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Laurent Souloumiac (France Télévisions) : ‘ Avec l’ADSL, nous créons facilement des chaînes événementielles ‘

Le directeur du multimédia et de l’interactivité de France Télévisions raconte les réflexions que mène le groupe sur les nouveaux défis qui se présentent à lui, avec l’arrivée de la télévision sur ADSL et sur les téléphones
mobiles.

Laurent Souloumiac a deux casquettes. Cet ancien directeur du portail Voila de France Télécom est aujourd’hui à la fois directeur général de France Télévisions Interactive, qui produit et édite tous les contenus interactifs (sites
Internet, télétexte, SMS…) de France 2, France 3 et France 5, et directeur du multimédia et de l’interactivité du groupe France Télévisions.Il est de fait placé au c?”ur des évolutions qui touchent aujourd’hui le secteur de l’audiovisuel, avec l’arrivée de nouveaux canaux de diffusion pour la télévision, que ce soit sur ligne de téléphone fixe (ADSL) ou mobiles (UMTS).
Entretien.01net. : En matière de télévision sur ADSL, France Télévisions semble assez actif, notamment du fait de son partenariat avec Free pour certains événements sportifs… Quelle est votre stratégie vis à
vis de ce nouveau canal de diffusion ?
Laurent Souloumiac : Notre stratégie nous est quasi ‘ imposée ‘ par la loi, en tant que groupe de chaînes de télévision publiques. On ne peut pas refuser la diffusion de nos chaînes et de nos
contenus sur un support, ce qui oblige quand même à signer des contrats avec des distributeurs ou des opérateurs.Avec Free, nous avons passé des accords non exclusifs il y a un an [pour une reprise des chaînes du groupe dans l’offre de Free et diffuser certains événements sportifs dans leur quasi intégralité, NDLR]. Nous
venons de le faire avec neuf telecom. Nous sommes aussi chez CanalSatDSL et TPSL.Notre but est d’être présents au sein de toutes les offres de télévision sur ADSL. Nous préférons nous distribuer nous-mêmes, par la voie hertzienne ou, bientôt, la TNT, mais, si nous devons passer par des intermédiaires, nous préférons
qu’il soient neutres, et non pas éditeurs de chaînes.Avec Free, vous proposez les chaînes régionales de France 3 sur tout le territoire, ou encore des événements sportifs montrés dans leur intégralité (Roland Garros, Jeux olympiques). Est-ce là une des voies d’avenir de la TV sur
ADSL ?
Oui. Ce qui a changé, avec l’ADSL, c’est que le réseau ne coûte quasiment rien et qu’il offre une capacité quasi illimitée ?” Free annonce 16 000 chaînes possibles sur sa Freebox. Il est donc très facile pour nous,
sans produire des contenus nouveaux, de diffuser plus de programmes. D’où les 20 chaînes régionales de France 3 actuelles, et bientôt 23 [sur un total de 24, NDLR], diffusées sur l’ensemble du territoire.Pour Roland Garros et les Jeux olympiques, c’est un peu pareil [les détenteurs de la Freebox pouvaient par exemple suivre les épreuves des Jeux olympiques sur plusieurs chaînes, idem pour les matchs de Roland Garros,
NDLR].
Aujourd’hui, nous achetons des droits coûteux, nous ne diffusons qu’une partie des images sur deux chaînes.Avec l’ADSL, nous créons facilement des chaînes événementielles pour toutes les images déjà produites. C’est un canal très souple. Nous voulons reconduire ces initiatives l’année prochaine, à la fois sur le sport mais aussi sur la
culture. Sur certains festivals de musique, par exemple, nous produisons beaucoup d’images, mais qui sont peu diffusées et à des heures tardives.Une composante de la télévision sur ADSL est la vidéo à la demande (VOD). Où en est France Télévisions sur ce sujet ? Notre réflexion actuelle se divise en trois segments : le sport, avec quelques résumés, l’information, qui colle bien au concept de VOD, et l’ensemble des autres programmes. Un secteur reste à l’écart pour le moment, c’est le film.
Nous avons quelques droits de VOD sur certains films, mais nous estimons que notre rôle est plutôt de proposer des fictions, des documentaires, des magazines, de l’info, du sport, des programmes qui représentent bien la chaîne. Nous travaillons sur
ces pistes, mais nous n’avons pas encore cherché à mesurer l’intérêt des téléspectateurs. Soyons clair : on ne sait pas encore ce qui va marcher.Quel prix faire payer pour ce type de service ? Et faut-il que les diffuseurs créent des programmes spéciaux pour la VOD ?Nous considérons, sauf exception, que c’est l’événement télévisé qui va faire l’événement VOD, donc nous n’envisageons pas de production spécifique. Si une personne a raté le deuxième épisode de la série Franck Riva, elle recourra à la
VOD.Sur les prix, nous ne savons pas. Nous ne nous interdisons pas de faire du payant. Le peu de contenu que l’on a déjà sur MaLigneTV [le service de TV sur ADSL de France Télécom, NDLR] est payant. Nous proposons des
documentaires issus des trois chaînes, mais nous l’avons fait uniquement pour être présents.Il faudra tester et voir aussi quels sont nos coûts, même sans production spécifique. Notre avantage, en tant que service public, est que chaque segment de notre offre n’a pas d’obligation de rentabilité. Je ne sais pas ce que l’on
fera, je le répète, mais on peut se dire par exemple que le journal télévisé à la demande sera gratuit, ou encore les émissions culturelles.La vidéo sur les mobiles arrive, avec le lancement de la 3G. Quelle est la position de France Télévisions sur ce nouveau canal de diffusion ? Confiante ou prudente ?On y croit beaucoup. Pour deux raisons. Le mobile est un canal nouveau et qui induit une consommation différente : c’est une raison d’y croire. Deuxième argument : les mobiles sont renouvelés tous les dix-huit ou vingt-quatre
mois. D’ici trois ou quatre ans, il y aura peut-être 20 millions de mobiles UMTS, qui sait ?Nous pensons qu’il faut d’une part avoir des chaînes à diffuser en direct et, d’autre part, des programmes courts en VOD. Dans ce deuxième cas, il faut avoir éventuellement une création spécifique, mais surtout reformater des programmes
existants, tels le journal télévisé.Du fait de ces nouveaux réseaux, comment peut évoluer l’interaction entre les téléspectateurs et les chaînes de télévision ?La véritable interactivité aujourd’hui, c’est le téléphone portable, qui permet d’envoyer des messages. Ce que vont apporter les nouveaux réseaux, ADSL comme UMTS, c’est une nouvelle forme d’interactivité, que nous testons actuellement,
une sorte d’équivalent de la libre antenne en radio : le téléspectateur participe à une émission via sa webcam, via la visiophonie sur UMTS.C’est une idée que teste actuellement France 5 avec l’émission C.U.L.T : les gens peuvent contribuer à l’émission en envoyant des vidéo-mails, en intervenant en direct avec leur webcam. On sent qu’il y a un potentiel, mais le
mesurer et le chiffrer n’est pas aisé.Les nouveaux réseaux offrent un mode d’expression aux téléspectateurs, qui n’est plus limité à du texte. Se pose néanmoins la question du droit à l’image avec ces MMS vidéo et autres, comme s’assurer que la personne est bien celle
qu’elle prétend être, ou encore que ce qui passe à l’antenne est libre de droit.

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Propos recuillis par Guillaume Deleurence