Première boussole de l’économie, les marchés financiers peuvent-ils repartir ? Le 11 septembre n’a pas mis à mal les réseaux et le système de règlement-livraison des négociations boursières. Les grandes institutions financières s’étaient depuis longtemps armées contre les risques d’une crise majeure. Le fantasme du fameux ” bug de l’an 2000 ” aura finalement été salutaire.
Un système de doubles
Sur les grandes places financières, un système de doubles avait été mis en place . “ Ce dernier fonctionne à trois niveaux “, explique Franck Passavent, responsable de la sécurité des données boursières chez e-Fininfo. Le premier niveau est celui de l’information. Les établissements financiers diversifient leurs sources d’information. En cas de défaillance de l’une, ils restent en contact avec l’actualité financière mondiale. Le deuxième niveau est celui de la transmission des données. Toutes les lignes de passation d’ordres et de règlement-livraison sont systématiquement doublées afin que l’établissement soit à chaque instant 100 % opérationnel. À cela s’ajoute un mécanisme de sauvegarde automatique qui fonctionne en permanence. Enfin, le troisième niveau concerne le stockage des données.Par précaution, dans les grands établissements les mêmes données sont essaimées géographiquement dans au moins trois salles blanches différentes. Un tel dispositif explique pourquoi l’incendie à Paris de la salle de marché du Crédit lyonnais, il y a deux ans, n’eut aucune conséquence. “ À cela s’ajoute une solidarité de place“, explique un investisseur. Généralement, les salles de back office des banques new-yorkaises ?” là où se passent la vente et l’achat des titres et la comptabilité en temps réel des comptes des investisseurs ?” sont localisées dans le New Jersey ou le Connecticut. Ainsi, le courtier en ligne Charles Schwab, dont les bureaux étaient situés dans l’une des deux tours du World Trade Center, souligne que ses services refonctionnent normalement.En revanche, les petits courtiers américains n’ont pas les moyens de doubler leurs infrastructures. Et le SIPC (Securities Investor Protection Corporation), organisme officiel de protection des investisseurs américains qui peut, après examen des dossiers, indemniser les clients des établissements mis en faillite, a déjà été saisi. Toutes ces dispositions expliquent pourquoi la cotation à Wall Street a repris lundi 17 septembre.La solidité de l’architecture informatique était un préalable à la résistance des valeurs. Mais à terme, quelles seront les conséquences profondes des événements sur une planète financière qui était déjà grippée ? Les décisions des autorités monétaires et bancaires ont grandement soulagé les marchés. Avant même la réouverture de Wall Street, l’injection de dizaines de milliards de dollars de liquidités sur les marchés obligataires avait déjà donné la mesure du volontarisme international. Mieux, les locomotives de l’économie de marché pourraient, en une sorte d'” effort de guerre “, adapter leurs politiques budgétaires à la nouvelle donne internationale.
Aménagements fiscaux
Washington et Paris évoquent des aménagements fiscaux et budgétaires ad hoc. Enfin, l’assouplissement du carcan réglementaire boursier, qui pourrait perdurer, a permis à des sociétés du secteur technologique de racheter à bon compte leurs propres actions (Intel et General Electric). Reste que ce volontarisme ne peut inverser une tendance. “Nous avions déjà ajusté nos charges à la demande, en réduisant de 20 à 25 % nos effectifs. Nous n’avons pas de nouveau plan de suppression de postes. Mais la visibilité est faible, et le marché a compris que l’incertitude était plus grande sur les technologiques. Ces clients-là vont être fragilisés“, admet Jean-Yves Hardy, PDG de Valtech, une société française de conseil qui réalise le quart de son activité outre-Atlantique, et dont le capital est à dominante de fonds anglo-saxons.Cet effet de dominos peut être ravageur. Les résultats des entreprises, guide premier des marchés financiers, vont pâtir de la crise. Les premiers profit warning post-attentats en témoignent. Jusqu’à quand ? “Dans notre métier, les applications de confort peuvent être reportées, mais les contrats stratégiques, les plus chers, sont plus délicats à suspendre. Ce business, outre-Atlantique et en Grande-Bretagne, est très réactif. Je parie que la Bourse, qui sanctionne aujourd’hui notre sensibilité aux États-Unis, nous permettra de rebondir dans six mois grâce à notre présence américaine“, avance Jean-Yves Hardy. Comme pour lui donner raison, des premières recommandations à l’achat se font jour. Cap Gemini, Wanadoo, Alcatel, Oracle, Vivendi Universal font à nouveau l’objet d’audacieux avis positifs.
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