Quatre mois avant la remise des conclusions de son rapport, la Mission Lescure a tenu à faire un point sur le travail accompli depuis son lancement en septembre dernier. Aurélie Filippetti, ministre de la Culture, et Pierre Lescure, président de la mission éponyme, ont donc fait un rapport précis des auditions réalisées et, surtout, de celles qui restent à faire.
Comme l’a rappelé la ministre, « les outils et les mécanismes mis en place dans les années 1980 […] sont bousculés par les modes de création et de diffusion numérique, par la transformation qu’opère la révolution numérique sur les relations entre les créateurs, les usagers et les fournisseurs d’accès et de services par internet. » Elle a aussi réaffirmé son objectif qui est de « réfléchir à la redéfinition des instruments de l’exception culturelle à l’ère numérique. »
Les auditions repoussées jusqu’en janvier
Au départ, il était prévu de réaliser le travail en deux étapes : d’abord, les auditions entre octobre et décembre 2012, ensuite, pour la seconde phase, de janvier à mars 2013, la rédaction des propositions. Visiblement, ce calendrier a été un peu trop ambitieux. En effet, sur la centaine d’auditions prévues, la mission n’a pu en traiter que 60. Aussi, la fin de cette première phase se poursuivra jusqu’au 15 janvier.
Pierre Lescure a tout de même tenu à donner quelques détails sur les dossiers. Si la musique, le cinéma et la télévision ont fait d’énormes avancées en terme d’offre légale, le président fait remarquer que la vidéo à la demande (VOD) et le livre n’avancent pas à la même vitesse.
Pour la VOD, Pierre Lescure constate que l’offre continue à accuser du retard. « La plateforme la plus riche, CanalPlay, propose 3 387 films sur une offre globale de plus de 8 000 programmes, pour 9,99 euros par mois. Le manque de « fraîcheur » des films, sortis en salle depuis au moins 3 ans, est un frein important à l’intérêt du public. L’arrivée sur le marché français d’acteurs puissants tels qu’Amazon ou Netflix est annoncée. »
Quant au livre, la mission Lescure regrette son entrée « à reculons » dans le numérique. « Les catalogues sont très incomplets avec 90 000 titres pour 620 000 références disponibles en format papier. Les éditeurs semblent attendre que l’équipement des foyers en liseuses croisse et que les pratiques de lecture numérique se développent. » Il pointe toutefois que « 70 à 80 % des livres de la rentrée littéraire de 2012 ont bénéficié d’une sortie numérique et un grand programme de numérisation de livres indisponibles du XXe siècle doit être initié courant 2013. »
Difficile d’évaluer l’efficacité de la réponse graduée
Lors de ce point étape, la mission a fait quelques remarques sur la lutte antipiratage qui est au cœur des missions de la Hadopi avec la riposte graduée devenue peu à peu la réponse graduée. Pour Pierre Lescure, « l’efficacité de la réponse graduée est difficile à évaluer ».
Pour le président de la mission, « les moyens techniques de contournement de la surveillance mise en œuvre par Hadopi sont nombreux. » Néanmoins, il convient que « Si les tribunaux n’ont prononcé qu’une condamnation pour « négligence caractérisée », l’effet dissuasif des avertissements préalables à la sanction semble corroboré par la faiblesse du taux de réitération et le recul du téléchargement en P2P. »
Mais il reste sur ses positions sur les mesures qui menacent les récidivistes. Pour la mission, elles stigmatisent les internautes, et créent une opposition entre les créateurs et leurs publics qui « dégradent la perception du droit d’auteur et l’image des industries culturelles. […] La suspension de l’abonnement internet, jugée attentatoire aux libertés, est très critiquée et une partie des ayants droit semble prête à accepter sa suppression. Enfin, la notion de « négligence caractérisée », qui permet d’imputer l’infraction au titulaire de l’abonnement internet sans avoir à prouver qu’il est l’auteur du téléchargement, suscite de fortes réserves. »
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