De quel côté de la barrière se trouve Internet ? Le réseau des réseaux peut-il aider à réduire la fracture Nord-Sud, ou bien est-il voué à servir les intérêts des pays riches ?En 2000, la planète comptait 400 millions d’internautes, et seulement 21 % d’entre eux vivaient en dehors de l’OCDE. Le débat semble tranché.Pourtant, les auteurs du 21e rapport mondial sur le développement humain* gardent l’espoir de faire d’Internet un moyen supplémentaire d’aide au développement des pays pauvres. Mais la route est longue.Intitulé ” Mettre les nouvelles technologies au service du développement humain “, le rapport établit sans surprise que le taux d’accès aux lignes téléphoniques est fortement correllé au niveau de développement des pays (mesuré par l’indice de développement humain** ou IDH).
Inégalité des connexions
Ainsi, la Norvège, qui occupe le premier rang du classement IDH, compte 71 % d’abonnés à des lignes de téléphone fixe en 1999, et 62 % d’abonnés à un téléphone mobile, tandis que 19 % de sa population dispose d’un ordinateur connecté à Internet.La France, qui n’est qu’au 13e rang dans l’IDH, compte 60 % d’abonnés au téléphone fixe, 36 % à un téléphone portable, et 4 % d’ordinateurs reliés à Internet.Au Bangladesh enfin, 0,3 % de la population dispose d’une ligne téléphonique, 0,1 % d’un téléphone portable, et personne n’a de connexion Internet, comme souvent dans les 35 pays dont l’IDH est le plus faible.
L’innovation au service de la croissance
Pourtant, le rapport rappelle que ” la fracture technologique ne coïncide pas forcément avec celle des revenus “. Soit, mais on explique aisément le phénomène par des politiques sociale ou économique différentes d’un pays à l’autre. En témoigne le cas d’un Etat de l’Inde, le Madhya Pradesh qui, après avoir établi son propre rapport sur l’IDH, a doublé son budget consacré aux affaires sociales en 1998.Le rapport insiste également sur le fait que si la croissance économique facilite la création d’innovations utiles, le processus peut fonctionner en sens inverse :“A l’instar des investissements consacrés à l’éducation, ceux destinés aux nouvelles technologies peuvent procurer des outils de meilleure qualité et rendre les personnes plus productives et prospères “, expliquent les auteurs.
L’investissement au service des marchés
Mais, hélas, ces investissements se font essentiellement dans les pays membres de l’OCDE, et ils sont surtout conditionnés par les besoins du marché : “L’innovation répond aux pressions du marché, et non aux besoins des pauvres : le pouvoir d’achat de ces derniers est trop mince.”Pour exemple, ” e
n 1998, 29 pays de l’OCDE (19 % de la population mondiale) ont consacré 520 milliards de dollars à la recherche et au développement, soit plus que le PIB cumulé des 30 pays les plus pauvres de la planète. “Il en va de même pour le capital-risque : 103 milliards de dollars ont été dépensés aux Etats-Unis en 2000, contre 1,1 milliard de dollars en France et 3 millions de dollars en Afrique du Sud.
L’union fait la force
Dans ce contexte, les recommandations émises par les auteurs du rapport tiennent sans doute plus de l’utopie que du réalisable.Par exemple, affirmer que ” les secteurs public, privé et associatif doivent s’entendre sur les moyens de segmenter le marché mondial, afin de pouvoir commercialiser des produits technologiques clés à bon marché dans les pays en développement “est certes louable, mais c’est sans compter sur le poids grandissant du secteur privé sur les décisions gouvernementales.Sachant que, aux Etats-Unis, le seul secteur des télécommunications a dépensé plus de 152 millions de dollars pour financer des candidats à la présidentielle en 2000, qui a le plus d’influence sur la politique américaine : le peuple ou l’industrie ?* Rapport du Programme des Nations-Unies pour le développement (Pnud) publié aux Editions De Boeck Université.** L’indice de développement humain tel que défini par les Nations-Unies est calculé en fonction de trois critères : la longévité, la qualité de vie (pouvoir d’achat), l’accès au savoir (niveau d’instruction).
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