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La peur du vide légal

A la une des journaux, au sommet des tours de La Défense, dans les commentaires des grands patrons, les juges sont devenus omniprésents. Un jour, c’est…

A la une des journaux, au sommet des tours de La Défense, dans les commentaires des grands patrons, les juges sont devenus omniprésents. Un jour, c’est le Conseil supérieur de l’audiovisuel qui botte en touche en renvoyant aux magistrats du Conseil d’État le soin de mieux cerner l’actionnariat de Canal Plus.Le lendemain, c’est au nom du “respect de la liberté d’entreprendre”, que les juges du Conseil constitutionnel défont les petits arrangements du gouvernement avec le parti communiste sur la loi de modernisation sociale. Sans compter la démission du juge Halphen.Le jour suivant, c’est tout l’état-major de la Société générale qui est poursuivi. Folle semaine où l’on voit un ministre des Finances venir à la rescousse de “l’honnête” Daniel Bouton, patron de la Générale, quelques heures seulement après sa mise en examen !Le lien entre un arrêt du Conseil d’État, une décision du Conseil constitutionnel et une instruction judiciaire est ténu. Mais tous interprètent la loi. Or il apparaît que les juges sont placés, de facto, en clarificateurs des règles du jeu économique.Le Conseil constitutionnel a censuré la nouvelle définition des licenciements économiques car, en raison de ses ambiguïtés, elle conduisait inévitablement les entreprises et les syndicats à s’en remettre à l’appréciation des tribunaux.Dans une pétition, 56 patrons demandaient plus de clarté. Les sages les ont entendus. Les banques n’ont pas eu cette chance. Alors qu’elles réclamaient depuis longtemps auprès de la Commission bancaire des précisions sur les textes sur le blanchiment, il aura fallu attendre cette rafale de mises en examen pour voir Laurent Fabius s’interroger sur une évolution de la loi de 1996.La vie des affaires est devenue complexe et le législateur et le régulateur s’en remettent trop souvent aux juges. Une pratique qui atteste des difficultés des politiques à compren-dre l’économie de marché.

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Jean-Jérôme Bertolus