Quinze ans de négociations et de fantasmes. L’entrée de la Chine, le 11 décembre, au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) met fin à d’interminables discussions entre diplomates et milieux d’affaires. Les uns freinant les seconds, qui s’enthousiasmaient d’aller à la conquête d’un marché de 1,3 milliard d’habitants, quitte à s’asseoir sur les principes démocratiques et le respect des droits de l’homme. Ces questions ne sont pas réglées mais le texte approuvé le 10 novembre par les ministres siégeant à l’OMC, et ratifié ensuite par le Parlement chinois, devrait contribuer à y ancrer davantage l’économie de marché.
Une économie entrouverte
De quoi s’agit-il ? Notamment de la possibilité pour les investisseurs étrangers de prendre des participations dans des sociétés de téléphonie mobile et de services internet. Selon un calendrier très minuté. “Dès le 12 décembre, les étrangers pourront détenir jusqu’à 30 % du capital d’une entreprise de téléphonie mobile ou de service internet qui intervient à Pékin, Shangaï et Canton, explique Me Alexander Lunshof, du cabinet Coudert Frères et spécialiste du marché chinois. Au 12 décembre 2002, cette part grimpera à 49 % et la zone sera élargie à quinze capitales provinciales.” Un an après, les étrangers pourront détenir 50 % de ces compagnies, et cela, quelle que soit leur zone d’intervention.À ce jour, le texte ne prévoit pas que les étrangers puissent devenir majoritaires, alors que c’est le cas dans d’autres domaines industriels. Cette perspective de gestion à parité pose la question de son efficacité dans la pratique quotidienne des affaires, où des situations de blocage peuvent survenir. D’ici là, ce nouveau cadre juridique devrait inciter des opérateurs étrangers, qui agissaient jusqu’ici par le biais de sociétés écrans, à officialiser leurs participations. Tels Microsoft ou Intel, qui ont investi dans des entreprises chinoises détenant des sites internet, via des sociétés off-shore. “Malgré cela, il faut garder à l’esprit qu’en Chine, quoi qu’il fasse, un étranger restera un étranger”, tempère un diplomate français. La détention d’actions ne devrait que simplifier légèrement la vie des investisseurs. Des circonstances qui expliquent peut-être qu’aucun des opérateurs français (France Telecom, Vivendi Telecom Int. ou Bouygues Telecom) n’envisage d’investir ce marché.Pourtant, le jeu en vaut la chandelle. En effet, on comptait, en Chine, 136 millions d’abonnés au téléphone mobile, en octobre, pour seulement 160 millions de postes fixes. Le nombre de portables a progressé de 5 millions mensuellement tout au long de cette année. Les volumes sont tout aussi impressionnants pour internet, 12 millions d’abonnés au printemps 2000 et près de 25 millions en 2001. “Cela concerne surtout les grandes villes, et les communications passent par le réseau télécoms classique, précise Alexander Lunshof. Seuls Shangaï et Pékin disposent de lignes ADSL.”
Les droits d’auteur respectés ?
Particularité chinoise, tous les échanges en ligne circulent par un hub situé au ministère de l’Information, qui effectue un filtrage par mots-clés. Ainsi, on ne pourra pas accéder au site du New York Times, mais on pourra lire le Financial Times. Illustration en ligne du vieux principe : non à la politique, oui au business !Autre sujet traité par l’accord de l’OMC : le respect de la propriété intellectuelle. Un concept nouveau dans ce pays, où la contrefaçon peut faire office de passe-temps. “Le brevet et les droits d’auteur ne font pas partie de la culture chinoise, et en plus le piratage se révèle fort lucratif. Il faudra beaucoup de temps avant que les magistrats locaux les prennent en considération”, reconnaît l’avocat du cabinet Coudert Frères. Et que des sanctions dissuasives soient prononcées et appliquées. Seule lueur d’optimisme : on peut envisager que les dirigeants chinois voudront faire preuve de bonne volonté vis-à-vis des autorités étrangères. Et qu’ils veilleront à faire appliquer le droit. Du moins au début…
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