La justice entame sa révolution ! Alors que la réforme de la carte judiciaire fait l’actualité, un projet de ‘ justice numérique ‘ est également sur les rails. Nom de code : e-barreau. Ce projet a
pour but d’améliorer les échanges et la communication entre les quelque 45 000 avocats de France et les 182 greffes des tribunaux de grande instance grâce à l’utilisation d’un réseau informatique privé virtuel (VPN ou
virtual private network).A l’heure actuelle, le système fonctionne déjà pleinement dans les juridictions civiles. Avec l’e-barreau, les avocats n’ont plus besoin de se rendre aux greffes des tribunaux. Toutes les informations concernant les dossiers sont
désormais disponibles sur le réseau : état d’avancement, convocations, dates des audiences, mesures d’instruction…
Des données mises à jour en temps réel
Les éléments sont mis à jour en temps réel puisque directement puisés dans la base de données des greffes. ‘ Avant, pour accéder à un dossier, l’avocat devait se déplacer, explique Serge Saccoccio,
chef du projet e-barreau. Désormais, il ne va pas attendre pour récupérer une décision de justice : il la reçoit dans sa messagerie et peut en informer directement son client. Le but est aussi de permettre un traitement plus rapide
des tâches administratives d’un dossier. ‘Thierry Wickers, vice-président du Conseil national des barreaux ?” représentant les avocats ?”, attend d’ailleurs beaucoup de ce nouvel outil : ‘ Aujourd’hui, les avocats doivent
parfois se déplacer pour une audience administrative pendant laquelle le juge va simplement renvoyer l’affaire dans trois mois, dans l’attente que l’une des parties effectue une formalité. Avec l’e-barreau, nous espérons qu’à terme, lorsqu’une
formalité sera effectuée, cela enclenchera l’étape suivante : pourquoi attendre trois mois si la formalité a été réalisée dans les 48 heures ? Cela permettrait de rendre la justice plus efficace et de faire disparaître les temps
morts. ‘
‘ Faire disparaître les temps morts ‘
Cette révolution ne va pas sans poser de questions. La justice peut-elle se permettre de tout numériser et de ne plus s’appuyer sur le papier ? Au c?”ur du sujet, la question de la sécurité des échanges est cruciale. En toute
franchise, Thierry Wickers balaie la question d’un revers de main : ‘ La sécurisation informatique fait émerger des problèmes qui sont latents actuellement avec les dossiers papier. ‘Et le vice-président du Conseil national des barreaux de décrire : ‘ Aujourd’hui, dans les tribunaux, les dossiers se promènent de bureau en bureau. Ils se baladent sur des chariots et dorment dans les
corridors en attendant une audience. Et que dire des casiers ouverts des avocats où les greffiers déposent simplement les pièces. Dans ces conditions, il n’est pas très difficile à quelqu’un de subtiliser un dossier. D’ailleurs, il suffit de se
souvenir de la disparition, il y a quelques années, de dossiers liés à l’Eglise de scientologie, en plein palais de justice à Paris ! La justice version papier n’est donc pas un modèle de sécurisation ! Mais, sous l’angle informatique, il
est certain que nous devons parvenir à quelque chose de plus abouti. ‘En la matière, Serge Saccoccio se veut rassurant : ‘ Nous avons tout fait pour qu’il n’y ait pas de faille dans le réseau e-barreau. ‘ Le système a été conçu comme un espace
totalement fermé et qui n’est, en aucun cas, relié à Internet. Pour se connecter, l’avocat doit avant tout raccorder son ordinateur à un boîtier de chiffrement qui assure la mise en place d’une connexion sécurisée sur le réseau privé du projet
e-barreau.Outre ce boîtier, l’avocat doit aussi placer sur l’ordinateur qu’il utilise une clé cryptographique (une clé USB équipée d’une carte Sim) qui joue le rôle de contrôleur. La clé contient le nom et le prénom de l’avocat, son numéro
d’identification, son barreau d’appartenance.Cette clé s’accompagne en outre d’un code PIN que seul l’avocat connaît. ‘ Cela fonctionne exactement sur le même principe que la carte bancaire, avec un code personnel, explique Serge Saccoccio.
Le couple boîtier-clé USB garantit donc que c’est bien l’avocat qui se connecte. ‘ Et si jamais celui-ci perd sa clé ou se la fait voler, il peut aussitôt demander l’annulation du code : la clé n’est alors plus
d’aucune utilité. Du côté des serveurs, des sauvegardes régulières sont effectuées tandis que certaines opérations, comme effacer une pièce pour un avocat, ne sont pas permises.
Déjà 1 000 avocats conquis
Quoi qu’il en soit, le projet e-barreau avance à grands pas. Alors qu’il a été lancé au mois de janvier, pas moins de 1 000 avocats sont d’ores et déjà utilisateurs du nouveau système. Après les juridictions civiles,
l’e-barreau se déploie maintenant au pénal avec une brique supplémentaire : la numérisation des dossiers. Tous les greffes de France sont désormais dotés de scanners permettant de numériser les pièces d’un dossier. Les avocats peuvent obtenir
un DVD avec l’ensemble des éléments de la procédure au format PDF, des procès-verbaux aux photos.Avantage de cette copie numérique : grâce à la reconnaissance de caractères, l’avocat peut lancer une recherche sur un mot précis et s’y retrouver plus rapidement. Et pour ceux qui préfèrent le papier, il est toujours possible
d’imprimer tel ou tel élément. La justice numérique pourrait même aller encore plus loin, en particulier avec l’interconnexion des systèmes informatiques de la gendarmerie, de la police et des greffes.‘ Un procès-verbal de la police serait alors aussitôt accessible par tous et les flux de documents iraient beaucoup plus vite, explique Serge Saccoccio, qui souhaite en finir avec le papier.
D’ici à 2009, nous espérons que tout sera dématérialisé ! ‘
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