Le fonds d’amorçage de 90 millions d’euros destiné aux jeunes entreprises vient d’être officiellement lancé par Bercy. Si le milieu se félicite du coup de pouce du gouvernement, les esprits chagrins ne peuvent s’empêcher de regretter que l’État soit tenu de prendre le relais de l’investissement privé.Et pour cause… Depuis le début de l’année, le financement dit d’amorçage(1) ne compte qu’un exemple : Apx Computer, société informatique spécialisée dans la sécurisation des infrastructures.La société lyonnaise a levé 2,3 millions d’euros auprès de Siparex Croissance, Siparex Développement et Avenir Entreprises. L’amorçage et l’early stage
(2) sont aujourd’hui les étapes de développement les plus délicates.Les derniers relevés de Chausson Finance démontrent une forte baisse des investissements en premiers tours (amorçage et early stage inclus) sur les six premiers mois 2001 : 97 sociétés technologiques ont attiré des fonds, contre 173 au semestre précédent, les montants investis diminuant de 32 %.Les statistiques du dernier semestre ne sont pas établies, mais un faisceau d’indices laisse penser qu’il n’aura guère été meilleur.
L’amorçage ne paie plus
L’amorçage connaît ses plus basses eaux, tant pour des raisons structurelles que conjoncturelles. Ce stade de financement n’intéresse pas les grosses pointures du capital-risque.Pierre-Yves Dargaud, PDG du fonds d’amorçage Access2net, ne mâche pas ses mots : ” Il s’est créé un écosystème mettant en jeu des rémunérations juteuses, pour les banquiers d’affaires et les capitaux-risqueurs. Dans l’amorçage, où se jouent de petits tickets, il est difficile de rémunérer grassement un professionnel.”La crise économique n’arrange rien. L’an passé, le capital-risque s’est concentré sur les sociétés déjà en portefeuille. Certains acteurs ont même tari leur source. Access2net n’a pas réalisé d’investissement direct depuis FinanceActive, site dédié à la gestion de la dette, en avril 2001.Dans ce contexte, le lancement d’un fonds alloué ?” en partie ?” à l’amorçage fait figure d’événement.Mais Techfund Capital Europe, une émanation du fonds américain homonyme, qui entend consacrer la moitié de ses moyens à l’amorçage, peine à monter son tour de table. Jean-Michel Barbier, directeur associé (un ancien de Thomson-CSF Venture), évoque son chemin de croix pour lever 60 millions d’euros : ” Nous peinons à convaincre des financiers et nous nous tournons vers des partenaires industriels comme EDF, Thomson Multimedia. Pourtant, l’amorçage est porteur, justement parce qu’il y a peu d’acteurs et que les TRI [taux de retour sur investissement, ndlr] sont élevés.” Parallèlement, le deal flow (volant de demandes de financement) a diminué d’un tiers.
Exceptions
Sofinnova Partners, dont les investissements ont augmenté de 18 % en 2001 pour atteindre 46 millions d’euros, fait figure d’exception. Mais sur 12 projets, 3 seulement concernaient l’amorçage. De son côté, I Source Gestion ?” qui a l’Inria, Axa Private Equity, et CDC-PME à son capital ?” a lancé 3 fonds en 2001.Les structures plus modestes souffrent, ou se repositionnent. Seeft Ventures, un fonds de 23 millions d’euros, mise sur le réamorçage, dossiers délaissés par leurs investisseurs historiques. Son directeur général, Régis Saleur, se défend de s’apparenter aux fonds vautours : ” Nous tenons plus du pompier que du fossoyeur. Nous donnons les moyens à une entreprise de poursuivre un projet près d’aboutir, qui a développé un produit, qu’elle ne peut commercialiser faute de cash. “D’autres se risquent à la concentration. En décembre 2001, Access2net a acquis ADC (Alliance Développement Conseil), un spécialiste de l’amorçage. Certains fonds tenteraient de s’allier à de plus puissants acteurs, pour mutualiser les risques. ” Autres temps, autres m?”urs”, souligne laconiquement Pierre-Yves Dargaud.(1) Levée de fonds intervenant avant le premier chiffre d’affaires significatif
(2) Levée immédiatement consécutive à l’amorçage
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