Elle est loin, la belle insouciance des informaticiens ! Il y a encore dix-huit mois, si un poste ou un salaire ne leur convenait plus, il leur suffisait de démissionner tant le marché était porteur… Mais aujourd’hui, autour de la machine à café, la morosité règne. Dans les SSII, les intercontrats se multiplient et concernent parfois le quart des effectifs. Chez les constructeurs, les éditeurs ou les opérateurs télécoms, de nombreux licenciements ont été annoncés. Et même si ces plans sociaux ne touchent pas la France, ils entament sérieusement le moral des troupes. “Il ne se passe pas quinze jours sans qu’un consultant nous annonce son départ. On a l’impression que tout le monde quitte le navire avant qu’il ne coule… Ceux qui restent, faute d’opportunité, calculent les indemnités qu’ils toucheront en cas de licenciement”, explique la salariée d’un cabinet de conseil.
Difficile de rester motivé !
Une sinistrose renforcée par le gel des rémunérations, voire leur baisse.“Les parts variables dégringolent, la participation à l’intéressement s’est évanouie, et les stock options ne valent plus rien”, constate Eric Wuithier, consultant associé chez Towers Perrin, société de conseil en ressources humaines et rémunération. Difficile, pour les salariés, de rester motivés. D’autant que “les sociétés de services serrent aussi la vis sur les remboursements de frais. Jusqu’alors, ils servaient, à la limite, de complément de salaire. Et cela pèse sur les salariés se déplaçant fréquemment”, ajoute Ivan Béraud, secrétaire général du Betor-Pub (CFDT).Dans les entreprises utilisatrices, pour abaisser la masse salariale et attendre de voir s’ils sont maintenus, certains projets sont sous-traités à des SSII. Dans les couloirs, les rumeurs sur l’externalisation de certains pans du service informatique commencent à circuler… L’incertitude gagne. Et le syndrome du survivant, qui touche les salariés restés en poste, s’immisce lui aussi. Avec de terribles conséquences pour les entreprises. Les salariés n’ont plus l’esprit au travail, trop occupés à commenter les dernières rumeurs. Leur productivité baisse en même temps que leur loyauté. Notamment quand l’entreprise tente de pousser certains au départ par des moyens plus ou moins détournés… “L’ambiance est étouffante, et venir le matin devient une véritable corvée. Je ne m’investis plus autant dans mon travail”, explique l’ingénieur d’une SSII. Ce syndrome pourrait bien réduire à néant tous les efforts déployés par les DRH pour fidéliser leurs collaborateurs et les faire adhérer à un projet d’entreprise.
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