La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) vient de donner raison à Apple, désavouant sèchement la Commission européenne. Les juges européens ont annulé, mercredi 15 juillet, la décision de Bruxelles qui exigeait à la société américaine de rembourser à l’Irlande 13 milliards d’euros d’avantages fiscaux jugés impayés. La Commission n’est pas parvenue à démontrer « l’existence d’un avantage économique sélectif », selon les juges. Un revers cinglant pour la vice-présidente chargée de la concurrence Margrethe Vestager, surnommée la « tax lady » par le président américain Donald Trump.
#EUGeneralCourt annuls the decision taken by the @EU_Commission regarding the Irish #TaxRulings in favour of @Apple #Apple #EUCommission #StateAid pic.twitter.com/KoF6r1n82S
— EU Court of Justice (@EUCourtPress) July 15, 2020
« Apple doit payer sa juste part d’impôt »
Dans un communiqué, elle a déclaré « étudier avec attention le jugement et réfléchir aux prochaines étapes », mais elle ne mentionne pas de procédure de recours engagée. Généralement, lorsque les affaires font l’objet d’un pourvoi devant la Cour, la décision définitive intervient environ 16 mois après. Donc dans le cas d’Apple, au cours de l’année 2021.
« La Commission européenne maintient son objectif de voir toutes les entreprises payer leur juste part d’impôt », a insisté Margrethe Vestager dans son communiqué.
13 milliards d’euros d’impayés
L’affaire remonte au 30 août 2016. Selon l’enquête de la Commission, Apple a rapatrié en Irlande, entre 2003 et 2014, l’ensemble des revenus engrangés en Europe (ainsi qu’en Afrique, au Moyen-Orient et en Inde) car l’entreprise y avait négocié un accord fiscal favorable avec les autorités de Dublin. La Commission affirmait que le groupe avait ainsi échappé à la quasi-totalité des impôts dont il aurait dû s’acquitter sur cette période, soit environ 13 milliards d’euros, selon ses calculs. Un avantage qui constituait d’après Bruxelles une « aide d’État » illégale, puisqu’elle se faisait aux dépens d’autres entreprises soumises à des conditions moins favorables.
18,4 milliards d’euros de taxes hors États-Unis
L’argumentaire a été réfuté de concert par Apple et l’Irlande. Ensemble, les deux entités avaient fait appel de la décision de la Commission. Apple avait expliqué qu’il était en train de payer 37 milliards de dollars (32,4 milliards d’euros) d’impôts au fisc américain pour les profits réalisés hors États-Unis, dont 21 milliards de dollars (18,4 milliards d’euros) au titre de la période visée par la Commission. Le dernier chiffre d’affaires d’Apple s’élevait à 260,2 milliards de dollars (227,6 milliards d’euros).
D’après Dublin, il n’y avait rien d’illégal. Connue pour ses positions « pro-business », l’Irlande a attiré de nombreuses multinationales, pourvoyeuses d’emplois en raison d’une fiscalité avantageuse.
Une Europe divisée face aux multinationales
Cet arrêt très attendu fait écho à deux autres affaires européennes similaires visant Starbucks et Fiat. En septembre 2019, les juges avaient réfuté les arguments de la Commission européenne concernant la chaîne américaine de cafés, sommée de rembourser jusqu’à 30 millions d’euros d’arriérés d’impôts aux Pays-Bas. En revanche, dans le cas de Fiat, ils avaient donné raison à Bruxelles, qui exigeait du groupe italien le versement au Luxembourg d’une somme identique pour avantages fiscaux indus.
Le désaveu de la Commission de la part de la CJUE intervient dans un contexte où plusieurs pays européens, dont la France, veulent parvenir à une meilleure imposition des géants du numérique, partout où ils réalisent des profits. Néanmoins, dans une UE à 27, où toutes les questions fiscales se décident à l’unanimité, il n’est guère facile de s’entendre.
🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.