D’un côté, l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) lance une campagne de publicité visant à convaincre de l’importance stratégique, pour une entreprise, d’un dépôt de brevet. De l’autre, la question de la brevetabilité des logiciels tarde à être résolue. En effet, la proposition de directive promise pour cet automne par la Commission européenne ne devrait finalement pas être émise avant la fin de l’année, reconnaît-on dans le petit monde de la propriété intellectuelle.C’est la Commission elle-même qui a demandé à la Convention européenne des brevets, réunissant 20 pays, de patienter avant de modifier l’article 52C, preuve de l’acuité des débats en la matière. Cet article de la Convention de Munich, signée en 1973, précisait que le logiciel est une invention non brevetable, contrairement aux pratiques en vigueur aux États-Unis et au Japon. Le retard accumulé par la Commission est relatif, puisque la Convention européenne des brevets n’officialisera pas les brevets logiciels avant sa prochaine conférence diplomatique en juin 2002. Au grand dam des partisans du logiciel libre, au rang desquels figure notamment l’Association francophone des utilisateurs de Linux (Aful).
Clarifier les textes en vigueur
Pour l’heure, l’Office européen des brevets (OEB) considère que toute invention faisant intervenir un élément technique peut faire l’objet d’un brevet, tandis que les écritures mathématiques et algorithmes relèvent du droit d’auteur. Mais la notion d’élément technique reste suffisamment floue pour permettre d’ores et déjà l’attribution de quelque 30 000 brevets à des sociétés comme Renault ou Alcatel. C’est donc cette définition que devrait clarifier la proposition de directive européenne. Stéphane Fermigier, président de l’Aful, estime que “l’OEB a détourné la loi “. Aussi va-t-il jusqu’à réclamer une enquête sur ses agissements, quitte, explique-t-il, à “limoger le président en place” ! Au contraire, les partisans de la brevetabilité souhaitent, au nom de la mondialisation, une harmonisation de la législation européenne avec celle des États-Unis, qui permet de breveter non seulement la technique, mais encore la commercialisation liée au logiciel. Des pratiques contraires à la culture européenne et qui suscitent une controverse au sein de la Commission. En débat notamment : le risque d’instaurer une position illégale de monopole de certaines entreprises dès lors que les logiciels de ces dernières, protégés par leur brevet, deviendraient de véritables standards.En France, le gouvernement multiplie les consultations. Après le rapport Carcenac (en avril 2001), qui se prononçait en faveur de l’utilisation des logiciels libres dans la fonction publique, la dernière étude émanant de l’Académie des technologies (publiée en juillet dernier) ?” une association indépendante ?” argue en faveur des brevets logiciels. Stéphane Fermigier reproche à ses auteurs d’avoir consulté les responsables des grandes entreprises au détriment des partisans du logiciel libre.
Bercy commande une autre étude
Est-ce ce manque d’impartialité qui aurait amené le ministère de l’Économie à commander une autre étude ? Seule assurance pour l’instant, la lutte pour les logiciels libres n’est pas pleinement perdue. Le président de l’Aful reconnaît cependant que ses moyens d’actions pour contrer les pressions de grands groupes sur le gouvernement sont limités, en dépit dune pétition réunissant plus de 80 000 signatures.
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