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La société de l’information ? En pleine régression…

A écouter les acteurs des nouvelles technologies, on se croirait dans une cour de maternelle. Les technologies de l’information, ça encourage les comportements infantiles ? Faut croire…

Je rentre du CeBit, endroit d’autant plus triste que la gueule de bois actuelle des technologies de l’information l’a figé. Pas beaucoup de nouveautés. Aucun enthousiasme. Pourtant, une chose n’a pas changé.Pas une entreprise qui ne se présente comme leader de quelque chose. De son marché. De son segment de marché (nuance obscure). De son domaine. De sa catégorie. De son quartier. Avec, en prime, l’estime des autorités constituées, Vatican compris, et de sa concierge. Pas une qui ne nous promette des lendemains qui chantent.Pas une qui ne nous dise : ” Ça y est ! Je l’ai, le logiciel au bifluorure de “trucmuche”, la puce à valvulation annulaire, le service en ligne jamais vu… qui va changer la face du monde. “

En filigrane, la promesse d’un bonheur libéral à toute épreuve, paradis du plein emploi, des dividendes massifs et de la productivité maximale pour les employés, qui n’en demandent pas tant.Autre caractéristique, tous ces ténors sont très forts pour nous expliquer que leurs concurrent, ho ! là, c’est des minables, au bord de la faillite, rien ne marche, des ratés en somme.Ce n’est plus une industrie, c’est une cour de récréation. Des comportements de mômes chez des gens qui dirigent des entreprises multinationales multimilliardaires. Des mômes qui rentrent de l’école et qui racontent à leur maman comment ils ont eu des bonnes notes, et qu’ils sont les plus forts, et qui affichent un besoin dément d’être aimés et appréciés et reconnus. De la part de grands PDG ? Je rêve !Je cauchemarde plutôt lorsque je vois que, côté investisseurs, boursiers, financiers de tout poil, c’est idem. Ta croissance baisse, “j’te cause plus, t’es plus d’ma bande.” Ils revendent quelques millions d’actions… d’entreprises hyperprofitables, pas de doute. Mais les choses ne se sont pas déroulées exactement comme dans leur beau rêve : “Alors, d’abord, j’achète des actions, et après, je suis riche.”Moins drôle, des vagues de licenciements, des gens qui trinquent. Dans les jeux d’enfant, tout le monde se relève à la fin en disant : “J’étais mort pour de faux.” Et là ?Mêmes enfantillages chez nos politiques : on va mettre douze pauvres PC en réseau et on va réduire la fracture sociale ; faut faire simple, c’est bien connu. Ben voyons !Tout cela ne relève pas d’un discours rationnel, mais d’une surenchère permanente à l’autocélébration infantile. Faut-il y voir la conséquence du fonctionnement particulier du monde en réseau ? Selon Freud, le très jeune enfant vit dans un monde instantané et sans espace autre que celui de son corps.Les réseaux offrent une structure comparable. Tout est à portée de main, où que ce soit et tout de suite. La comparaison devrait s’arrêter là. L’enfant au berceau ne dispose daucun pouvoir réel, tandis que les entreprises, les investisseurs, les gouvernants, façonnent en partie nos vies, ou du moins les influencent.On a envie de leur dire : ” Grandissez un peu ! “Prochaine chronique le jeudi 12 avril 2001

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Renaud Bonnet