles. Pourtant, Google est en retard sur Apple au nombre d’applis. La tendance s’inversera-t-elle un jour ? Ne pensez-vous pas que les tablettes Android pourraient souffrir du peu d’applications optimisées disponibles sur l’Android Market ?DB : L’ouverture de notre Android Market est définitivement ce qui le différencie des autres “ app stores ”. Notre stratégie est basée sur l’idée que tout développeur est libre de participer à Android et de publier des applications sans approbation préalable. Si tant est, bien sûr, qu’il accepte nos conditions de distribution et que ses applications ne violent pas notre politique de contenus. De même, nous pensons que les utilisateurs doivent pouvoir disposer des applications qu’ils veulent, sans aucun filtrage. Au final, on peut dire qu’Android transpose sur l’environnement mobile le modèle de distribution ouvert du Web. Nous avons vraiment travaillé dur pour développer l’offre sur l’ensemble de l’écosystème Android, et nous allons continuer de le faire. Nous soutenons sans relâche les développeurs, qui ont déjà créé plus de 200 000 applications, mais aussi les fabricants, qui ont lancé plus de 310 terminaux Android.l’Oi+SVM : Le couple Intel-Microsoft, omniprésent sur le marché du PC, semble complètement dépassé sur celui des tablettes. Pensez-vous que cette situation marque l’entrée dans une nouvelle ère de l’informatique ?DB : Je pense que nous assistons actuellement à un changement de paradigme dans la façon dont les utilisateurs interagissent avec les ordinateurs. Les appareils mobiles, notamment les smartphones et les tablettes, sont en permanence connectés à Internet. Ils sont utilisables et disponibles à tout instant puisque leur autonomie est supérieure à celle des PC. Et, enfin, ils bénéficient d’interfaces utilisateurs plus intuitives et donnent accès à toutes vos données en quelques secondes grâce au cloud. Tous ces facteurs font des terminaux mobiles les produits emblématiques de notre époque, et nous n’en sommes qu’au début.l’Oi+SVM : À quoi ressemblera Android dans dix ans?DB : Avec Android, notre objectif a toujours été d’offrir aux internautes nomades des produits et des services qu’ils aiment utiliser au quotidien. Nous espérons pouvoir continuer à le faire d’ici dix ans, et ce sur toute une gamme d’appareils qui ne seront pas forcément des smartphones ou des tablettes. C’est dans cette optique que nous avons annoncé récemment le lancement de deux initiatives, Android@Home et Android Open Accessory. Ces deux programmes devraient emmener Android dans des endroits où on ne l’a encore jamais vu. Android Open Accessory permettra aux développeurs de concevoir de nouveaux accessoires inédits pour tous les terminaux Android du marché. Et Android@Home sera un protocole privilégié pour créer des interactions entre les applications Android et les appareils électroniques de la maison. Nous venons tout juste d’annoncer ces deux programmes, mais nous sommes excités à l’idée d’en développer tout le potentiel.* L’Open Handset Alliance a été créée en 2007 par Google pour promouvoir et développer des standards ouverts pour les produits mobiles. L’organisation regroupe des fabricants, des opérateurs et des développeurs.
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