La télé web a répondu au défi de l’audience. Pas à celui des revenus.Deux cent cinquante mille euros : c’est la somme qui a convaincu le tribunal de commerce de Paris de prononcer la liquidation de Canal Web. Un montant marginal pour une société qui aura levé cent fois plus d’argent (25 millions d’euros sur trois ans), et ce au bénéfice de la plus médiatique des initiatives francophones sur internet. Riche de dizaines d’émissions en tous genres, doté d’une plateforme technologique de pointe, le bouquet de programmes en ligne s’était, il est vrai, mué en service de diffusion de vidéos sur IP pour les entreprises. Sans que la société n’adapte ses coûts à ses revenus : le petit groupe, fondé par Jacques Rosselin, son actuel PDG, a compté jusqu’à 130 salariés, pour un chiffre d’affaires d’1,5 million d’euros en 2001. Il reste que Canal Web, imaginative, décalée, souvent salutairement impertinente, aura marqué les quelques centaines de milliers d’internautes à l’avoir fréquentée. Cependant, l’audience n’est pas chiffre d’affaires. “On a mis des fortunes sur ce dossier [environ 3 millions d’euros, ndlr], et lorsque la conjoncture s’est retournée, Canal Web a continué à dépenser. Quand nous avons mandaté le Crédit lyonnais pour trouver un partenaire, pas un candidat ne s’est manifesté. La technologie est brillante, l’outil a l’air sympa, mais ça ne se vend pas. Quand un marché n’est pas là…”, lâche Joël Flichy, cofondateur de Galileo Partners, premier financier de la société.La faute au retard du haut débit, à un management dispendieux ? Du côté de l’industriel, on ne forme pas cette analyse. Le dépôt de bilan a résulté directement de la décision de Galileo et de Paribas Affaires Industrielles de ne pas verser les 4 millions d’euros promis pour le troisième tour de table, à l’été 2001. Et Jacques Rosselin n’en décolère pas. “Bernard Maitre répétait à l’envi que Canal Web était un nouveau Canal Plus, et jouait sur le registre un peu paternaliste du capital-risqueur copain. Tout ça pour nous informer par e-mail un 25 juillet, 3 jours après avoir voté une augmentation de capital vitale, qu’il n’y souscrirait pas. C’est irresponsable, non-professionnel.” La faute à la finance ? “Je suis tranquille, on a fait plus que notre devoir”, rétorque Joël Flichy à l’évocation d’un éventuel recours en comblement de passif. En fin de compte, s’agit-il tout bonnement du triste syndrome de l’avant-gardisme essuyeur de plâtre ? Auquel cas, nul doute qu’un nouveau Canal Web sallumera bientôt.
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