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La France veut construire son cloud souverain avec les technologies américaines

L’idée est de permettre à des sociétés de services françaises et européennes de déployer sous licence les briques technologiques des géants du Web comme Google, Microsoft ou Amazon.

Un nouveau chapitre s’ouvre dans l’histoire mouvementée du « cloud souverain », dont le but — rappelons-le — est de proposer des services d’hébergement « physiquement réalisés dans les limites du territoire national, par une entité de droit français et en application des droits et normes françaises », comme l’indique le « Guide sur le cloud computing à l’attention des collectivités locales ».
En effet, le gouvernement français a proposé aux géants américains du cloud tels Microsoft ou Google, de laisser des opérateurs européens utiliser leurs technologies sous licence, pour résoudre les problèmes de souveraineté liés aux lois extraterritoriales américaines.

« Il se trouve que l’un de nos grands partenaires politique et économique, les États-Unis, a mis en place une loi extraterritoriale qui permet » aux autorités américaines « de récupérer les données » hébergées par les grands fournisseurs de cloud américains, qu’elles soient situées aux États-Unis ou en Europe, a expliqué Bruno Le Maire, en présentant la nouvelle « stratégie nationale pour le cloud ».

Un nouveau label de confiance

Pour échapper à ce risque de captation, le gouvernement va créer un label de « cloud de confiance », qui serait ouvert aux technologies des AWS (Amazon Web Services), Microsoft, Google et consorts, pourvu qu’elles soient utilisées sous licence par des fournisseurs européens ou français de cloud, sur leurs propres serveurs, a expliqué M. Le Maire.

Le gouvernement cherche à accélérer le basculement des entreprises et des services publics français dans le « nuage » informatique, considéré comme un préalable indispensable pour satisfaire aux besoins de l’économie numérisée. Il considère que pour l’instant, les technologies américaines de cloud — de Google, Amazon et Microsoft, mais aussi d’IBM, Oracle, Salesforce — sont « les meilleures », et veut permettre aux entreprises et aux services publics de les utiliser sans risques pour leurs données.

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Lorsque la France a voulu développer une industrie nucléaire dans les années 60, elle a eu recours à de la technologie américaine sous licence, a argumenté Bruno Le Maire.

« Ce que nous avons fait avec le nucléaire dans les années 60 (…) nous le faisons en 2021 sur les données, dans le cadre du cloud souverain avec des licences de technologies américaines au meilleur niveau », a-t-il dit.

OVH le fait déjà

Des accords de licence souhaités par le gouvernement existent déjà, a rappelé de son côté le secrétaire d’Etat au numérique Cédric O. Le fournisseur français de services cloud français OVHcloud propose ainsi sous licence Google Anthos, un logiciel du géant américain qui permet aux entreprises d’utiliser plusieurs plates-formes de cloud différentes pour faire tourner leurs applications.

« C’est quelque chose que nous connaissons bien », a déclaré de son côté à l’AFP Agnieszka Bruyère, chargée du cloud pour la région Europe au sein d’IBM. « Nous avons des briques technologiques qui peuvent être déployées sous le contrôle du fournisseur de services cloud ou du client » comme Watson, le moteur d’intelligence artificielle française d’IBM, a-t-elle indiqué.

Pour le gouvernement, des services cloud européens labellisés « cloud de confiance » vont permettre notamment d’accélérer le passage dans « le nuage » de l’informatique de l’État et des services publics.

« Il nous faut adapter notre administration au XXIe siècle », a déclaré Amélie de Montchalin, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques. « Le cloud permet de développer de nouveaux services publics numériques de manière plus rapide, plus agile, moins coûteuse et plus itérative », a-t-elle déclaré.

Le plan de relance à la rescousse

Le plan français en matière de cloud prévoit également le développement d’une offre 100 % française ou européenne, notamment à travers les projets financés dans le cadre du plan de relance, a précisé M. Le Maire.

Le gouvernement va « identifier des projets industriels de développement des technologies cloud en France », pour l’intelligence artificielle ou le traitement en masse de données (big data), a-t-il indiqué.

Dans un communiqué, le fournisseur français de services cloud Scaleway, filiale de Free/Iliad, s’est félicité de voir le gouvernement privilégier désormais le cloud pour les applications informatiques de l’État.

« C’est un grand bond en avant dans le cadre de la transformation numérique de l’État », a déclaré dans un communiqué son directeur général Yann Lechelle.

Scaleway a annoncé le déblocage de trois millions d’euros de crédits d’utilisation de ses services cloud au bénéfice des 18 000 agents informatiques de l’État, pour qu’ils puissent se former et s’entraîner à l’utilisation de ressources cloud.

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Gilbert Kallenborn, avec AFP