Neuer Markt à Francfort, Techmark à Londres, Nouveau Marché à Paris. Toutes ces places boursières ont été créées au milieu des années 1990 pour surfer sur la vague des valeurs de croissance, celles de la net économie notamment. Mais ces marchés européens affichent des performances catastrophiques sur les douze derniers mois, avec des baisses atteignant parfois plus de 70 %. Ce bilan peut susciter des interrogations. Les nouveaux marchés ont-ils pour autant dit leur dernier mot ? Pas sûr ! Les valeurs tech-nologiques ont beau avoir le moral à zéro, et l’indice Techmark de la Bourse de Londres être au plus bas depuis sa création, en 1999, les financiers d’outre-Manche affichent un flegme des plus British. “Cette année n’a pas été fantastique, et on aimerait que l’indice soit plus haut. Mais jusqu’à présent, il n’y a pas eu de véritables catastrophes ni de faillites spectaculaires“, argumente Tim Ward, responsable des marchés primaires au London Stock Exchange.Ce dernier ne semble pas inquiet de la concurrence du Neuer Markt, du Nouveau Marché ou du Nasdaq Europe (ex-Easdaq). “Si vous comparez les principaux marchés du secteur, nous représentons près de 85 % [en valeur] des transactions portant sur les valeurs technologiques en Europe, contre 10 % pour le Neuer Markt, affirme Tim Ward. Et même en déduisant des poids lourds du secteur comme Vodafone, nous sommes toujours au-dessus des 50 %.“
Techmark en bonne voie
À ce jour, le Techmark compte 250 sociétés cotées (soit 65 introductions en 2000 mais seulement une dizaine en 2001) et l’AIM (Alternative Investment Market) 536 sociétés (dont 70 introduites cette année). Ce deuxième segment de la cote britannique est dédié aux valeurs petites et moyennes à fort potentiel de croissance, tandis que le Techmark est réservé aux valeurs high-tech, toutes tailles confondues, où cohabitent les blue chips (grandes valeurs) du Footsie (FTSE) comme Vodafone et British Telecom, et les petites capitalisations comme le fournisseur de logiciels Torex, ou encore la société de biopharmaceutique Alizyme.En 2000, près de 14 milliards d’euros (92 milliards de francs) ont été levés sur le Techmark et 4,8 milliards sur l’AIM. “Les marchés londoniens ont atteint une certaine maturité. Il y prime une stratégie d’investissement à long terme et non de spéculation, avance Tim Ward, se défendant de la récente volatilité du secteur. Il y a plus de gérants de fonds à Londres que nulle part ailleurs en Europe, ce qui est très favorable pour des marchés comme le Techmark. Et il y a également à la City le plus grand nombre d’analystes spécialisés sur les TMT.” À l’écouter, l’avenir du Techmark semble assuré.En revanche le bilan est beaucoup plus sombre pour le Neuer Markt. Longtemps considéré comme le petit frère du Nasdaq américain, ce marché est devenu en quelques mois le symbole de la destruction de capital en Allemagne. La situation est si grave que les experts conseillent aux investisseurs d’éviter les placements à la Bourse des valeurs technologiques de Francfort. “Nous recommandons à nos clients de ne pas toucher au Neuer Markt !“, renchérit un conseiller en gestion de patrimoine à la SEB-Bank.
Paris moins atteint
Le cas du Nouveau Marché de Paris (- 56 % sur les douze derniers mois et – 81 % depuis son plus haut atteint en mars 2000) est à mi-chemin entre Londres et Francfort. “ Le Nouveau Marché, qui comporte 160 sociétés cotées contre 350 pour son homologue allemand, n’a pas été éclaboussé par de grands scandales. Mais il est tout autant délaissé par les investisseurs institutionnels “, constate Manuel Doméon de la Compagnie financière Edmond de Rotschild. Il est vrai que la capitalisation boursière du Nouveau Marché n’est que de 17,2 milliards d’euros, soit trois fois moins que le Techmark. Et à Paris, la communication financière a des progrès à faire, comme en témoignent les fiascos d’Integra, Kalisto, et Fi System. Quant aux nouveaux marchés de l’Europe du Sud, le Nuevo Mercado de Madrid et le Nuovo Mercato de Milan, ils en sont encore au stade embryonnaire, et ne pèsent pas plus de 50 millions d’euros.D’une façon générale, les nouveaux marchés européens ont subi trois crises. La première fut organique. Il est vite apparu que le carcan juridique et réglementaire était trop large pour accueillir les nouvelles pousses de la nouvelle économie à l’avenir aussi prometteur qu’incertain. La cotation de jeunes sociétés qui présentaient des modèles d’affaires trop faibles apparaît aujourd’hui un peu trop hâtive. La seconde crise est purement financière. Trop de paris ont été pris sur des entreprises qui ne présentaient pas les qualités intrinsèques nécessaires pour rassurer les actionnaires. La troisième crise est conjoncturelle, il est à craindre que les prochaines vagues d’investissements boursiers se portent avant tout sur des marchés plus liquides et mieux réglementés.
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