En 1991, Gérard Lyon-Caen l’annonçait haut et fort : avec la messagerie électronique, “le strict respect des correspondances a vécu “. Le professeur de droit social évoquait déjà un “ordre technologique qui n’a plus rien de commun avec l’ancienne subordination, car le salarié (…) est surveillé par la machine, à la limite par lui-même, par tous et par personne “. En 2002, dans son second rapport sur la cybersurveillance en entreprise, la Commission nationale informatique et libertés (Cnil) veut limiter les dérives de cette tendance en édictant sept commandements. “Tous les employeurs ne sont pas des inquisiteurs, et tous les salariés ne passent pas leur temps sur internet pour des besoins personnels “, se satisfait Hubert Bouchet, vice-président délégué de la Cnil. Le nombre réduit de plaintes en atteste.
Un expert indépendant des dirigeants et des salariés
Deux préconisations sont mises en avant. La première : inclure, dans le bilan social de l’entreprise, un chapitre “Informatique et libertés” indiquant les mesures de sécurité traçant l’activité des utilisateurs. Ce texte obligerait les instances représentatives à aborder clairement le sujet. La seconde idée, plus originale, est de créer, dans chaque entreprise, un poste de délégué à la protection des données. Un expert indépendant, comme le médecin du travail ou le commissaire aux comptes. “Il doit être impartial et ne peut donc représenter ni les dirigeants ni les salariés “, revendique Hubert Bouchet, qui écarte l’idée d’en confier le rôle aux délégués du personnel.Certes, ces derniers ne sont pas impartiaux. Mais, en vertu de l’article L 422-1-1 du Code du travail, ils ont pour mission de veiller au respect des droits des personnes et des libertés individuelles dans l’entreprise. Pourquoi ne le feraient-ils pas en matière de cybersurveillance ? Pourquoi créer un poste supplémentaire, qui coûtera de l’argent à l’entreprise ? La Cnil espère en fait que ce “médiateur” puisse aussi recevoir les plaintes et servir de “correspondant informatique et libertés “. Mais il y a fort à parier que patrons et syndicats s’opposeront ?” directement ou non ?” à cette proposition. A ce jour, seul le Clusif, susceptible de remplir le rôle, y serait favorable.
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