Il est une entreprise américaine du Nasdaq dont une partie du destin se joue entre la Californie, l’Asie… et Issy-les-Moulineaux, aux portes de Paris. L’entreprise s’appelle GoPro, un géant de l’image et du marketing qui a toujours apprécié les talents français : l’unité d’Issy-les-Moulineaux est issue d’un des trois rachats d’entreprises d’imagerie que l’américain a effectué dans l’Hexagone. Un lien entre la France et les pixels que le PDG et fondateur de GoPro, Nick Woodman, justifie en soulignant que « la photo et le cinéma sont nés en France et je pense que cela explique en grande partie le lien très fort que le pays entretient avec l’image ».
Le poids de l’équipe parisienne de GoPro est important compte tenu de la taille, somme toute modeste, de l’entreprise. « Nous sommes une équipe d’environ 80 personnes à Issy-les-Moulineaux pour un groupe qui emploie environ 950 personnes dans le monde », détaille Michael Kraak, vice-président du développement des technologies de GoPro Paris-Issy. Ces 8% d’employés isséens pèsent donc lourd dans la balance, ce d’autant plus qu’il s’agit essentiellement d’ingénieurs de haut niveau.
Une équipe d’ingénieurs
Des ingénieurs qui ne sont pas là pour faire de la figuration, car de nombreuses technologies clés des caméras GoPro sortent de leurs cerveaux. « Nous sommes une unité de recherche et développement qui travaille sur tout ce qui est lié à l’image, de la partie caméra à la puce de traitement, en passant par le logiciel pour smartphone », poursuit Michael Kraak. Ancien employé du spécialiste français de la photo qu’est DxO, l’affable et souriant quadragénaire explique : « Nous travaillons de concert avec les équipes de GoPro dans le monde, surtout avec celle de Carlsbad, en Californie. Nous avons trois grandes missions : développer et embarquer des algorithmes, participer à la mise en place des feuilles de route technologiques et développer l’application mobile Quik ».
Car l’application mobile que vous installez sur vos smartphones est en grande partie made in France. « L’équipe de développement mobile est celle de Stupeflix (l’une des trois entreprises rachetées par GoPro en France, ndr) qui développait une app de montage vidéo appelée Replay », relate M. Kraak. Rachetée en 2016, l’équipe de Stupeflix développe les fonctionnalités d’édition photo et vidéo qui viennent juste d’être implémentées dans Quik mobile, un programme disponible sur iOS et Android.
« C’est très satisfaisant pour un ingénieur français de participer au développement de technologies qui se retrouvent dans les mains de plus 5 millions d’utilisateurs par an », se réjouit Mr Kraak. Une joie qui doit sans doute être aussi teintée d’une certaine fierté, car une des fonctions majeures de la Hero 7 Black, encore améliorée par la nouvelle Hero 8 Black cette année, provient des cerveaux hexagonaux.
HyperSmooth, l’ultra stabilisation made in France
Cette fonction incontournable, c’est la stabilisation HyperSmooth, qui passe en version 2.0 dans la toute nouvelle Hero 8 Black. Une soupe d’algorithmes qui offre au dernier modèle de la caméra d’action de GoPro des séquences vidéo d’une stabilité à toute épreuve dans quasiment toutes les situations. « Le secret réside dans l’utilisation des informations des capteurs embarqués dans la caméra. La stabilisation électronique (EIS) normale ne suffit pas, on prend aussi en compte les informations de l’accéléromètre et du gyroscope pour identifier l’activité et agir en conséquence sur la façon de corriger les mouvements », détaille Mickael Kraak.
HyperSmooth est la meilleure stabilisation électronique en vidéo que nous ayons vu à ce jour, une merveille développée non pas par le reste des équipes de Stupeflix, mais par les transfuges de DxO. Outre Michael Kraak lui-même, le cœur des équipes de l’unité qui travaille sur le traitement de l’image à Issy-les-Moulineaux provient en effet en grande partie du champion national dont le siège est à deux pas (Boulogne-Billancourt). Un DxO qui a laissé partir quelques talents au fil des années, des talents qui se sont naturellement agrégés dans cet autre géant de l’image qu’est GoPro.
Du code… et des morceaux de processeur
Jusqu’à la Hero 5 Black, les GoPro fonctionnaient avec une puce développée par Ambarella, spécialiste américain des SoC embarqués. L’idylle entre GoPro et Ambarella s’est arrêtée à partir de la Hero 6 Black : pour la première fois, cette caméra intégrait une puce entièrement développée par les ingénieurs de GoPro, le GP1. « C’est un gros risque que la direction a pris en développant le silicium, mais les efforts payent aujourd’hui », se remémore Michael Kraak. « Nous avons beaucoup travaillé avec les équipes américaines qui centralisent le développement du GP1. La difficulté étant de faire des choix, des compromis entre puissance, taille, consommation électrique, etc. ».
Le développement du GP1, auquel l’équipe française a participé sur les éléments d’imagerie (ISP pour Image Signal Processor, processeur de traitement du signal) a largement porté ses fruits. « Ce développement maison est un succès puisque le GP1 de la Hero 8 Black est le même que celui de la Hero 6 Black ». La puce, produite par le japonais Socionext (résultat de la fusion de deux divisions de Fujitsu et Panasonic), a donc tenu trois générations. Elle serait actuellement utilisée « aux alentours de 90% de ses capacités. Nous avons encore un peu de marge en termes de puissance », explique l’ingénieur.
La proximité française ne nous a pas permis de soutirer des informations sur la prochaine caméra de GoPro : Hero 9 ? Max 2 ? Le GP1 sera-t-il maintenu ? Aucune de nos questions indiscrètes sur les caméras de 2020 n’a réussi à passer le cap du sourire poli suivi d’un hochement (négatif) de la tête.
« La seule chose que je puisse dire c’est qu’aucune caméra GoPro ne peut sortir sans un effet ‘’wow’’. On ne pense pas qu’à la technique, la taille de capteur, la 8K, tout cela. On cherche à développer des fonctions qui soient vraiment utiles et qui procurent cet effet ‘’wow’’ ».
En 2020 vous saurez donc que si vous faites ‘’wow’’ devant la future caméra de GoPro, un petit bout de cet émerveillement proviendra sans doute d’une petite tribu d’irréductibles Gaulois cachés en périphérie de Paris.
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