La blague (mauvaise ?) de geek n’aura pas duré longtemps. Voici quelques jours, les internautes ont vu apparaître sur la Toile karachigate.fr. Une allusion à l’attentat commis dans la capitale du Pakistan en 2002, devenu depuis une affaire d’Etat. Le site renvoyait directement sur celui de l’Elysée.
Dans cette affaire, où la suppression de rétrocommissions pourrait être la cause d’un acte de terrorisme, le nom d’Edouard Balladur et de son porte-parole de l’époque, Nicolas Sarkozy, ont récemment été prononcés.
Des suites judiciaires ?
Force est de constater en ce mardi 23 novembre que la redirection n’est plus. Sur son blog l’auteur de la farce, toujours anonyme, explique avoir reçu un e-mail de l’Elysée par l’intermédiaire de son hébergeur Gandi.
« Nous avons constaté que le site karachigate.fr renvoie automatiquement et sans aucune forme de précaution sur le site officiel de la présidence de la République… Ce renvoi est abusif et nous condamnons cette pratique, indique le courriel rapporté par le blogueur. Et de poursuivre, Je vous prie de faire le nécessaire pour mettre un terme dans les meilleurs délais à cette redirection abusive… Dans tous les cas la présidence de la République se réserve le droit de donner toutes les suites requises à cet abus dans le cadre du respect de ses droits ».
Pourtant il semble bien que la présidence de la République puisse difficilement faire valoir ses droits devant un tribunal. Maître Eric Barbry, avocat spécialisé pour le cabinet Alain Bensoussan, estime à sa connaissance qu’il « n’y a pas de contentieux de cette nature sur les liens hypertexte. Il en existe cependant sur les fondements de la concurrence déloyale et de contrefaçon ». Pour maître Annabelle Richard, avocate du cabinet Ichay et Mullenex spécialisé dans les nouvelles technologies : « L’Elysée a tenté un coup de bluff sur ce qu’il représente. Sa position serait difficilement défendable devant la justice. La présidence de la République ne peut invoquer la contrefaçon de marque, “l’Elysée” n’étant pas d’une part déposée. D’autre part, ce terme très générique est utilisé avec d’autres associations par d’autres marques. Il est bien trop banal ».
Cette redirection automatique ne provoque aucune baisse d’audience sur le site du chef de l’Etat. « La concurrence déloyale ou le parasitime serait tout aussi difficile à plaider en l’absence d’exploitation commerciale, défend Annabelle Richard. Quant à l’atteinte à l’image ? Le blogueur n’ayant fait aucun commentaire, il ne peut être accusé de diffamation. Le nom de domaine pourrait être considéré comme une forme de dénigrement, mais c’est aller très loin ».
Cas prévu dans les conditions générales de l’Elysee.fr
Eric Barbry émet quelques bémols : « Un site appartient à son éditeur. Il est maître de ses décisions et des choix stratégiques. Il a tout à fait le droit de ne pas vouloir être lié à un site en particulier, même si les liens hypertexte sont le fondement technique d’Internet ».
Dans ses informations légales et éditoriales, le site de l’Elysée a pris soin d’encadrer la création de liens vers ses contenus. Il les autorise tout en précisant : « Cette autorisation ne s’applique en aucun cas aux sites Internet diffusant des informations à caractère raciste, pornographique, xénophobe, polémique ou pouvant, d’une façon générale porter atteinte à la sensibilité du plus grand nombre ». On notera le terme « polémique », un mot sufisamment fourre-tout et générique pour permettre la plus large interprétation qui soit.
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