- Une nouvelle ère pour les sociétés de services
- Les multiples retombées géopolitiques des révolutions arabes
- Un volontarisme affiché en matière d’offshore
- La volonté d’entreprendre toujours d’actualité
- Un gisement de compétences mal exploité
La Tunisie est le pays du Maghreb qui suscite le plus d’espoirs. Libérée de près d’un quart de siècle de dictature, elle se rêve en “ Bangalore de la Méditerranée ”. Et possède pour cela un certain nombre d’atouts. Cette nation de dix millions d’habitants ? parmi lesquels un quart de francophones ? forme 65 000 diplômés du supérieur par an, dont 61 % de femmes. Elle serait aussi l’une des destinations les plus compétitives de la zone Euromed, avec des coûts de 30 % inférieurs au rival marocain. Pourtant, quelque quinze mois après la Révolution de jasmin, le bilan est contrasté. Manquant de légitimité, le gouvernement de transition n’a mené, en 2011, aucun projet d’envergure concernant les technologies de l’information et de la communication (TIC), et ce, en dépit du grand nombre d’anciens dirigeants de sociétés informatiques dans ses rangs.En décembre 2011, un nouveau gouvernement provisoire sort des urnes. Le secrétariat d’Etat en charge des TIC devient alors un ministère à part entière. A sa tête, Mongi Marzouk, diplômé de Polytechnique et de Telecom Paris, précédemment directeur du pôle modélisation des réseaux chez Orange. Pour l’heure, sa réputation de bosseur est intacte. Trois mois après sa prise de fonction, l’appel d’offres pour l’attribution d’une licence fixe et 3G à un troisième opérateur télécoms était lancé. Selon toute vraisemblance, elle devrait être attribuée à Tunisiana. L’Administration tunisienne a également l’intention d’ouvrir les chantiers de la numérisation et de la gestion électronique de documents (GED), ses archives étant encore surtout au format papier (ce qui a permis au clan Ben Ali d’en détruire beaucoup).
Un plan national en faveur de l’offshore
Mais c’est surtout du côté du secteur privé que les espoirs se tournent. Les acteurs du numérique employant plus de 100 personnes sur le sol tunisien (HP, Sungard, Business & Decision, le consortium Get’IT, la SSII Oxia…) se sont fédérés au sein de l’Association tunisienne pour la communication et la technologie (Tact, en anglais). Celle-ci a lancé, avec le soutien financier de l’Etat, sa Tact Academy. Il s’agit de proposer aux primo-demandeurs d’emploi une formation certifiante d’un an dispensée en alternance. La première promotion compte 200 apprenants.L’association souhaite également que les investisseurs étrangers s’engageant à créer des emplois bénéficient d’une exonération des charges sociales les deux premières années ainsi que de tarifs préférentiels sur les coûts télécoms et la location de bureaux au sein des deux technopoles dédiées aux technologies de l’information ? El Ghazala et Sfax ? et de sept cyberparcs. Des subventions à l’embauche, à la formation et à la certification (CMMi, ISO, Itil…) sont envisagées. Ces mesures devraient être formalisées dans le cadre d’un plan national en faveur de l’offshore.Sur le plan conjoncturel, si le PIB a chuté de 2,2 % en 2011, les services non marchands ont, eux, enregistré une croissance positive au dernier trimestre de l’année. A la différence du tourisme, il n’y a pas eu de chute de l’activité IT. Si HR Access a procédé à des licenciements, Sungard se renforce en Tunisie, où il emploie près de 500 ingénieurs. Pour Khaled Ben Driss, directeur de la division ingénierie logicielle de la SSII Oxia, les prestations nearshore ne souffrent pas trop de la crise européenne. “ L’année 2012 n’est pas le remake de 2009. Les échanges avec la France se sont bien maintenus, et nous allons renforcer notre effort commercial sur le second semestre. ” Selon lui, la crise pourrait même inciter à recourir davantage au nearshore. D’autant que le cours du dinar est passé d’un taux de change avec l’euro de 1 à 1,85 à un taux de 1 à 2, ce qui rend le pays encore plus attractif.Pour autant, Khaled Ben Driss ne se positionne pas sur le low cost, mais sur le best cost. “ Sur la partie R&D, les prix sont divisés par trois et non par dix. Nous mettons surtout en avant la qualité des processus, les tests et l’homologation. ” La jeune association professionnelle itSMF Tunisia tenait d’ailleurs sa première conférence annuelle mi-mars sur ce sujet.
Contrer la fuite des cerveaux
Le pays a aussi opté pour l’open data, créant le groupe de réflexion Opengov.tn. Enfin, un écosystème de start up émerge, avec la mise en place d’incubateurs (Wiki Start Up) et de business angels. Deux introductions en Bourse ont eu lieu en 2011 : Telnet, SSII certifiée CMMi 5, et Hexabyte, fournisseur d’accès.En revanche, Khaled Ben Driss déplore que la fuite des cerveaux se poursuive via des filières organisées et des chasseurs de têtes. “ La circulaire Guéant ne fait que retarder les départs. Nous formons des ingénieurs qui partent dès qu’ils ont de trois à cinq ans d’expérience. Ce qui a des conséquences sur le middle management. ” Mais pour Jean-François Renault, fondateur d’Offshore Boosting, la circulaire a envoyé un signal fort aux jeunes diplômés tunisiens. “ Ils ont pris conscience que le coût de la vie en France et les frais cachés rendaient le départ moins intéressant. D’autant qu’il y a, ici, le défi d’un pays à reconstruire. ”
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