Hier soir mon PC est mort, sur le terrain. En fidèle soldat. Mort d’une guerre qui n’était pas la sienne et qui pourtant se jouait en son coeur. Hier soir mon PC est mort de l’affrontement de deux modèles économiques. Hier soir mon PC est mort, alors qu’il n’avait rien demandé. Et, ce soir, un peu désespéré, je me demande si demain je ne serai pas la prochaine victime.L’histoire a commencé en juillet 2000. Le 18 précisément, lorsque l’honorable site ZDNet décerna son titre de meilleur ” utilitaire ” (programme qui rend service, quoi) à Go!Zilla. Un truc drôlement bien, qui devait me permettre d’accélérer mes téléchargements de fichiers. Et, en plus, c’était gratuit.Sauf que, très rapidement, l’outil s’est révélé être le premier soldat à livrer sa guerre économique dans mon PC. Car, pour vivre, les créateurs de Go!Zilla avaient imaginé un modèle économique de… la mort. Le logiciel était bien gratuit, mais il se permettait d’ouvrir des fenêtres de publicité sur mon écran, histoire de remplir les comptes en banque de ses géniteurs. Le spyware était né.Le spyware est un logiciel espion. Un truc utile d’apparence, gratuit, mais qui s’infiltre au c?”ur de votre ordinateur, traçant vos connexions, les transmettant aux ” marketeux ” les plus fous pour vous renvoyer illico presto des pubs forcément adaptées à vos goûts. C’est le cas des quatre logiciels installés par Kazaa, mais aussi du célèbre Gator, qui a défrayé la chronique l’année dernière.Un peu nigaud, j’ai, pendant presque deux ans, installé sur mon PC ?” le plus souvent à mon insu ?” tous ces logiciels. Qui se livraient une vraie guerre économique, sans que je m’en aperçoive. A celui qui ouvrira en avance sa fenêtre publicitaire, à celui qui remplacera le premier le bandeau de pub de Yahoo! par un truc cochon (c’est à cette occasion que, tel Thomas dans le ” loft “, j’ai découvert ma dualité : à la fois gérontophile et pédophile. Oui, car je n’avais pas précisé : ces logiciels sont prêts à vendre tout et n’importe quoi à qui veut bien payer). Les business models bataillaient ferme pour obtenir mon attention. Moi, je ne voyais rien, mon PC commençait à souffrir.Un peu exaspéré, j’ai téléchargé un nouveau programme. Magique celui-là, Ad-Aware. Il devait nettoyer toutes ces méchancetés qui s’infiltraient dans mon ordinateur. En théorie, car ce seul et unique soldat favorable à mon camp a été la première victime de la guerre. Un spyware l’a tout simplement supprimé de ma machine sans me demander mon avis. La guerre était dure, mais c’était la guerre. Impossible donc d’enlever tous ces programmes maléfiques.Jusqu’à cette soirée où tout à basculé. Gator a ouvert une fenêtre et a provoqué une “erreur générale de protection” (que ceux qui ne savent pas ce que c’est se rassurent, c’est grave, mais un coup d’interrupteur suffit souvent à panser les blessures). Puis c’est ClickTillUWin, un autre spyware, qui a planté. Mon disque dur tournait, tournait, faisait beaucoup, beaucoup de bruit. Et Cydoor, le troisième larron de la bande, a fait pareil. Et, tout d’un coup, mon disque dur s’est arrêté. Plus rien. Jamais. Mon PC était mort.Paix à son âme. Et la mienne ? Après mon ordinateur, lieu d’affrontement de ces modèles économiques pas franchement sérieux, quels seront leurs prochains terrains de jeu ? Et si c’était moi ? Ils vont d’abord s’emparer de mon téléphone portable, puis ce sera mon tour. Mon corps verra des business plans s’échafauder et se détruire. Vive la nano-économie !Je balancerai mon disque dur dans la benne en bas de chez moi lundi prochain. Ni fleurs, ni couronnes.* Grand reporter au Nouvel HebdoProchaine chronique vendredi 24 mai
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