L’exposition parisienne Nature + Eye’m hungry, installée au sous-sol de la
Fondation Cartier jusqu’au 19 février 2006, nous plonge dans un univers où l’ordinateur se mue en formidable instrument de création et d’expérimentation.
Américain d’origine japonaise, John Maeda s’impose comme l’un des premiers à exploiter le potentiel artistique des langages de programmation. Enseignant au sein du Media Laboratory du Massachusetts Institute of Technology (MIT),
il nous livre son approche très personnelle de l’informatique.01net. : Vous avez inventé un nouveau logiciel de ‘ peinture en mouvement ‘ pour créer les paysages numériques présentés en ce moment à la Fondation Cartier. Pouvez-vous nous
expliquer comment il fonctionne ?
John Maeda : J’ai passé ces cinq dernières années à imaginer comment faire des formes numériques plus douces intégrant d’avantage d’allusions au monde physique. Il s’agit juste d’un
logiciel que j’ai écrit et dont j’ai, finalement, fait bon usage.Le résultat est très poétique. En traduisant votre travail dans un langage mathématique, comment parvenez-vous à exprimer votre sensibilité ?
Je travaille essentiellement sur papier. Je dédie environ 95 % du temps de fabrication à cela. Le temps de codage véritable est très court. Je ne peux pas beaucoup taper en raison de blessures à la main. Je limite donc tout.Vous êtes considéré comme pionnier dans le domaine du design graphique numérique. Pouvez-vous nous donner un exemple de ce que vous avez introduit dans les interfaces Web actuelles ?
J’ai passé la plus grande partie de mon temps dans le monde ‘ préWeb ‘ avec une série d’?”uvres numériques et à imprimer ?” présentées sur Cd-Rom ?” intitulées
Reactive Books. J’ai inventé le terme ‘ réactif ‘ pour décrire une approche différente de l’interactivité qui relevait moins de l’interaction intuitive et plus de réactions
instinctives à partir de l’ordinateur. Mon dernier travail sur le Web, réalisé pour Shiseido, présageait du développement de systèmes dynamiques et fluides comme ceux que nous connaissons aujourd’hui avec Flash.
Cela a commencé avec une série de calendriers sur Internet et de cartes électroniques dynamiques qui ne fonctionnent plus aujourd’hui (lire l’encadré). Puis, j’ai arrêté de faire ce genre
d’?”uvres au moment où je me suis consacré à la direction d’un groupe de recherche baptisé ‘ Aesthetics and Computation Group ‘ au
Media Lab du MIT. Ce travail a conduit à la mise en valeur de nombreux jeunes artistes comme
Ben Fry,
Casey Reas,
Golan Levin,
Peter Cho et bien d’autres.Vous dites avoir choisi le thème de la nature parce que vous vouliez comprendre le c?”ur de l’ordinateur, sa forme naturelle. Qu’avez-vous appris à ce propos ?
J’ai appris ce que j’ai toujours su : ce ne sont pas les limitations de la machine mais celles des langages de programmation qui nous empêchent d’être vraiment ‘ naturels ‘ sur
ordinateur.Aujourd’hui, la plupart des graphistes et artistes tendent à utiliser les mêmes logiciels pour réaliser leurs créations (Photoshop, Illustrator, Flash, Final Cut, etc.). Pensez-vous que ces outils restreignent leur
créativité ?
L’idée de ‘ limitations ‘ est très relative. Si les gens trouvent du plaisir à fabriquer des choses sur un ordinateur à l’aide de systèmes existants, c’est tout ce qui m’importe
personnellement. Eprouver de la joie n’est pas une limitation ?” que l’effort créatif soit totalement novateur ou pas.Dans le catalogue de l’exposition, vous mentionnez une ère post-numérique ‘ quand l’ordinateur deviendra aussi humain que nous ?” quand il sera devenu analogique comme
nous ‘. Pensez-vous que le XXIe siècle marquera l’avènement de cette nouvelle ère ? Quels sont les obstacles les plus difficiles à franchir d’ici là ?
Je pense que beaucoup de choses vont se passer pendant ce siècle. Nous allons tous disparaître en tant qu’espèce humaine ou, peut-être, allons-nous survivre. Notre relation avec l’ordinateur dans le futur ne
s’épanouira qu’une fois que nous nous comprendrons entre nous, en tant qu’humains.
L’obstacle le plus difficile pour les humains est de découvrir comment s’entendre les uns avec les autres. Nous n’avons bien sûr pas besoin d’un ordinateur pour nous le dire. Peut-être sommes-nous
?” nous-mêmes les hommes ?” le principal obstacle à l’ère post-numérique.
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