L’étau se resserre un peu plus sur le piratage. La Hadopi s’apprête à passer à la deuxième étape de la riposte graduée. Dans les prochains jours, elle enverra le deuxième avertissement, prévu par son dispositif, celui qu’elle destine aux internautes récidivistes, averti une première fois pour avoir mal sécurisé leur accès à Internet et permis le partage de contenus illicites sur les réseaux de P2P depuis leur connexion. Comme elle l’avait annoncé, la Haute Autorité vient de rendre public le contenu de ce courrier, à l’occasion d’une conférence de presse sur son bilan 2010.
Les internautes concernés recevront ce message par voie électronique et par courrier postal en recommandé. « C’est une étape importante, puisque c’est le début de la phase pénale, » précise Mireille Imbert-Quaretta, présidente de la Commission de protection des droits (CPD) de la Hadopi. Terminée la prévention, place à la répression ! Les internautes pris en défaut une troisième fois pourront se retrouver devant le juge, qui décidera de leur infliger une amende, voire de suspendre leur accès à Internet.
A en croire Mme Imbert-Quaretta, les occasions ne vont pas manquer. « Depuis le début de l’année, nous avons déjà constaté des itérations.» Autrement dit, des internautes repérés en infraction après avoir reçu un premier avertissement. Malgré les critiques sur son efficacité, la Hadopi ne chôme pas. Les premiers mois ont été consacrés aux réglages technique et juridique, et la montée en charge a dû se faire progressivement.
« Entre début septembre et fin 2010, nous avons envoyé 70 000 recommandations aux internautes, indique la présidente de la CPD. Depuis le 1er décembre, nous faisons partir 2 000 courriers par jour, soit 10 000 par semaine. » Non sans avoir connu quelques ratés comme ces premiers messages expédiés, mais que les internautes devaient lire en diagonale pour les déchiffrer, en raison d’un problème d’affichage.
2 000 avertissements par jour
On est encore bien loin des 10 000 avertissements expédiés quotidiennement, le palier estimé pour obtenir un effet dissuasif sur le téléchargement illicite. Cet objectif devrait être atteint au premier semestre, annonce la CPD. Qui promet même mieux : « avec le nouveau système d’information, que nous mettrons en place en novembre, nous n’aurons plus de limite au nombre d’avertissements que nous pourrons envoyer ! ».
Pour quels résultats ? A ce stade, la Hadopi refuse de faire le bilan de son action. Elle estime que moins de 10 % des internautes avertis l’ont saisie après avoir reçu un premier avertissement. « Dans 3 cas sur 4, ils nous demandent les œuvres pour lesquelles ils ont fait l’objet d’une notification », confie Mireille Imbert-Quaretta, qui s’amuse aussi des réactions des internautes.
« Certains nous disent que ce n’est pas eux, qu’ils soupçonnent quelqu’un dans leur foyer… » ou bien qu’« il ne s’agit pas de leur adresse IP, alors qu’ils n’ont pas conscience que leur FAI leur attribue une adresse dynamique [renouvelée après une certaine durée, NDLR]. » « Mais ceux qui m’attendrissent le plus, ironise Mme Imbert-Quaretta, ce sont ceux qui disent « c’est vrai, mais je ne le referai plus ». Enfin, dans de rares cas, les internautes avertis affirment que leur accès a été piraté.
Ceux-là pourront bientôt compter sur les logiciels de sécurisation de leur accès à Internet, promis par la Hadopi… et dont la sortie est encore repoussée. Une nouvelle consultation publique d’un mois doit être lancée dans les prochaines semaines, avant que les premières labellisations ne soient délivrées. C’est l’un des chantiers de la Hadopi pour 2011, mais ce n’est pas le seul.
« 2010 a été l’année de la mise en place de la riposte graduée, 2011 sera celle du développement de l’offre légale », promet Marie-Françoise Marais, présidente de la Hadopi. Les premiers labels pour les offres légales seront délivrés au premier trimestre 2011 ; la mise en place d’un portail des offres légales est en phase de réflexion, pour une ouverture avant la fin d’année.
Une fois tout cela en place, il sera l’heure du premier bilan pour la Hadopi. Malicieusement, Mireille Imbert-Quaretta évoque alors (déjà !) la disparition de la CPD. « Soit la pédagogie que nous mettons en place marche, les internautes se tournent vers l’offre légale et nous n’avons plus de raison d’être, soit nous avons échoué. Dans les deux cas, la CPD est amené à disparaître ».
La question en suspend est de savoir quand. La réponse pourrait tomber dès la prochaine élection présidentielle, en 2012.
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